Le premier festival de Cannes devait être inauguré en 1939
Retour le 8 août 1938. Blazer blanc pour les hommes, robes de soirées pour les femmes, à Venise, s’ouvre la 6ème édition de la Mostra de Venise…
Aux coté du ministre Alfieri et du Comte Volpi de Misurata, la comtesse Edda Ciano et les délégués des dix-huit nations qui participent au festival. Une foule de critiques, d’intellectuels et de femmes élégantes remplissent la magnifique grande salle.
Edda Ciano n’est autre que la fille de Mussolini, symbole d’une mainmise du régime fasciste sur un festival qui n’accueille pas moins les grands noms du cinéma international. Il faut dire que jusqu’à l’édition de 1938, la Mostra avait su ou pu résister aux pressions politiques. Mais le palmarès de 1937 sonne le glas de cette indépendance.
Cette année-là, le jury international remet son grand prix à Jean Renoir pour "La Grande Illusion", une charge contre la guerre, le nationalisme, un film censuré dans l’Allemagne nazie. L’axe Rome-Berlin défini fin 1936 s’abat sur la Mostra.
A l’issue de la Mostra 1938, Hitler fait pression pour que "Les Dieux du Stade" de la cinéaste du régime nazi, Leni Riefenstahl soit primé. Et le film le sera, ex-aequo avec un film italien supervisé par le fils de Mussolini.
Ulcéré comme beaucoup, dans le train de retour en France, Philippe Erlanger, un haut fonctionnaire en charge de l’action artistique, rêve de lancer un festival international de cinéma en France, indépendant, celui-ci. Il a l’oreille du ministre de l’Instruction publique et des Beaux-Arts Jean Zay, qui est prêt à lancer une contre-Mostra, quitte à se fâcher avec Mussolini. Il présente ici le Premier Festival de Cannes, dont il est le président, un festival qui mêle ambitions artistiques et politiques.
Le but est certainement d'encourager l'art cinématographique sous toutes ses formes afin de contribuer à provoquer entre tous les pays producteurs un véritable esprit de collaboration. Et chacun conviendra que nul pays mieux que le nôtre, ne pouvait présider à une telle manifestation dans un esprit d'objectivité artistique et d'impartialité absolu.
A la fin de l'été 1939. Tout est prêt. Les affiches sont là, les hôtels prêts à accueillir les festivaliers et surtout de nombreux pays ont accepté de venir à Cannes. Le Magicien d’Oz, est l’un des grands films de la sélection. Le pari fou est sur le point d’être gagné…Mais, le 29 août, on apprend que le festival qui devait débuter le 1er septembre 1939 est repoussé de 10 jours, "si les circonstances le permettent" . Elles ne le permettront que bien plus tard, sept ans plus tard.
Et si vous voulez aller plus loin, je vous conseille un excellent livre qui vient de sortir:
Olivier Loubes, Cannes 1939. Le Festival qui n'a pas eu lieu , Armand Colin, 2016.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.