Augmenter les frais universitaires des étudiants français? Edouard Philippe dit non.
Depuis ce matin, on se demandait si le gouvernement n’allait pas suivre une recommandation de la Cour des Comptes en augmentant significativement les frais des étudiants européens et surtout français. Edouard Philippe a clôt ce véritable serpent de mer.
Finalement, Edouard Philippe s’inscrit dans la continuité de ses prédécesseurs qui tous ont enterré ce véritable serpent de mer qu’est la fin de la gratuité relative de l’université…
Un serpent de mer récent
Récent en tout cas à l’échelle de l’histoire pluriséculaire de l’Université française… Pour s’en tenir à l’époque républicaine, longtemps en effet, bien que réservée à une élite sociale, la gratuité de l’enseignement supérieur public a été un principe républicain qui n’était pas discuté.
J’ai retrouvé la trace d’un premier débat au milieu des années 1980, sous l’impulsion du président démissionnaire de l’université de Paris-Dauphine, Henri Tezenas du Montcel qui publie en 1984, un brûlot sur l’université, intitulé : « Université. Peut mieux faire ». Il est l’invité de Bernard Pivot dans l’emission Apostrophe. Et parmi ses arguments pour sauver l’université, la rendre vraiment payante. Son principal argument est solide…
Le pourcentage de la population étudiante issue de milieux modestes est actuellement plus faible que la contribution fiscale de ces mêmes milieux modestes. Par conséquent, la gratuité est un cadeau des pauvres aux riches
Un ministre se prononce pour l'augmentation des frais universitaires
Cet argument et au-delà la question de l’université payante est entendu et par la personne juste en face d’Henri Tezenas du Montcel sur la plateau d’Apostrophes. Et ce n’est pas n’importe qui, puisqu’il s’agit du ministre de l’éducation nationale, Jean-Pierre Chevènement. Et sa réponse a de quoi surprendre…
Moi je suis d'accord. Ce n'est jouable que si massivement on étend l'exemption des profits des jeunes d'origine populaire. Mais ce serait plus normal
Jean-Pierre ChevènementApostrophes, 1985
Mais pourtant, rien ne se passera…
Et pas seulement en raison du caractère politiquement sensible de la chose. Et qui d’ailleurs explique certainement la décision d’Edouard Philippe qui n’a aucune envie, dans un contexte politique tendu, d’ouvrir un nouveau front social, qui plus est avec les étudiants.
Mais il y a plus que la politique et la peur de l’agitation étudiante, et cela explique aussi pourquoi les nombreuses propositions de rendre l’université payante ont été enterrés, à l’image de celle contenues dans le rapport de 2004 de Michel Camdessus, « Vers une économie de la connaissance ».
La raison est constitutionnelle. L'alinéa 13 du préambule de la Constitution indique que :
la Nation garantit l'égal accès de l'enfant et de l'adulte à l'instruction, à la formation professionnelle et à la culture. L'organisation de l'enseignement public gratuit et laïc à tous les degrés est un devoir de l’État
Article 13 du préambule de la Constitution
Augmenter les frais d’inscription des étudiants français sera aussi un débat constitutionnel ! Et cela sera au moins aussi sensible qu’un débat politique ou qu’un mouvement social étudiant.
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