Haro sur les parachutes dorés !
Quand il quittera Airbus, le 10 avril prochain, Thomas Enders devrait toucher un parachute doré de 36.8 millions d'euros, de quoi mettre de l'huile sur le feu en ces temps de colère sociale...
Et voilà un nouveau scandale de parachute doré, même si lui, Thomas Enders, il quitte une entreprise qui va bien avec un bénéfice net de 3 milliards d’euros en 2018 ce qui n’est pas du tout le cas d’un autre parachute doré dans l’actualité, celui de Thierry Pilenko, 14 millions d’euros alors que l’entreprise qu’il dirigeait TechnipFMC, qui opère dans le pétrole, perd des sous…
Jean-Marie Messier refuse le parachute doré...qu'il réclamera deux ans plus tard
Reste qu’au-delà ces sommes choquent, et elles choquent depuis longtemps. Au point que beaucoup se sont prononcés contre, et pas nécessairement des syndicalistes de la CGT ou des altermondialistes.
C'est le cas Jean-Marie Messier, président d’Universal-Vivendi, au sommet de sa gloire en décembre 2000, invité de Thierry Ardisson:
Moi je veux pas avoir de parachute doré. Je gagne très bien ma vie, je l'assume. Mais l'idée de toucher un pactole encore si je dois partir, trouve cela insupportable
Jean-Marie Messier, le 16 décembre 2000
Mais deux ans plus tard, au moment de quitter la tête de l’entreprise il fera tout pour obtenir un parachute doré de 20.5 millions d’euros, qui lui sera refusé par le conseil d’administration.
La décennie des parachutes dorés s'achève sur la crise financière
Les années 2000, sont celles de la folie des parachutes dorés, Philippe Jaffré d’Elf et ses 19 millions en 2003, deux ans plus tard Daniel Bernard quitte Carrefour avec 29 millions puis Antoine Zacharias Vinci avec 13 millions en 2007…
Mais si ces sommes scandalisent à chaque fois, elles deviennent inacceptables dans le contexte de la crise économique de 2008. Et après Messier en 2000, une autre voix, pourtant libérale s’elève contre les parachutes dorés…On est en septembre 2008, Nicolas Sarkozy est à la tribune des Nations Unies.
Le parachute doré, c'est quoi? C'est un système, si on réussit on a un bonus, si on échoue on a un bonus aussi. C'est pas compatible avec l'économie de marché
Nicolas Sarkozy, le 23 septembre 2008
A ce moment-là le patron de Dexia renonce à son parachute doré, c’est la grande époque de la « moralisation du capitalisme » . Et le message est bien entendu de la part du MEDEF qui, par la voix de sa présidente Laurence Parisot, quelques jours après Nicolas Sarkozy se prononce à son tour contre ces fameux parachutes dorés:
"Nous n'acceptions pas que des dirigeants en situation d'échec puissent recevoir des indémnités de départ"
L’enjeu pour le MEDEF c’était d’éviter absolument une loi sur les parachutes dorés et d’imposer un simple code de bonne conduite plafonnant notamment les parachutes à deux ans de salaire, ce qui va d’ailleurs s’imposer pour les entreprises françaises du CAC40.
L'éternel retour des parachutes que l'on croyait repliés
Grâce à ce code de bonne conduite, depuis une dizaine d’années, les parapluies n’atteignent plus des sommes folles, même si deux ans de salaires pour les grands patrons, ce sont tout de même des millions d’euros.
Les entreprises françaises du CAC40 tiennent globalement leurs engagements, à l’exception d’Alcatel-Lucent qui octroie début septembre 2015 près de 14 millions d’euros à son patron là depuis deux ans et déjà sur le départ Michel Comtes. Levée de bouclier politique, notamment de la part du ministre de l’économie, un certain Emmanuel Macron:
Le cas est choquant, un cas de mauvais comportement d'entreprise. Je l'ai fait savoir à ses dirigeants
Emmanuel Macron, le 2 septembre 2015
Résultat, un parachute divisé par deux quelques jours plus tard. Cela prouve comme après 2008 que les décisions politiques quand elles s’appuient sur l’opinion publique peuvent faire changer les choses. Et que ces parachutes dorés sont particulièrement inacceptables en période de crise économique. De l’essence jetée sur de la braise incandescente. C’est le cas des parachutes dorés actuels, ceux de Thierry Pilenko et Thomas Enders sont annoncés en pleine colère sociale et qui ont tout pour devenir des symboles des inégalités.
C’est sûrement la raison pour laquelle le MEDEF et le ministre Bruno Lemaire se sont déclarés à ce point choqués.
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