#MonEnvoyéSpécial. Les dessous du "made in China" français
La commune d’Aubervilliers regroupe une vaste communauté chinoise. Ils sont plus de 3 500 Chinois aujourd’hui, pour la plupart originaires de la région de Wenzhou, à l’est du pays. Beaucoup travaillent dans le commerce et la confection textile. En l’espace de dix ans, la ville d’Aubervilliers a remplacé le quartier du Sentier. Les 1 500 grossistes en textile s’alignent le long des rues et proposent chemises, vestes ou sacs à bas prix. Mais dans quelles conditions ces produits sont-ils fabriqués ? Nos journalistes ont découvert une filière de fabrication locale et clandestine dans les sous-sols des pavillons de la ville.
Dominique possède un magasin de prêt-à-porter à Niort. Sa marchandise vient d’Aubervilliers. Chaque mois, elle monte en banlieue parisienne pour se fournir en vêtements. En l’espace de dix ans, cette ville de Seine-Saint-Denis est devenue le haut lieu du textile et de la maroquinerie en Europe. Des grandes marques viennent même s’y installer. Un immense centre commercial regroupant 300 grossistes y a ouvert ses portes en mars dernier.
Certains ont su tirer parti de ce commerce. C’est le cas de monsieur Wang. Arrivé en France à l’âge de 13 ans, il a su bâtir un véritable empire du textile ces trente dernières années. Il possède 220 boutiques à Aubervilliers, soit une enseigne sur cinq. Devenu millionnaire, il s’apprête même à lancer sa propre chaîne de télévision à destination de la communauté chinoise, Eurasia TV. Mais alors que certains businessmen ont su se faire une place sur le marché de la mode, d'autres en sont devenus de véritables esclaves modernes.
Les forçats de la couture
Il a suffi de quelques clics à nos journalistes pour tomber sur des offres d’emploi en ligne plutôt douteuses. La plupart de ces dernières, en chinois uniquement, proposent des postes de couturières qui fabriqueront une partie de la marchandise vendue par les grossistes d’Aubervilliers. Mais si certains employeurs appliquent le code du travail et n’embauchent que des ouvriers en situation régulière, d’autres n’hésitent pas à employer des clandestins.
Caves insalubres, odeur insupportable et semaines de travail de 90 heures, ces ateliers hors la loi sont situés à quelques kilomètres du centre de Paris. Une situation délirante aujourd’hui en France et dénoncée par l’Ocriest, l’Office central pour la répression de l'immigration irrégulière et l'emploi d'étrangers sans titre.
Des poursuites rares
Les gérants de ces ateliers encourent jusqu'à 10 ans de prison. Mais les poursuites sont rares et il est difficile de démanteler ces filières de confection illégales. Parfois pourtant, certains décident de se battre. C'est le cas des quatre ouvrières chinoises filmées dans ce reportage. Elles ont décidé d'attaquer leur employeur aux prud'hommes pour obtenir les trois mois de salaire qui ne leur ont pas été versés. Après des mois de procédure, elles ont obtenu gain de cause.
Un reportage de Leslie Benzaquen, Mei li, Edward Bally, Edouard Britsch, Charles Maumy, Marie Drouet et Sylvie Millet.
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