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Au Touquet : bridge et UMP

Reportage au Touquet, dans le Pas-de-Calais, où les habitants votent toujours (très) à droite. Les électeurs sont très sensibles au discours sécuritaire, ils ont plébiscité Nicolas Sarkozy en 2007 à 80%.
Article rédigé par Olivier Emond
Radio France
Publié Mis à jour
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Avec un immobilier au prix fort (357.000 euros pour un deux pièces de 43 m² avec vue, affichait mi juillet une agence immobilière) et des impôts locaux élevés, Le Touquet est un lieu "où l'on vit bien" , mais surtout quand "on a du bien" . 40% des six mille habitants à l'année sont à la retraite, 20% n'exercent aucune activité professionnelle.

"Jouer pour se faire une place dans la société"

Bien avant Paris-Plage sur les quais de Seine, Le Touquet jouait ce rôle, à 300 kilomètres de la capitale, pour les riches donc. Le Touquet reste une ville cossue où le golf (3.000 euros l'année pour un couple), le milieu hippique (moins les courses que l'équitation et l'élevage, précisera un lecteur) et le bridge (plus accessible : soixante euros d'adhésion par an puis quatre euros par match), continuent de structurer la vie sociale touquetoise.

Simone, la présidente du club de bridge, s'était mise à jouer à Cambrai, dans les années 1980, "pour se faire une place dans la société" . Une société aux cheveux blanc et gris, expliquent Simone et Jean-Luc, arbitre au club et bridgeur régulier depuis sa préretraite, il y a huit ans :

"La moyenne d'âge est extrêmement élevée, de l'ordre de 75 ans au moins."

L'ancien ingénieur dans la pétrochimie, venu sur les plages du Nord parce qu'un oncle y possédait un appartement, précise :Simone et Jean-Luc sont atypiques dans ce club : en 2007, Le Touquet plébiscitait Nicolas Sarkozy avec près de 80% des voix. Mais elle vote "depuis toujours écolo" au premier tour, blanc au second. Tandis que lui se sent "plus socialiste" , idéal écologiste en prime.

"[Cela] n'empêche pas de se retrouver dans [les codes de la ville] ni d'apprécier grandement la vie qu'on a ici. Même si la ville est plutôt fermée. On vit dans une bulle, au Touquet." 

Simone poursuit :

"Il y a quelque temps, j'ai renvoyé quelqu'un qui apostrophait un autre joueur en lui disant : " Toujours aussi con, toujours socialiste ? " Beaucoup votent Front national, c'est leur problème mais je ne veux pas de commentaires au club."

"Les gens ne vont pas voter contre leurs intérêts, c'est évident."

Au Touquet, vous avez bien des gens qui payent l'ISF.Tous les joueurs confirment que le club, à l'image de la ville, vote massivement à droite. "Ça va de soi" , explique Claude, blonde retraitée habillée de beige, qui ne veut pas dire son âge :

"Ce n'est pas mon cas. J'ai gardé ma maison du Touquet après un divorce.Depuis, j'ai déménagé pour la ville voisine de Stella, où les impôts
sont moins chers."

À la dernière présidentielle, Jean-Marie Le Pen n'avait pas dépassé 8% au premier tour – à peine un point de moins que Ségolène Royal. Quatre ans plus tard, de nombreux joueurs du club m'ont parlé d'une tendance à la hausse dans les rangs frontistes. L'extrême-droite y est nationaliste, ce serait "celle de Drieu La Rochelle ou Hénin-Beaumont" , précise Jean-Luc.

Madeleine est une personalité emblématique de la ville, où son époux, qui a des responsabilités, confirme :

"J'ai des amies qui parlent de changer de vote. Je leur dis qu'elle font une erreur. Vous m'avez comprise. Au Touquet, dans les dîners, on parle facilement politique. On sait très bien ce que les gens pensent ou votent. Bien sûr que ça se dit. Les femmes en parlent aussi – ça date de l'émancipation de la femme, il y a une quinzaine d'années."

Madeleine, après avoir refusé d'être interviewée, acceptera d'en dire plus quelques jours plus tard par téléphone. Epouse d'un ancien entrepreneur, elle est aussi investie dans les courses hippiques, qui lui donnaient l'occasion de grands dîners de plus de quarante personnes. Une époque révolue.

"Les dîners à quarante, c'est terminé"

Outre la famille, la valeur travail est un des critères de vote chez elle. Les 35 heures de Martine Aubry sont "une hérésie" pour elle. Mais la suppression du service militaire par Jacques Chirac ne trouve pas davantage grâce à ses yeux :

"C'était une erreur de la droite. S'il y a tant de jeunes qui traînent, il faudrait sans doute leur rétablir l'armée. Ça forme. Ça en fait des hommes."

Il trouve que la France est devenu un pays d'assistés :Roland, qui joue au bridge dans le même club et vit aussi à Stella, la ville voisine moins chère, ne dit pas autre chose du respect. Ancien instituteur, il touche aujourd'hui 2.000 euros de retraite.

"Tout le monde se plaint dans ce pays. Même les retraités. Vous connaissez une catégorie socioprofessionnelle qui ne se plaint pas ? Et c'est toujours à l'autre de faire le boulot, jamais à soi de faire le boulot. En France, on aime bien dire : l'Etat doit faire ceci, l'Etat doit faire cela... Aide-toi, le ciel t'aidera !"

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