Drame des réfugiés: l'assistance est un devoir
Deux millions de Syriens qui ont fui : un nombre qui ne fera qu'empirer en cas d'intervention
internationale. Et un devoir d'assistance qui n'est pas toujours
respecté, comme en témoigne le drame du "bateau cercueil" pendant
l'intervention en Libye, pour lequel les responsabilités n'ont toujours
pas été établies.
Irak, Libye, Tunisie, Egypte, Syrie. Le foisonnement des conflits a souvent
poussé l'Europe à s'indigner et à exiger plus de justice et de respect du droit
des peuples, à cautionner les interventions militaires pour renverser les
dictateurs. Alors que le ballet diplomatique se poursuit et que les
navires militaires se déploient en vue d'une éventuelle intervention punitive
contre la Syrie, les ministres européens des Affaires étrangères appellent à
une "réponse claire et forte" aux attaques chimiques du 21 août.
Mais les 28 sont-ils assez sensibilisés à la détresse des hommes qui fuient les
zones de conflit, au risque de leur vie et de celle de leurs proches. Jusqu'où
doit aller notre devoir d'ingérence et d'assistance?
63 morts dans un "bateau cercueil": l'armée responsable?
Il suffit de se reporter deux ans en arrière, en Libye, où l'intervention
occidentale a suscité des cohortes de déplacés, de candidats à l'exil, de
naufragés, de "vies perdues en mer"... L'exemple tragique du
"bateau cercueil", dans lequel 63 migrants sont morts alors qu'ils
auraient pu être secourus notamment par l'armée, comme en témoigne l'un des
rescapés d'origine éthiopienne Abu Kurke, doit inciter l'Europe à respecter son
obligation de porter assistance.
Le Conseil de l'Europe vient de confier un nouveau mandat de deux ans à la
parlementaire néerlandaise Tineke Strik, afin d'établir les responsabilités et
surtout éviter que de tels drames ne se reproduisent. L'élue verte veut amender
les conventions internationales pour les clarifier, que l'obligation de porter
assistance soit toujours prioritaire, et que les pêcheurs qui se portent au
secours des naufragés ne risquent plus de se faire poursuivre pour trafic de
migrants étrangers.
Première plainte classée sans suite
En France, malgré les dénégations des autorités militaires et un premier
classement sans suite, une nouvelle plainte vient d'être déposée contre la
marine pour non-assistance à personne en danger, cette fois auprès du doyen des
juges d'instruction, chargé des affaires militaires, plainte portée notamment
par le GISTI et la FIDH et dans laquelle Abu Kurke s'est porté partie civile.
Abu Kurke, 25 ans, vit désormais aux Pays où il obtenu le statut de réfugié, où
il s'est marié et vient d'avoir un bébé, un garçon de 5 mois. Fuyant
l'Ethiopie, la misère et les conflits, il avait rencontré sa future épouse au
Soudan, avec elle il avait rejoint la Libye; heureusement elle n'était pas à
bord du "bateau cercueil", souligne-t-il. Un drame qui continue de
hanter ses nuits.
Encore plus de réfugiés en cas d'intervention punitive
Aujourd'hui la guerre déchire la Syrie. L'Italie, dont les garde-côtes et la
marine secourent quotidiennement des centaines de rescapés sur des embarcations
d'infortune, reproche à l'Union européenne de n'avoir toujours pas adopté une
approche adéquate pour répondre au défi que pose cette arrivée de massive de
réfugiés sur son territoire. Et s'attend à une aggravation en cas
d'intervention punitive en Syrie.
L'Allemagne, qui a accepté en mars d'accueillir 5.000 réfugiés syriens demande
l'organisation d'une conférence européenne pour trouver une réponse au
problème et met en garde contre son aggravation en cas d'intensification de la
guerre.
La France milite pour l'intervention punitive, mais n'accueille qu'une infime
partie des réfugiés syriens. Ils sont principalement installés au Liban, en
Jordanie, en Turquie et en Irak.
L'Europe rechigne à accueillir, mais met la main au portefeuille
L'Union européenne est toutefois le premier contributeur financier aux
programmes d'aide humanitaire dans cette guerre (soutien médical, aide
alimentaire, eau, abris...). Elle a mobilisé 515 millions d'euros pour venir en
aide aux victimes en Syrie et les pays voisins depuis la fin 2011. 328 millions
d'euros ont été aussi consacrés au soutien à l'éducation ou au secteur social,
ce qui porte les financements communautaires à 843 millions d'euros. A cela
s'ajoute l'aide humanitaire apportée directement par les pays européens, qui
s'élève à 494 millions d'euros. L'aide totale des 28 pays de l'UE dépasse ainsi
1,3 milliard d'euros.
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