"Oui à l'Europe qui protège nos vies privées!"
La décision de la Cour de justice de l'Union européenne ne pouvait mieux
tomber. Même si elle remet en cause une harmonisation qui avait été difficile à
obtenir, elle renforce le Parlement européen dans sa volonté de protéger les
données personnelles des citoyens, et de leur permettre de mieux contrôler
l'utilisation qui en est faite. Idem pour les entreprises. Les juges de Luxembourg
ont en effet déclaré "invalide "
la directive de 2006, mise en place après le choc des attaques terroristes
commises à Madrid en 2004 et à Londres en 2005, qui impose la conservation des
données téléphoniques et autres courriels pendant au moins 6 mois. La Cour la
juge certes nécessaire, mais disproportionnée et trop intrusive, car "elle comporte une ingérence d'une vaste
ampleur et d'une gravité particulière dans les droits fondamentaux au respect
de la vie privée et à la protection des données à caractère personnel ".
Limiter au strict nécessaire l'ingérence dans la vie privée
L'arrêt de la Cour pointe trois problèmes : la durée "disproportionnée " de la
conservation des données, le manque de protection contre les risques d'abus et
l'absence de mesures pour "limiter
au strict nécessaire " l'ingérence dans la vie privée. "Oui à l'Europe qui protège nos vies
privées ! ", se félicite Catherine Trautmann, présidente de la
délégation socialiste française au Parlement européen, membre de la délégation
pour les relations avec les Etats-Unis. Cette annulation constitue en effet un
encouragement pour les eurodéputés, engagés dans un bras de fer avec la
Commission et les Etats membres pour protéger les données personnelles jusque
dans les négociations de libre-échange avec les Américains
Droit à l'effacement des données
Ils viennent ainsi d'adopter trois nouveaux rapports, qui renforcent
notamment les dispositions concernant les transferts de données aux pays tiers
et incluent le droit à l'effacement des données, ainsi que de nouvelles limites
au "profilage ". Le rapport
du socialiste britannique Claude Moraes sur le scandale des écoutes de la NSA
en Europe propose même de suspendre des accords-clefs avec les
Etats-Unis : l'accord Safe Harbour, qui permet aux entreprises américaines
de transférer sur le sol américain des données personnelles des citoyens
européens, et l'accord Swift, qui donne aux autorités américaines l'accès aux
données bancaires européennes dans le but de lutter contre le terrorisme.
"La lutte contre le terrorisme ne
peut en aucun cas justifier l'existence de programmes de surveillance de masse
non ciblés, secrets, voire parfois illégaux ", affirme le texte,
approuvé par 544 voix contre 78 et 60 abstentions.
Pour un "juste échange" avec les Américains
Par ailleurs le Parlement européen menace de rejeter l'accord de
libre-échange en cours de négociation entre l'Union européenne et les
Etats-Unis. "Pour les citoyens
européens, l'affaire des écoutes révélées par Snowden a été un choc négatif par
rapport aux Etats-Unis, souligne Catherine Trautmann, pour qui il s'agit
désormais d'abord de rétablir la
confiance ". Le Parlement européen demande des garanties en termes de
sécurité, de transparence et de respect des normes européennes, y compris en
matière d'exception culturelle. Mais, insiste Catherine Trautmann, également en
terme de réciprocité. Elle plaide pour un "juste échange ", au moment où se pose la question de la
non-contribution fiscale des entreprises qui peuvent bénéficier de ces données,
comme Google ou Facebook : "leur
faire payer les impôts là où elles se trouvent, permet aussi de lutter contre
l'évasion fiscale" , précise l'eurodéputée.
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