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Au fil de l'eau. Les eaux usées, un atout pour lutter contre la propagation du coronavirus ?

Faut-il tester les eaux troubles pour y voir plus clair dans la contamination par le Covid-19 ? Un observatoire unique en France travaille sur la traque du virus dans les eaux usées. 

Article rédigé par franceinfo, Catherine Pottier
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
22 juillet 2020. Un technicien du laboratoire de l'opérateur public Eau de Paris à Ivry-sur-Seine essaie de détecter la présence du nouveau coronavirus. (THOMAS SAMSON / AFP)

Le professeur Vincent Maréchal, virologue à l'université Paris /Sorbonne est co-fondateur de l'observatoire Obépine (observatoire épidémiologique des eaux usées. Un lieu unique en France qui traque la présence du Covid-19 dans les eaux usées pour évaluer la circulation du virus au sein de la population.  

L'idée, c'est de prélever de l'eau usée dans les stations d'épuration ou dans les égouts pour connaître ce que contiennent les matières fécales.

Vincent Maréchal, virologue

On va ensuite avoir une étape de concentration des particules virales présentes dans ces eaux usées, puis une phase où l'on va extraire toute l'information génétique contenue dans ces particules. Si on travaille sur le Covid-19 par exemple, on va avoir à la fois l'information génétique qui code le virus Sars-CoV-2, mais aussi des informations génétiques qui servent à fabriquer des bactéries.

Ensuite, on a des techniques spécifiques qui nous permettent de rechercher certains agents pathogènes. Le réseau Obépine s'est donné pour mission dès le mois de mars 2020 de rechercher le virus du Covid-19, et donc de quantifier le génome. Cet outil peut évidemment être décliné pour tout autre agent pathogène, que ce soit des virus, des bactéries ou des parasites.                         

Un moyen de prévention pour l'avenir ?  

"Que ce soit en France ou ailleurs, comme en Espagne ou en Italie par exemple, les données scientifiques que nous avons apportées démontrent que l'on peut détecter le virus ou la re-circulation du virus, précise Vincent Maréchal, entre une semaine et trois semaines avant que celui-ci ne circule vraiment dans la population humaine. C'est donc un marqueur très précoce."

Il est toujours difficile de dire qu'il est précoce et prédictif, parce qu'on ne sait jamais vraiment où l'on va quand on débute une recherche scientifique, mais aujourd'hui on l'intègre vraiment dans le cortège des indicateurs qui permettent de piloter très tôt les évolutions de l'épidémie et donc les mesures que l'on peut prendre en amont.

L'objectif d'Obépine est de tendre vers un réseau sentinelle pérenne

Un réseau qui permettrait d'observer pour les années à venir la circulation des éléments pathogènes. On parle beaucoup des virus mais on trouve aussi dans les eaux usées beaucoup d'autres agents pathogènes. Il faut se souvenir de la bactérie responsable du choléra, découverte dans les eaux usées, d'un certain nombre de parasites digestifs aussi. Même chose pour la gastro-entérite ainsi que pour le ou les virus de la grippe. On les trouve pratiquement tous dans les eaux usées. L'analyse est simple, si on trouve des traces de virus dans les eaux usées, ça veut dire qu'il circule dans la population, même s'il n'y a pas de personnes malades.        

Faut-il harmoniser les procédures ? 

 "Ce qui me semble important c'est de connaître la sensibilité des dispositifs", explique le professeur Maréchal. Pour qu'un dispositif soit très sensible, il faut avoir des techniques qui permettent de détecter de très faibles quantités de virus dans les eaux usées afin d'avoir un signal précoce. Nous travaillons depuis mi-décembre pour répondre à une question : Est-ce que les variants circulent dans la population ?"

On sait aujourd'hui qu'il y a un variant britannique, mais aussi un variant sud-africain et même japono-brésilien. "Nous développons actuellement des techniques qui vont nous permettent de détecter très tôt ces variants dans les eaux usées, de manière à avoir un système d’alerte.

Nous planchons également sur des techniques de séquençage qui vont nous permettent de lire les informations génétiques de tous les génomes viraux représentatifs, dans échantillon d'eau usée, précise le chercheur virologue. Nous voulons savoir si dans ces 500, 1 000 ou 10 000 séquences, il y a des informations qui évoquent la présence du variant britannique, sud-africain ou autre. On attend beaucoup de ces techniques qui sont encore en cours de développement."      

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