C'est mon affaire. Quels sont vraiment les devoirs des employeurs en matière de télétravail ?
Le gouvernement l'a martelé : il faut renforcer le télétravail. Mais qu'est-ce qu'on risque si on ne suit pas ces recommandations ? Quels sont les droits et les devoirs des employeurs et des salariés ?
Élisabeth Borne, la ministre du Travail a prévenu, il va y avoir des contrôles. Des inspecteurs du travail vont pouvoir vérifier l'application du télétravail... Paul van Deth, avocat spécialisé en droit social au cabinet Vaughan associés nous donne son éclairage.
franceinfo : Pour un employeur, est-ce que c'est un devoir absolu aujourd'hui, une obligation légale, de placer tous ses salariés qui le peuvent en télétravail ?
Paul van Deth : Non. Autant, en droit commun le télétravail est un droit souple, autant le télétravail que nous voyons aujourd'hui, est une norme molle. C'est-à-dire que à part dire aux employeurs "vous avez la possibilité d'imposer le télétravail à vos salariés", le code du travail n'impose rien en la matière.
Quels sont les risques que court un employeur s'il ne met pas ses salariés en télétravail ?
L'instruction de mercredi dernier est intéressante parce qu'elle demande aux inspecteurs du travail de contrôler et de vérifier si les postes télétravaillables sont bien télétravaillés. En réalité, il n'y a pas de disposition, à part les communications, à part le protocole sanitaire, à part des normes qui sont totalement molles et qui n'ont pas de valeur contraignante, il n'y a pas de disposition qui impose à l'employeur de suivre cette recommandation. En revanche, il y a des dispositions qui sont dans le code du travail et dans le code pénal qui imposent à l'employeur de préserver la santé et la sécurité de ses salariés.
Quel est le rôle des inspecteurs du travail ?
L'instruction qui leur est donnée fait référence à l'évaluation des risques. C'est une obligation des employeurs de tenir un document unique qui évalue, qui identifie et qui répond à la problématique du risque identifié : comment je réponds au risque que je vois. En l'occurence quand il y a trop de salariés dans les locaux et qu'ils sont susceptibles d'avoir des contacts, la réponse c'est le télétravail. L'employeur est censé se poser la question.
Il y a d'abord ce document unique, puis un ensemble de règles et notamment la mise en danger d'autrui. L'employeur ne peut pas mettre en danger ses salariés de manière délibérée. Et ce qui est intéressant dans l'instruction et dans les différentes communications du gouvernement, c'est qu'on alerte les employeurs en disant : "vous êtes prévenus, il y a une montée de l'épidémie et donc vous devez réagir en conséquence".
Comment agissent concrètement les inspecteurs du travail ?
Ce que l'on commence à voir, c'est que les inspecteurs du travail rappellent d'abord le droit. Ils rappellent l'obligation de sécurité de l'employeur. Il doit mettre en oeuvre les mesures nécessaires pour préserver la santé. La santé, c'est la santé physique avec les risques liés à l'épidémie, mais c'est aussi la santé psychologique. Il n'y en a pas une qui domine l'autre. Donc l'employeur doit mettre en place des mesures adaptées à sa situation. Chaque entreprise doit, dans le cadre du dialogue social, réfléchir et mettre en place des actions, et en particulier le télétravail, pour s'assurer que les mesures sanitaires sont respectées.
Et pour cela on ne peut pas se dire que le protocole sanitaire est la seule règle à respecter. Donc je dis "vigilance"' parce que l'employeur, même s'il recevra sans doute un courrier de l'inspection du travail qui ne "l'alignera pas" forcément tout de suite, parce que les règles ne sont pas nécessairement violées, ça n'est pas si évident que ça, mais il faut être vigilant, parce qu'il y a ce fameux document unique d'évaluation des risques qu'il faut mettre à jour, et ensuite, il faut mettre en place un certain nombre de mesures adaptées à l'entreprise pour se garantir de respecter les règles sanitaires.
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