BD, bande dessinée. "New York Cannibals" par le duo Boucq et Charyn
Le duo Boucq-Charyn se reforme pour plonger au plus profond de la grosse pomme où tout n'est peut-être pas pourri. Jouant sur le culte des corps, "New York Cannibals" se présente comme une fable sur la maternité, autant qu'une critique du capitalisme libéral.
François Boucq n’en finit pas de sculpter les corps, de pétrir les muscles, de modeler les articulations, avec un goût prononcé pour les morphologies plus ou moins monstrueuses. New York Cannibals, qu’il a construit avec son complice le romancier américain Jérôme Charyn, marque une nouvelle étape dans ce travail sur les formes.
Une culturiste tatouée en mal de maternité
Leur héroïne s’impose dès la couverture, douce figure de madone à l’enfant Jésus et physique hypertrophié.
Quand on est dessinateur, on regarde les corps. Je trouve ceux des culturistes fascinants. J’ai été élevé dans un milieu ouvrier. J’ai vu les corps en mouvement ; comment les corps s’adaptaient à l’activité physique.
François Boucq
Ici, le culte du corps et la floraison des tatouages reflètent le narcissisme d’une société qui n’en finit pas de se regarder sur tous les écrans et dans les miroirs démultipliés des grandes cités.
Je n’ai pas besoin d’être tatoué, car je suis dessinateur. Je ne peux pas me satisfaire d’un seul dessin.
François Boucq
Comme souvent encore chez Boucq, particulièrement quand il travaille avec Charyn, New York Cannibals est un polar fantastique. Les auteurs y découvrent la grosse pomme moins en levant la tête sur les gratte-ciels démesurés qu’en plissant les yeux pour plonger dans les sombres entrailles de la ville.
Dans la profondeur d’une ville aussi ébouriffante que New York, il peut y avoir un petit trésor. Et même le paradis.
François Boucq
New York Cannibals tient encore de l’allégorie sur le capitalisme ultra-libéral buveur de sang et de la réflexion sur la maternité, observée à travers trois femmes : l’androgyne en mal d’enfant, la mère universelle, plantureuse et généreuse, et la sorcière maléfique, qui dévore la progéniture des autres.
New York Cannibals, Boucq et Charyn, aux éditions du Lombard
Depuis quelques semaines, François Boucq a délaissé la bande dessinée pour le dessin d’audience. Il suit pour Charlie Hebdo le procès des 14 suspects impliqués dans les attentats terroristes de janvier 2015.
De son côté, Jérôme Charyn publie cet automne Avis de grand froid, ultime aventure policière de son héros de roman, Isaac Sidel, aux éditions Rivages/Noir.
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