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"Ils ont vécu Charlie" (5/6) : Coco dessine
La rencontre a lieu au calme, dans un café. Sur la table, des crayons, des feuilles de papier. L'échange commence. "Dix ans après, vous êtes toujours Charlie ? Oui !" Une réponse comme une évidence, pour Coco et les "survivants", même si être Charlie, "nous, on ne sait pas trop ce que ça veut dire". Elle tente une définition : "C'est rire des religions, rire du fanatisme, rire de l'obscurantisme, de tous les extrémismes en général."
Depuis dix ans, Coco vit et travaille sous protection. "Bien sûr, il faut s'en indigner. Ce n'est pas normal que des journalistes vivent protégés dans un bunker." Mais pas d'autre choix que de "s'adapter". "La seule réponse, c'était refaire le journal. Parce que c'est ce qui nous emmène. C'était un peu notre survie aussi : celle du journal, c'était la nôtre." Pas question de renoncer au droit de dessiner, à la défense d'un monde où on peut rire de tout. "Rien n'a changé sur notre façon de faire, on ne se censure pas. C'est un point crucial et vital du métier de dessinateur de presse."
"Pas meilleure chose à faire que dessiner"
En 2001, Coco a publié Dessiner encore, un récit graphique racontant le long chemin de sa reconstruction. Elle s'y représentait luttant contre des vagues immenses, graphiques, menaçantes. "La mer est calme et elle est toujours imprévisible, confie Coco, tout en retenue. On fait avec ce truc-là, quoi... On fait avec ça. Parfois, c'est encore assez difficile, et on y pense hyper souvent. Voilà."
Les crayons glissent sur le papier. "Il n'y a pas meilleure chose à faire que dessiner", dit-elle, alors elle dessine : elle-même, Macron, Trump, Netanyahou, Jésus ou des mollahs – "On aime bien dessiner les mollahs, ils ont quand même une tronche..." Elle décrit les figures qui viennent d'apparaître sous sa main : "Il y a un personnage qui se marre, et il y a des grands 'Ha, ha, ha, ha !' Et dans un 'Ha !', il y a eux : Cabu, Charb, Wolinski, Elsa [Cayat], Simon [Fieschi, décédé en octobre 2024], Bernard Maris, Tignous, Honoré et Mustapha [Ourrad]..." Et même si "un dessin, ça ne se raconte pas, ça se regarde", Coco met des mots sur ses quelques coups de crayon : "J'essaie de formuler ce que je ressens vraiment. Je ressens que continuer Charlie après le 7 janvier, c'est beaucoup de manque, mais qu'on pense sans arrêt à eux, à leur travail, à ce qu'ils ont porté, à leur talent et à tout ce qu'ils ont transmis. Et ça, c'est toujours là."
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