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Comment polluer moins tout en préservant les emplois?

Alors que l'Allemagne a décidé cette semaine de fermer ses centrales thermiques au charbon les plus polluantes, mais en renonçant à taxer les autres, le Parlement européen planche sur des règles communes qui permettront aux 28 d'être exemplaires en matière d'émissions de CO2 tout en maintenant une industrie forte en Europe.
Article rédigé par Anja Vogel
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
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Ne pas laisser la désindustrialisation gagner du terrain. Pour Edouard Martin, c'est devenu un impératif politique et écologique. L'ancien syndicaliste CFDT, emblématique d'Arcelor Mittal, et favorable à une sortie du nucléaire, poursuit depuis un an son combat au Parlement européen, où il a pris immédiatement la main, en siégeant tout naturellement à la commission de l'industrie, de la recherche et de l'énergie, et surtout en décrochant un rapport lourd: "Développer une industrie européenne durable des métaux communs".

L'eurodéputé socialiste s'est mis d'emblée à silloner l'Europe pour constater à quel point les 28 "mix énergétiques", qui relèvent des compétences nationales, sont dysharmonieux et ont abouti à mettre les pays européens en concurrence. D'autant plus que les plus coûteux et les plus polluants sont souvent compensés par des subventions publiques qui à leur tour instaurent une inéquité au sein même de l'Union.

L'Allemagne investit massivement 

Si l'Espagne a fait le choix du renouvelable et du photovoltaïque, elle est tellement empêtrée dans les difficultés financières qu'elle n'a pu y investir que 5 millions d'euros ces trois dernières années, alors que dans le même temps l'Allemagne a consacré 756 millions d'euros pour compenser le surcoût de ses centrales thermiques au charbon, qui lui ont permis de sortir du nucléaire. Or l'Allemagne a décidé cette semaine de fermer les plus polluantes, mais de renoncer à sa "contribution climat" qui devait permettre de taxer les plus polluantes, et ce sous la pression des industriels, des organisations syndicales et des responsables politiques des bassins miniers, au nom de la préservation de l'emploi.

Mais au détriment probablement des consommateurs qui verront leurs factures grimper... Et bien sûr de l'avenir de la planète.

"D'où la nécessité d'avoir un regard européen et de prendre des mesures communes, explique Edouard Martin. Ce n'est pas compliqué, il suffit d'en avoir la volonté politique". Il propose notamment un ajustement de la taxe carbone aux frontières extérieures de l'Union. Ce qui éviterait que les industriels ne délocalisent leur production en Chine, au Brésil, aux Etats-Unis ou dans les pays où les ressources énergétiques sont plus accessibles et la main d'oeuvre plus facilement exploitable.

"Droits à polluer gratuitement"

Risque d'autant plus grand que l'Europe va progressivement faire disparaître les "droits à polluer gratuitement", afin de stimuler l'un de ses principaux outils de régulation, le marché carbone (ETS), qui en 10 ans d'existence n'a toujours pas prouvé son efficacité, notamment en raison de ces dérogations. Il souhaite aussi une meilleure définition des contrats d'électricité, souvent conclus aux enchères et pour une période annuelle: des contrats de 10 ou15 ans permettraient d'avoir une meilleure visibilité et surtout une plus grande indépendance.

Malgré l'ampleur du défi, Edouard Martin est confiant dans ce qu'il qualifie de "cercle vertueux": les chefs d'entreprises, les organisations syndicales, les élus locaux, les ONG ont accueilli favorablement ses propositions. L'Europe doit donner l'exemple avant la conférence de Paris COP 21 sur le climat en décembre, montrer au monde qu'elle respectera ses engagements, expliquet-il.  Reste à savoir si les "postures idéologiques" et le conformisme ultra-libéral ne prendront pas le dessus d'ici le vote de son rapport, en commission parlementaire à la rentrée, puis fin octobre par l'ensemble des eurodéputés.

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