La neige artificielle est-elle une menace pour les ressources d'eau potable ?
Samuel Morin, chercheur au CNRM, une unité de recherche de Météo France et du CNRS, est l'invité du "Fil de l'eau". Pour produire de la neige artificielle, les quantités d'eau nécessaires sont considérables.
Les stations de ski ont ouvert leurs domaines, et on sait que pour compenser le manque d'enneigement dans certains endroits et à certaines périodes, la plupart sont désormais équipées de canons à neige.
Le problème c'est que chaque année, les quantités d'eau nécessaires pour produire cette neige artificielle sont considérables. Chaque année, 1 hectare de piste de neige artificielle consomme entre 3 et 4000 mètres cubes d'eau, l'équivalent d'une piscine olympique pour seulement 3 canons à neige !
Le procédé d'artificialisation de la neige est assez simple : lorsque les températures sont négatives, il faut expulser de l'eau dans l'air ambiant, par l'intermédiaire de perches ou de canons à neige, afin qu'elle se transforme en cristaux de glace avant d'atteindre le sol.
"La composition chimique de la neige artificielle est absolument identique à celle de la neige naturelle."
Samuel Morinà franceinfo
Dans les deux cas, il s'agit d'eau sous forme solide. En revanche, contrairement à la neige artificielle, la neige naturelle, (celle qui tombe du ciel), est composée de flocons, des structures cristallines qui se forment dans les nuages.
Impact sur la ressource en eau
Selon Samuel Morin, l'impact sur les nappes phréatiques et la ressource en eau reste faible, si l'eau utilisée pour alimenter les canons à neige n'est pas prélevée au beau milieu de l'été, pendant une période de sécheresse. Le chercheur estime qu'en montagne, en période hivernale, les précipitations sont suffisantes (souvent même plus importantes avec le dérèglement climatique) pour ne pas trop impacter la ressource.
"On peut espérer pouvoir produire de la neige sans forcément porter atteinte à l'équilibre global du cycle hydrologique local", estime Samuel Morin, tout en expliquant qu'il faut toutefois s'assurer de pouvoir stocker l'eau sans trop de déperdition par évaporation.
Toutes ces questions doivent s'intégrer dans une réflexion globale de l'aménagement du territoire. Il faut s'interroger sur la part d'utilisation de l'eau dans l'agriculture, dans la consommation, mais aussi dans l'activité hydroélectrique, industrielle et touristique. Ce sont des considérations qui commencent à émerger dans certains endroits, mais des progrès sont encore nécessaires pour mettre en commun ces informations.
"Pour l'instant l'usage de l'eau pour la production de neige artificielle s'intègre dans une gestion globale de la ressource en eau", poursuit Samuel Morin. Le chercheur de Météo France reconnaît qu'il peut y avoir des zones de stress hydrique dans certaines régions mais actuellement, en montagne, grâce aux réserves pluviométriques de l'automne et de l'hiver, il y a assez d'eau en amont et en aval.
Toute la question est de savoir si cette situation va perdurer avec le réchauffement climatique, c'est pourquoi il est nécessaire "d'anticiper", reconnaît volontiers Samuel Morin.
Des bactéries pour favoriser la congélation
Il y a quelques années, on mettait certaines bactéries dans l'eau car elles permettaient d'obtenir une congélation plus rapide des gouttelettes d'eau. Cela permettait aussi d'obtenir de la neige, à des températures légèrement supérieures.
Pour des questions de coût et de respect environnemental, Samuel Morin affirme que cette technique est aujourd'hui abandonnée par l'industrie du ski français.
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