"Là où meurent les rêves" : un artiste rend hommage aux migrants morts dans le désert entre les Etats-Unis et le Mexique
En 2022, un nombre record de migrants a tenté de franchir la frontière entre le Mexique et les Etats-Unis. Ils étaient plus de deux millions et demi. Parmi eux, 853 ont perdu la vie lors de cette traversée, c'est le double des années précédentes. Dans l’Arizona, à Tucson, Álvaro Enciso, artiste colombien, a lancé un projet original pour honorer leur mémoire.
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Son projet a été baptisé : "Là où meurent les rêves". Il s’agit de placer des croix peintes aux couleurs vives à l’emplacement où des corps de migrants ont été retrouvés. Enciso explique que lorsqu’il a commencé, il y a dix ans, il était frappé par le fait que ces morts de migrants étaient considérées comme insignifiantes. Il y a une dimension géographique dans cette indifférence : ce sont des morts cachées par le désert, là où personne ne s’aventure, sauf les migrants.
"Le désert garde un secret : il y a des gens qui y meurent. Alors, j’ai voulu marquer les endroits où le rêve de ces personnes s’est achevé, là où leur rêve américain a échoué", explique l'artiste. Álvaro Enciso attribue ces morts aux politiques de plus en plus sévères des autorités qui, selon lui, acculent les migrants à passer par le désert, là où elles savent qu’ils vont mourir.
Plus d'un millier de croix installées en dix ans
Pour placer ces croix, Enciso se base sur la carte élaborée par une ONG, Humane Borders, et par les légistes du comté de Pima, à Tucson. Cette carte montre, à travers toute la région, l’emplacement exact où des corps ont été retrouvés. En dix ans, il a déjà placé plus de 1 000 croix. Pourtant, ce sont 3 700 cadavres ont été découverts dans le désert de Sonora. La tâche est donc encore immense. Pendant la semaine, l’artiste peint des croix toutes simples qui, selon lui, n’ont pas forcément une dimension religieuse, mais qui font figure de symbole. Le week-end, il part les installer dans le désert.
Concernant la traversée, les migrants doivent marcher pendant plusieurs jours s’ils veulent échapper à la patrouille frontalière. Les températures sont extrêmes. En été, il peut faire plus de 40 degrés et en hiver, les nuits sont glaciales. Les personnes meurent de déshydratation ou d’épuisement. Álvaro Enciso a imaginé ce projet pour que ces morts ne tombent pas dans l’oubli, pour honorer le courage de ces personnes qui ont laissé toute leur vie derrière elles.
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