L'info de l'histoire olympique : qu’est-ce qu’une femme pour les Jeux ?

Avant la polémique Imane Khelif, d'autres femmes durant l'histoire olympique ont été jugées en fonction de leur apparence. Décryptage avec Fabrice d'Almeida.
Article rédigé par Fabrice d'Almeida
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
3 août 2024 à Villepinte. La boxeuse algérienne Imane Khelif (en rouge) dans la catégorie des moins de 66 kg, durant son combat contre la hongroise Anna Luca Hamori. Elle sort victorieuse, propulsée en demi-finale olympique avec l'assurance d'obtenir une médaille pour l'Algérie. (SINA SCHULDT / DPA / MAXPPP)

L'info de l'histoire revient aujourd'hui sur cette controverse autour de la boxeuse algérienne, Imane Khelif, qui vient d'assurer une première médaille à son pays, une boxeuse jugée par ses détracteurs pas assez femme pour concourir aux tournois féminins.

franceinfo : Cette question sur le genre invite à se demander ce qu’est une femme aux Jeux olympiques ?

Fabrice d'Almeida : En fait c'est une question qui s’est toujours posée dans les instances olympiques, du moins aussi longtemps qu'il y a eu des femmes aux Jeux olympiques. Elles commencent timidement en 1900 aux Jeux de Paris, mais c'est surtout à partir de 1928 qu'il y a des femmes dans plusieurs disciplines, notamment en athlétisme, et dès cette époque, les débats se posent sur certaines participantes, jugées trop masculines, en fonction de leur physique ou de leur performance. Alors on demande aux athlètes concernées de se soumettre à des tests gynécologiques. En gros, on regardait "entre les jambes", et les médecins faisaient un certificat. C‘était assez humiliant, et il a fallu changer.

La science est venue au secours du sport avec le test chromosomique. Chercher le Y. Et le test est mis en place à partir de Mexico, en 1968. Mais en réalité, et des médecins le savent déjà : les athlètes prennent des hormones mâles. Oui rappelez-vous, les fameuses nageuses est-allemandes, et les athlètes soviétiques de disciplines de force : le poids, le disque. Avec leurs belles épaules, c’était bien des femmes, mais musclées comme un homme. En fait, c’est une forme de dopage. Mais cela fait du taux de testostérone la référence. On élimine les femmes qui en ont trop, comme surhormonées, si j’ose dire.

Par parenthèse, à cette époque, personne ne se demande si les hommes sont vraiment des hommes ou des surhommes. Aux JO, pas de test. Pourtant, le CIO va découvrir de manière assez soudaine, notamment lors d’un drame le 4 décembre 1980, qu'il peut y avoir des cas compliqués.

Que s'est-il passé ce jour-là ? 

Ce jour-là une athlète américaine d’origine polonaise, Stanailslawa Walasiewicz, plus connue sous le nom de Stella Walsh, est tuée accidentellement par le propriétaire d’une supérette où elle allait faire ses courses au cours d’une attaque à main armée. La police prend le corps et procède à une autopsie. À la surprise générale, on découvre qu’elle a des organes sexuels masculins. Le CIO rejette une demande d’annulation de ses médailles, car elle a toujours été considérée comme une femme. Elle avait gagné les jeux de 1932 sur le 100 mètres avec un record du monde. Mais obtenu seulement la médaille d’argent à Berlin, en 1936. Des rumeurs avaient couru, mais elle n'avait jamais été "testée".

Ce n’était pas un cas isolé. Dans l’histoire, le CIO a été compréhensif envers les athlètes intersexes, bannissant les tests systématiques à partir de 1999. Mais fixant un niveau de testostérone maximal à partir de 2012. Une manière de poser le problème autrement. Car certaines femmes produisent naturellement plus de testostérones que d’autres.

Le cas Khelif est de ceux-là. Pour le CIO, n‘en déplaise à ses adversaires et à des fédérations internationales, c’est une femme avec un taux d’hormone naturellement plus élevé. Elle a gagné hier comme femme, dans un match somme tout assez disputé, face à son adversaire hongroise, Anna Luca Hamori. En fait, une femme pour le CIO cela doit, surtout de nos jours, être une grande championne, et Imane Khelif en a l’étoffe. 

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