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Elisabeth Borne ne "ferme pas la porte" à la taxation des super-profits des entreprises : le pragmatisme de ne rien exclure

La Première ministre a indiquéqu'elle ne fermait pas la porte à une taxation des super profits, même si cette piste n'a pas sa préférence. Une apparente prise de risque : l'édito signé Renaud Dély.

Article rédigé par franceinfo - Renaud Dély
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Elisbeth Borne le 27 août 2022 à Metz. (JEAN-CHRISTOPHE VERHAEGEN / AFP)

On croyait cette hypothèse d'une taxation des super-profits des grands groupes enterrée par l'exécutif, voilà que la Première ministre Elisabeth Borne a ouvert la porte à cette taxe dimanche 28 août dans une interview au Parisien-Aujourd'hui en France. Il s'agit il d'une vraie prise de risque, d'abord parce que, pour l'heure, Emmanuel Macron et Bruno Le Maire ne veulent pas en entendre parler. L'Elysée et Bercy écartent toute taxe supplémentaire.

Bien sûr, Elisabeth Borne tient la ligne de l'exécutif. Elle préférerait que les entreprises baissent leurs prix, augmentent leurs salariés, usent par exemple de la prime Macron pour rendre du pouvoir d'achat aux Français. Mais elle ne "ferme pas la porte", ce sont ses mots, à une taxe sur les super-profits. Et cette petite musique personnelle, qu'elle avait d'ailleurs déjà laissé fuiter durant la campagne des législatives, pourrait encourager quelques députés marcheurs de l'aile gauche de la majorité à donner eux aussi de la voix en faveur d'une telle taxe.

C'est aussi un encouragement indirect à certaines oppositions. C'est l'autre risque pris par Elisabeth Borne parce que le patron du PS, Olivier Faure, réclame un référendum sur le sujet. Il a décidé d'ailleurs d'enclencher la procédure du référendum d'initiative partagée, c'est à dire qu'il doit recueillir le soutien de 20% des parlementaires et 10% du corps électoral, soit 4,7 millions d'électeurs. 20% du corps électoral, cela fait 185 députés et sénateurs cumulés. D'ailleurs, l'ensemble des gauches en a bien plus.

L'opposition requinquée

En laissant la porte ouverte ou entrouverte, Elisabeth Borne incite presque les oppositions à se mobiliser pour obtenir ce fameux référendum. Jean-Luc Mélenchon, d'ailleurs, ne s'y est pas trompé. Il a réclamé dimanche plus fort encore la taxation de ceux qu'il appelle les "profiteurs de guerre".

Alors pourquoi Elisabeth Borne dit-elle cela? Sans doute parce qu'il serait encore plus dangereux, politiquement, de donner l'impression de rester sourde à une telle revendication. Parce que nombre de nos voisins – le Royaume-Uni, l'Espagne, l'Italie – ont mis en œuvre une telle taxe. Les groupes du CAC40 ont affiché des bénéfices record au premier semestre et versé des dividendes tout aussi record à leurs actionnaires.

Il y a deux façons d'appréhender ce contexte. L'une est purement économique et elle pousse Bercy à s'accrocher à son mantra : aucun nouvel impôt, tout pour les allègements de charges. C'est le credo de la politique de l'offre en vigueur depuis 2007, et même avant d'ailleurs. Et puis, il y a une approche plus politique qui incite à ne rien exclure, à se montrer plus pragmatique, au cas où. Et après tout, on l'a vu avec le fameux "quoi qu'il en coûte" lors de la crise du Covid, le pragmatisme n'est-il pas la définition auto proclamée du macronisme ?

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