Français du monde. Covid-19, un alibi pour Victor Orbán en Hongrie ?
Le chef du gouvernement hongrois a choisi de fermer son pays à double-tour, officiellement face à la propagation du nouveau coronavirus. Mais beaucoup l'accusent d'en profiter pour s'isoler politiquement. La réalité économique finira pourtant par s'imposer à lui, prédit cette Française installée de longue date à Budapest.
On ne passe plus ! Depuis le 1er septembre, la Hongrie a fermé ses frontières à tous les étrangers. Les Hongrois de retour d'un autre pays devront eux se soumettre à 14 jours d'isolement et fournir deux tests Covid négatifs pour rentrer chez eux.
Mais il y a des exceptions, en particulier pour les voyageurs d'affaires, témoigne Jeanne Dubard. La Française vit à Budapest depuis les années 90. "La Hongrie ne souhaite pas s'arrêter complètement, elle a besoin que l'économie continue et fonctionne du mieux possible et que les gens puissent travailler."
La communauté internationale accuse le Premier ministre Victor Orbán d'utiliser la pandémie comme un alibi pour un peu plus isoler politiquement son pays.
La justice européenne vient de condamner la Hongrie
Une condamnation pour avoir banni l'Université d'Europe centrale (CEU), contrainte de quitter Budapest l'an dernier pour l'Autriche. Jeanne Dubard relativise :
"Tout le monde profite politiquement du Covid pour beaucoup de choses. De nombreux pays commencent à fermer et imposent une quarantaine. Orbán, je ne sais pas quel est son jeu, mais il n'a pas intérêt à s'enfermer, plutôt à faire attention car tout le monde l'observe et est sur ses gardes."
Née à Dijon, diplômée en droit, Jeanne Dubard a commencé sa carrière dans un grand cabinet d'avocats à Chicago, aux États-Unis, avant d'être embauchée à Budapest par une compagnie d'audit américaine.
Grands investisseurs
Aujourd'hui retraitée, élue conseillère des Français de l'étranger, elle constate qu'ici aussi, beaucoup de professions sont exsangues :
La Hongrie refuse les touristes, on n'en n'a plus à Budapest, tous les restaurants sont un peu vides. Beaucoup de gens qui vivaient de ce secteur ne vont pas reprendre. C'est vraiment un pan de l'économie qui a extrêmement souffert.
Jeanne Dubard
"Dans le sanitaire ou l'informatique en revanche, ça a mieux résisté. Dans le marketing, les gens se sont arrêtés, il n'y a pas eu de dépenses, pas d'investissements" , ajoute la Française.
D'autant qu'en Hongrie, la pandémie est loin d'être terminée : "Le virus circule un peu partout dans le pays, alors qu'avant c'était plutôt uniquement dans Budapest. Le port du masque est strict dans les bars, les restaurants et les transports en commun car les amendes sont élevées. Il n'y avait pas de restriction mais ça commence."
Les entreprises étrangères installées en Hongrie ont bénéficié, mais seulement jusqu'en septembre, de quelques aides du gouvernement : chômage partiel ou moratoire sur les remboursements de crédits et les charges. Les sociétés françaises ont fait le gros dos mais peu d'entre elles ont quitté le pays jusqu'à présent.
La reprise va être très lente. Il y a beaucoup de grands investisseurs en Hongrie. Ceux-là vont faire en sorte que ça reprenne et les entrepreneurs plus petits dont les clients sont des multinationales vont reprendre tout doucement.
Jeanne Dubard
On évalue à 3 500 à 4 000 le nombre de Français présents en Hongrie, avec de grands groupes dans l'environnement, la banque, l'agroalimentaire, la distribution ou une filiale de Vinci qui construit une partie du métro de Budapest.
Lui écrire : jeanne.dubard@gmail.com
Aller plus loin
Retrouvez ce portrait sur le site, l'appli et dans le magazine de la mobilité internationale Français à l'étranger
La Chambre de commerce et d'industrie France - Hongrie
L'UFE Hongrie (Union des Français de l'étranger)
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