En route vers Paris 2024. Le rôle ingrat du partenaire d'entraînement ou "sparring partner"

En route vers 2024 s’intéresse non pas aux judokas présents sur les tatamis, mais à leurs partenaires d’entraînements, à ces athlètes de l'ombre,  indispensables à la performance de nombreux sportifs dans les sports de combats.

Samedi 9 et dimanche 10 février, le Paris grand slam, le plus grand tournoi international de judo

Si on veut être branché, on les appelle en version anglaise les sparring partners. En version plus méchante, même vulgaire, certains les surnomment la viande, le bétail, le punching ball ou les sacs à touche, en escrime.  

Le rôle de partenaire d’entraînement est ingrat. Il faut trouver quelqu'un capable de prendre des coups sans sourciller, de gérer les périodes de stress ou de doute du titulaire et de donner le meilleur de soi à chaque instant, en sachant que les médailles, le succès, ce ne sera pas pour lui. 

Comment cela se gère mentalement d'être un partenaire ? 

Suivant le sport, ce n'est pas forcément la même histoire. En boxe ou en tennis, c'est l'occasion d'arrondir les fins de mois. Le film de Samuel Jouy, Sparring, illustre la dure vie d'un boxeur partenaire interprété par Mathieu Kassovitz. Une scène dans le film résume toute la brutalité de ce rôle : le boxeur encaisse les coups et un proche lui glisse à l'oreille : "Fais-moi voir celui que tu aurais pu être si quelqu'un avait cru en toi".

Il y a une frustration évidente à gérer chez le sparring. Mais une chose est sûre les plus grands champions ne seraient rien sans leur partenaire d’entraînement comme l'explique le judoka Frédéric Lecanu, champion de France en 2005 des + de 100kg :

"Le partenaire donne les dernières sensations au titulaire avant de monter sur le tapis. Il faut être à son service, il faut savoir écouter le champion, écouter son judo, augmenter les bonnes ondes pour le mettre en confiance et dans les meilleures dispositions."

Une carrière entre Douillet et Riner

Ce poids lourd du du judo, aujourd'hui cadre technique au sein de la fédération française de judo, connaît très bien ce rôle car il a évolué entre deux champions de sa discipline.

"J'étais très jeune lorsque j'ai participé à la fin de carrière de David Douillet. Lors des Jeux de Sidney en 1996 ou aux championnats du monde à Paris Bercy en 1997 (Frédéric a alors 18 ans, il assistera aux deux victoires de son aîné), j'étais totalement à son service pour lui donner le plus de sensations possibles. Pour ma fin de carrière, j'ai eu l'occasion d'être le partenaire de Teddy Riner qui est de 10 ans mon cadet.

La situation était complètement différente. Mon rôle a été de lui montrer la dureté et à quoi ressemblait le niveau international. Notre relation est encore très forte aujourd'hui car on ne s'est jamais menti dans notre opposition. Cela a parfois été violent mais je suis fier d'avoir montré d'une certaine façon la voie à ce champion d'exception."

  L’espoir de devenir le champion  

Évidemment, tout est possible en sport, rien n'est figé. L'adage de la fédération française de judo l'illustre très bien : "Entraide et prospérité mutuelle". Autrement dit, le sportif a les cartes en main pour rendre cette période de partenariat temporaire.  

Si la relation entre les deux athlètes se fait en bonne intelligence avec une vraie culture d’échange, le partenaire pourra se nourrir de chacune de ses expériences pour gagner en maturité. Lors des échauffements, c’est l’occasion parfaite de puiser de nouvelles techniques. Lors des grands événements, le partenaire est dans les coulisses et peut s’inspirer d’une telle ambiance pour être prêt le jour où son heure arrivera.