Le métier de modèle vivant, avec Jessica Bonanni : "Quelqu'un voit quelque chose en vous et le sublime"
Jessica Bonanni enfile un peignoir pendant la pause de ce cours de dessin. Elle vient de poser, nue, près d’une heure face à des étudiants stylistes passionnés de mode. Nous sommes à l'International fashion academy, à Paris, et le métier de modèle vivant pour la peinture, la sculpture ou le dessin, c'est celui de Jessica.
Reposant ses membres, Jessica s'amuse : "Ce qui est marrant, c'est que j'ai 49 ans, je fais 1,61 m, je suis un peu rondelette, donc je ne représente pas du tout le modèle du mannequin. C'est ça le défi." Le défi pour le modèle, c’est aussi de trouver des poses inspirantes. Jessica Bonanni abandonne à nouveau son peignoir, s’installe sur le petit piédestal. Emmanuel Saint le professeur la laisse choisir les postures : "Là, elle a pris une pose debout, coude relevé, l'intérêt de cette pose c'est qu'il y a un très beau déhanché, il y a du mouvement."
"Une forme d'implication et d'énergie"
Les yeux des étudiants concentrés font de brefs allers-retours entre le modèle et leur feuille, il faut aller vite : on change ici de pose toutes les 5 à 10 minutes. "C’est le meilleur exercice qui soit, on apprend à regarder, avec une forme d'implication et d'énergie ce qui se passe" souligne Emmanuel Saint, à propos de l'intéret de travailler avec des modèles vivants.
Jessica Bonnani s’appuie sur son expérience de théâtre afin de donner de la vie aux poses immobiles. Quant aux résultats, elle aime se retrouver saisie sur le papier : "C'est gratifiant, il y a des dessins qui sont beaux, quelqu'un qui a vu quelque chose en vous et l'a sublimé. Après (...) c'est aussi la vulnérabilité, on ne se sent pas des déesses, même si on a tendance à nous faire sentir des déesses."
Des séances longues qui peuvent user
Déesse en tenue d’Ève, Jessica Bonanni a parfois le sentiment d’être "matée" par certains étudiants, mais le principal désagrément c’est l’usure. Les séances peuvent être longues, jusqu'à quatre heures et certaines poses, comme les bras en l'air, sont difficiles : "Dix minutes, je commence à avoir des fourmis dans les bras. Je résiste..."
Après huit années à poser une vingtaine d’heures par semaine, le corps commence à "trinquer", dit-elle : "On a facilement des sciatiques, je commence à avoir de l'arthrose dans mon pied gauche, je pense que ça devrait être un peu inclus dans les fiches de paie tout ça !"
Sa paie s’élève à une vingtaine d’euros nets de l’heure dans le privé, souvent moins dans le public, avec des contrats précaires et qui se raréfient, regrette Jessica Bonanni.
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