Édito
Loi immigration : LR dicte ses conditions en commission mixte paritaire et refuse les compromis

Toujours pas de fumée blanche, ça patine entre le gouvernement et LR. La commission mixte paritaire réunissant députés et sénateurs pour trouver un compromis sur le projet de loi immigration doit reprendre mardi, après s'être engoncée dans une série de désaccords.
Article rédigé par franceinfo, Renaud Dély
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Temps de lecture : 3min
Elisabeth Borne, la Première ministre, le 18 décembre 2023, alors que  la commission mixte paritaire, composée de 7 députés et 7 sénateurs, s'est réunie à l'Assemblée Nationale pour rendre son avis sur le projet de loi sur l'immigration. (OLIVIER CORSAN / MAXPPP)

Après l'échec du débat à l'Assemblée, la commission mixte paritaire doit trouver un accord sur un texte relatif à l'immigration. Interrompue lundi 18 décembre après une très longue soirée de blocages en tout genre, elle ne reprendra ses travaux qu'à 10h30 mardi.

Au cœur du désaccord, la durée de résidence nécessaire pour verser aux étrangers certaines prestations sociales, en particulier les APL, les aides au logement. Les deux camps s'accusent mutuellement de ne pas respecter le deal négocié en amont. La droite prend plaisir à faire durer le supplice pour l'exécutif. Parce que, quelle que soit l'issue des discussions, on est déjà loin du texte initial du gouvernement qui prétendait à l'équilibre.

Déjà loin du texte initial "équilibré" du gouvernement

La fameuse formule de Gérald Darmanin disait vouloir être "méchant avec les méchants", les délinquants étrangers, mais "gentils avec les gentils", en facilitant l'intégration des travailleurs immigrés. Mardi matin, le texte est bien méchant avec les méchants, mais il est surtout gentil avec la droite. La droite, dont le gouvernement a repris la plupart des propositions : des régularisations de travailleurs sans papiers au compte-gouttes, à la discrétion des préfets, un débat parlementaire annuel sur l'immigration, ou encore un futur projet de loi, dès janvier, pour restreindre le champ de l'aide médicale d'État. Les Républicains exigeaient même un engagement écrit, Élisabeth Borne a obtempéré.

Le gouvernement est obligé de se montrer aussi conciliant, parce qu'il a peur. C'est l'influence croissante de l'extrême droite qui explique que l'exécutif accepte de durcir ce texte. À l'Elysée, une sorte de compte à rebours qui s'est enclenché. Emmanuel Macron redoute par-dessus tout que Marine Le Pen lui succède en 2027.

LR en force face au RN qui menace

Une crainte d'ailleurs attisée en ce moment par l'envol des intentions de vote pour la liste RN dans les sondages, pour les européennes de juin. Avec environ 30% de suffrages prévus, c'est une dizaine de points devant Renaissance. Mais la même inquiétude pourrait finalement inciter LR à s'accorder avec le gouvernement. Il faut dire que la droite peut déjà jubiler. Laminée à la présidentielle et aux législatives avec seulement 62 députés, elle se retrouve en position de force pour dicter ses conditions au gouvernement sur l'immigration.

En cas d'accord de cette commission mixte paritaire, Élisabeth Borne sauverait peut-être sa place à Matignon, mais pour combien de temps ? Elle peut encore redouter de voir la fronde enfler au sein de la majorité. Combien de députés Renaissance ou MoDem, fâchés d'avaler tant de couleuvres LR, refuseront de valider le texte ? Quinze, trente, davantage ? Et même si le texte sur l'immigration était finalement adopté, Élisabeth Borne apparaît aujourd'hui comme une Première ministre sous tutelle de la droite.

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