Jeux vidéo. Cuphead : “Difficulté” n’est pas jouer
Cuphead à jouer sur Xbox One et PC, c’est d’abord un incroyable voyage visuel dans le temps, à l’époque des Betty Boop, Popeye, du Mickey de “Steamboat Willie” et plus largement de l’animation américaine des années 30.
Cuphead : une beauté enfantine qui cache une difficulté artificielle
Débutée en 2010, cette production indépendante poussée par Microsoft a exigé sept années de travail aux frères Moldenhauer et à leur petite équipe canadienne. Cet hommage aux studios Disney et Fleischer reprend d’ailleurs les techniques d’animation d’autrefois. Chaque décor a été dessiné sur papier et seule la coloration a bénéficié d’un processus numérique. De l’artisanat soigné qui reprend au plus près le surréalisme de ces dessins animés d’antan.
Les ennemis fument le cigare et arborent un sourire sinistre quand ils n’ont pas la forme d’une carotte gigantesque avec des pouvoirs psychiques ou celle d’une femme-avion pédalant sur un monocycle. En arrière-plan, on ne compte plus les gags absurdes comme ce poisson qui pêche ou cette pièce qui se méfie des banques. Sans oublier le personnage principal, Cuphead, qui exhibe une tasse en guise de tête. Arnaqués par le diable avec son copain Mugman, ils doivent reconquérir les âmes d’autres débiteurs de Belzébuth pour récupérer la leur. Un travail d’orfèvres au charme désuet rythmé par le jazz de Kristofer Maddigan
Une rudesse impitoyable, un marketing de la difficulté
Mais derrière ses apparences enfantines somptueusement animées, Cuphead cache une rudesse impitoyable. Une difficulté sans préliminaires qui confine vite au masochisme total, l’écran se couvrant quasi intégralement d’un feu d’artifice de couleurs que le frêle héros doit éviter sous peine de recommencer du début les très très longs combats. Car chacun de ces adversaires surnaturels possède une bonne dizaine de stratégies pour détruire aisément la petite tête de tasse.
Si la difficulté est inhérente à tous les jeux, c’est la maîtrise de son accentuation qui définit en partie le plaisir universel d’y jouer. Mais de l’adage vidéoludique “facile à prendre en main, difficile à maîtriser”, les frères Moldenhauer ne retiennent rien ou presque. Ils s'appuient plutôt sur un marketing de la difficulté en vogue depuis le succès de la saga Dark Souls, et surfant sur le fantasme infondé d’un jeu vidéo originellement ardu. Un jeu pensé comme une épreuve, une invitation à se dépasser et non à s’affranchir, à se libérer des carcans du réel par le virtuel. “Difficulté” n’est pas jouer.
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