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Comment le déplacement de Manuel Valls à Berlin est devenu polémique

Depuis quatre jours, les médias n'en finissent plus de publier réactions et révélations à propos du déplacement de Manuel Valls à Berlin, à l'occasion de la finale de la ligue des champions. Comment cette affaire a-t-elle pris une telle ampleur ?
Article rédigé par Olivier Bost
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
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Plusieurs mécanismes ont alimenté cette affaire. Le premier mécanisme est tout bête, c’est la petite omission qui attise la curiosité. A Poitiers, à défaut de grandes effusions entre militants socialistes, tout le monde s’ennuie un peu. Le Congrès était plié d’avance et il n’y avait pas grand-chose à observer. Manuel Valls, le premier des socialistes et chef de la majorité, avait promis de rester les 3 jours complets à Poitiers au plus près des militants. Le problème, c’est que tout le monde apprend qu’en fait il ne sera pas là samedi soir. Ce n’était pas à son agenda officiel, il ira voir la finale de la ligue des champions entre son équipe favorite le FC Barcelone et la Juventus de Turin.

Interrogé par les journalistes, sa première réponse n’est pas très convaincante. Après son discours à la tribune, elle est un peu plus construite : Manuel Valls est invité par Michel Platini à parler Euro 2016. Renseignements pris, c’est au frais du Parti socialiste entre Poitiers et Paris, et aux frais de la République entre Paris et Berlin. Déjà ça tique à droite avec une première réaction de Nadine Morano, la première d’une longue série.

La polémique s’installe vraiment

Quand vous ne cassez pas, net, un début de polémique il y a toutes les raisons pour que vos opposants s’y engouffrent. Ensuite, il y a le phénomène caisse de résonnance. Après un week-end très fade à Poitiers, les invités des nombreuses émissions politiques du dimanche s’en donnent à cœur joie. Il faut ajouter à ce concert de critiques, très bien organisé pour le coup, l’intervention légère de Manuel Valls dans les coulisses de Roland-Garros où il avait voir la finale de tennis. Manuel Valls parle d’un "moment de détente ", encore une erreur grossière de communication. Ce n’est pas comme ça que l’on fait retomber une polémique. C’est ensuite devenu un feuilleton avec une nouvelle révélation : Manuel Valls est revenu de Berlin avec deux de ses fils dans l’avion. Là encore sur la défensive, son entourage à Matignon a confirmé en précisant que ça ne changeait rien au coût de l’affrètement de l’avion. L’opposition n’allait donc pas lâcher comme ça. Elle demande le prix du déplacement, son remboursement, et la démission du Premier ministre.

La revanche de la droite

La droite fait à Manuel Valls ce que la gauche a fait pendant des années à Nicolas Sarkozy, reprocher sans cesse à l’ancien chef de l’état son côté bling-bling, un côté encore épinglé il y a moins de 15 jours pour un aller-retour en jet privé entre Paris et le Havre pour un meeting. C’est cet acharnement, réussi, que la droite fait payer à Manuel Valls. Elle connait par cœur ces ressorts de la vie politique. Les deux hommes, en plus, se ressemblent. Souvenez-vous aussi des reproches faits à François Fillon, le Premier ministre de Nicolas Sarkozy avait fait des allers-retours dans son château de Solème dans la Sarthe.

Dans cette histoire de Manuel Valls à Berlin se trouvent tous les ingrédients pour scandaliser facilement chaque citoyen :

"Ils nous disent de faire des efforts et ils ont une vie de luxe", ou encore "il nous a menti, il se moque de nous !". Ce sont les premières réflexions naturelles de chacun d’entre nous, et elles sont normales. C’est cela qu’exploite l’opposition.

Manuel Valls n’a donc plus qu’à faire un pari, celui souvent gagné, de se dire que ça passera, que la polémique retombera. Ca passe, ça casse très rarement, mais ça laisse toujours des traces. C’est le problème de Manuel Valls.

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