Assassinat de Samuel Paty, laïcité à l'école... Le "8h30 franceinfo" de Iannis Roder

Le professeur d'histoire-géographie et directeur de l’observatoire de l’éducation de la Fondation Jean Jaurès était l'invité du "8h30 franceinfo", lundi 4 novembre 2024.
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Iannis Roder, directeur de l’observatoire de l’éducation de la Fondation Jean Jaurès était l'invité du "8h30 franceinfo", lundi 4 novembre 2024 (FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

Iannis Roder, directeur de l’observatoire de l’éducation de la Fondation Jean Jaurès était l'invité du "8h30 franceinfo", lundi 4 novembre 2024. Assassinat de Samuel Paty, laïcité à l'école... Il répondait aux questions de Salhia Brakhlia et Jérôme Chapuis.

"C’est notre modèle qui est visé"

Samuel Paty a été assassiné le 16 octobre 2020. Huit accusés se présentent aujourd'hui devant la cour d’assises spéciales de Paris : deux personnes sont poursuivies pour complicité d'assassinat, six pour association de malfaiteurs terroriste. L’auteur de l’assassinat, lui, a été neutralisé par la police peu après les faits. "Je crois que le procès de cette affaire terrible de l'assassinat de mon collègue Samuel Paty peut nous servir, je l'espère en tout cas, à comprendre ce qui nous arrive." dit Iannis Roder. Le professeur d'histoire-géographie ajoute que "ce n’est pas seulement l’assassinat d’un homme, c’est l’assassinat d’un enseignant. C’est l’école qui a été visée. C’est notre modèle qui est visé."

Il rappelle qu'après Samuel Paty, "c'est Domnique Bernard qui a été assassiné. Je pense que certains n'ont pas encore compris que nous sommes face à des gens qui ne sont pas tous extrêmement bien organisés, mais qui, ponctuellement, peuvent nous faire extrêmement mal et qui, dans leurs esprits, nous mènent une guerre."

"On n'a pas pris assez au sérieux la menace qui pesait sur nous"

Si ces assassinats ont pu avoir lieu, c'est parce "qu'on n'a pas pris assez au sérieux la menace qui pesait sur nous", juge Iannis Roder. Il prend l'exemple "d'éléments d'alerte", comme la hausse des actes antisémites "dès le début des années 2000". Iannis Roder explique qu'il a été "accusé publiquement" d'être raciste ou réactionnaire quand il dénonçait "un antisémitisme, une homophobie ou un sexisme qui n'émanaient pas de l'extrême droite traditionnelle mais de jeunes élèves qui rapportaient ce qu'ils entendaient peut-être à la maison, peut-être dans leur quartier, peut-être dans les associations qu'ils fréquentaient" et qui "se présentaient comme étant d'origine musulmane".

"Cela n'a pas été accepté par certains qui ne supportaient pas que ceux qu'ils considèrent, légitimement ou pas, comme des victimes sociales puissent se transformer en antisémites, en sexistes et en homophobes. Ça nous a freinés dans la compréhension de l'événement", estime Iannis Roder. 

"Les réseaux sociaux bouleversent le rapport à la laïcité, mais aussi à la vérité"

Le directeur de l’observatoire de l’éducation à la Fondation Jean Jaurès propose quelques pistes de travail afin de réapprendre aux enfants à respecter l'école comme un endroit où "on doit transmettre les connaissances et faire partager les valeurs de la République". Selon lui, l'école doit mieux communiquer ses fonctions aux parents d'élèves qui inscrivent leurs enfants dans un établissement scolaire public, dont le but est d'œuvrer à "la pérennisation de la République et de l'esprit républicain". "C'est la construction citoyenne", ajoute-t-il.

Ensuite, il y a un travail de pédagogie à faire aux élèves qui sont aujourd'hui "surinformés", juge Iannis Roder. "Les réseaux sociaux bouleversent le rapport à la laïcité, mais aussi à la vérité". L'historien pointe "notamment TikTok" qui leur permet dès le plus jeune âge d'avoir accès à "un flot d'informations continu sans avoir nécessairement ni les connaissances ni les outils intellectuels pour hiérarchiser et pour travailler sur les sources". Ce qui amène parfois à des situations difficiles à gérer pour l'enseignant quand il se confronte à ses élèves. Certains "vous disent 'Ouais, mais vous vous dites ça, mais moi, j'ai vu ça'. Tout dépend du rapport pédagogique et affectif que vous avez avec vos élèves", conseille l'historien, "s'ils vous font confiance, vous pouvez tout démonter."

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