Australie : après le suicide d'un adolescent dans une prison, des avocats alertent sur les conditions de détention

C'est le deuxième suicide en moins d'un an dans cette prison pour mineurs. Celle-ci est visée par une action de groupe qui dénonce les mauvais traitements que subissent les adolescents, en particulier les aborigènes.
Article rédigé par franceinfo - Grégory Plesse
Radio France
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Temps de lecture : 3 min
En Australie, les aborigènes représentent plus de 60% des mineurs en détention. Photo d'illustration. (EMMA BUONCRISTIANI / MAXPPP)

Fin août 2024, un garçon de 17 ans s’est donné la mort dans un centre de détention pour mineurs situé à Perth, en Australie. Ce centre de détention à une sinistre réputation, plusieurs rapports ont dénoncé le traitement infligé aux enfants qui y sont enfermés, dans l’immense majorité, des aborigènes. Cette prison est ciblée par une action de groupe portée par un cabinet d’avocats de Sydney qui a pris contact avec plus d’un millier de jeunes qui se sont retrouvés derrière les murs de cette prison, où les conditions de détention sont absolument effroyables. Le suicide qui a récemment été rendu public est d’ailleurs le deuxième en moins d’un an.

Si les jeunes qui y sont enfermés arrivent à de telles extrémités, d’après Dana Levitt, l’avocate qui mène cette action de groupe, c'est parce qu’ils y sont traités aussi sévèrement, voire plus sévèrement même, que les adultes. "Imaginez être enfermé seul, dans une cellule pas plus grande que des toilettes, 22 heures par jour, jour après jour, en tant qu’enfant… Ajoutez à cela le manque d’accès à leur famille, à des dispositifs de soutien extérieurs, comme des services psychologiques", détaille l'avocate.

Les aborigènes surreprésentés dans les prisons pour mineurs

Les témoignages et les preuves qu’elle a recueillis font également état d’usage excessif de la force, certains ont eu les épaules démises, d’autres ont été aspergés de gaz lacrymogène. Ces conditions sont infligées d’abord, et avant tout, à de jeunes aborigènes. Ils représentent plus de 60% des mineurs en détention en Australie, alors qu’au sein de la population générale, moins de 6% des moins de 18 ans sont aborigènes.

Amnesty International a consacré en 2018 un rapport cinglant sur les conditions de détention des mineurs. Les autorités semblent conscientes qu’il n’y a pas de quoi être fier. L’an dernier, elles ont refusé d’ouvrir les portes de cette prison au rapporteur spécial des Nations unies sur la torture.

Le suicide, première cause de mortalité pour les jeunes aborigènes

Cette affaire illustre également une autre tragédie qui affecte les aborigènes, et les plus jeunes d’entre eux en particulier : le suicide. Les chiffres sont effrayants. Plus d’un aborigène de moins de 25 ans sur cinq meurt des suites d’un suicide, c’est même la première cause de mortalité pour cette tranche d’âge. Le taux de suicide des jeunes aborigènes est par ailleurs trois fois plus élevé que pour le reste de la population.

Tous, évidemment, ne se donnent pas la mort en prison. Il y a une multitude de facteurs qui l’expliquent : pauvreté, problèmes d’accès au logement, à l’emploi, à des services de santé corrects. En résumé, leur vie est infiniment plus difficile que pour les autres Australiens, et cette incapacité à envisager un avenir meilleur, malheureusement en pousse beaucoup trop à commettre l’irréparable. Le phénomène s’accentue, puisqu’en 2022, 212 aborigènes se sont donné la mort, c’est deux fois plus qu’il y a 15 ans et à ce stade, rien, ou presque, n’est fait par le gouvernement pour enrayer ce problème.

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