Enseignement supérieur : "Il faudrait en France la même reconnaissance pour les formations professionnalisantes et académiques", selon Martin Hirsh
Parcoursup a beaucoup été critiqué pour être une procédure trop imprévisible, trop sélective et injuste. Un rapport propose des pistes d'amélioration, notamment sur l'encadrement des formations privées, qui représentent un cinquième de l'offre. Parmi elles, on trouve la proposition de n'inscrire sur la plateforme que les formations dont la qualité pédagogique est garantie par l'État et d'en retirer les formations qui ne remplissent pas ces critères de qualité.
Martin Hirsch est le vice-président de Galileo Global Education, numéro un mondial de l'enseignement supérieur privé, avec plus de 200 000 élèves dans des écoles réparties sur une quinzaine de pays. On y trouve notamment le Cours Florent, Paris School of Business, ou l'ESG.
Martin Hirsch : On est aujourd'hui relativement peu concerné par Parcoursup, puisque la plateforme est d'abord faite pour l'université et pour les formations publiques. C'est obligatoire pour des formations privées qui sont reconnues par le ministère de l'Enseignement supérieur, pas pour celles qui sont professionnelles, reconnues par le ministère du Travail. Or c'est là la plupart de nos formations.
"On a des grandes écoles de commerce comme l'EM Lyon, Paris School of Business, ou des écoles d'art comme Strate, qui sont sur Parcoursup. Beaucoup d'autres ne le sont pas."
Martin Hirschà franceinfo
Bien sûr, je pense que 100% des gens sont favorables à l'amélioration de Parcoursup, même si ça a été un progrès. Dans ce rapport, on lit quand même que 83% des usagers, c'est-à-dire les étudiants, trouvent ça stressant, donc il y a des choses à améliorer, bien évidemment.
Si on élargit, l'enseignement supérieur privé est parfois un peu une jungle. Certains établissements ne sont pas toujours très honnêtes. Que peut-on faire pour à la fois améliorer le contrôle et améliorer l'offre ? Il y a notamment ce label qualité sur lequel travaille le ministère de l'Enseignement.
Il y a les choses que les écoles font elles-mêmes. Nous, par exemple, on a confié à un institut indépendant une enquête de satisfaction auprès de 3 000 de nos étudiants tirés au sort. On a 19 000 étudiants en France qui sont alternants. Donc on s'est intéressé de savoir si on délivrait de l'enseignement de qualité, s'ils en étaient satisfaits, si la conjugaison entre ce qu'ils faisaient dans leur entreprise à mi temps et les cours qu'ils ont dans l'autre moitié de leur temps correspondait.
On en a tiré beaucoup de choses satisfaisantes et il y avait des points d'amélioration. Par exemple, la moitié ne sait pas à qui s'adresser, s'il y a des problèmes. J'imagine que dans une université, on trouverait aussi la moitié des étudiants qui, en sortant de l'amphithéâtre, ne savent pas à qui s'adresser. On a donc des problèmes communs entre entre le public et le privé. La deuxième chose, ce sont les engagements vis-à-vis de nos étudiants. Mesure-t-on correctement l'employabilité, après l'école ? Quand on leur dit qu'un titre est reconnu, l'est-il vraiment ? Y a-t-il une formation aux violences sexuelles et sexistes, etc ?
"On s'est engagé de manière proactive, depuis une bonne année, pour proposer et pour participer à ce qui pourrait être la construction d'un label."
Martin Hirschà franceinfo
Cette régulation permettrait aux gens de savoir où ils vont, qu'ils en ont pour leur argent quand c'est payant, et qu'ils en ont pour leur futur quand c'est gratuit - comme c'est le cas de l'alternance - et qu'ils s'y retrouvent.
Qui délivrerait ce label ? Doit-il être facultatif ou obligatoire ?
Jusqu'à présent, la discussion [avec le gouvernement] s'oriente plutôt vers du facultatif, mais que ça soit suffisamment incitatif ou discriminant ou reconnu pour qu'il soit compliqué de s'en dispenser.
Concrètement, sur les sites internet de vos établissements, trouve-t-on le taux de réussite, ou combien d'étudiants de la promo sortante ont trouvé du travail ? Ces indicateurs-là sont-ils visibles ?
Ces indicateurs sont en tout cas transmis aux autorités de tutelle. Pour nous, c'est le ministère du Travail et on fait ces mesures. Donc, on sait que l'employabilité moyenne est de 87% des diplômés, de ceux qui sortent des écoles d'art, de vente, de management, etc. Mais aujourd'hui, il n'y a pas de standard uniforme de mesure de ces données-là. Et donc on fait attention de ne pas se faire taper sur les doigts, parce qu'on les aurait mises d'une manière qui ne serait pas reconnue par tous.
Vous aviez déclaré il y a un an, dans un entretien aux Échos vouloir faire plus pour la mixité sociale. Comment cela se passe-t-il concrètement chez Galileo Global Education ?
Il y a plusieurs choses. Depuis un an, on a travaillé pour avoir des partenariats avec une quinzaine d'associations, pour proposer des places - y compris des places gratuites pour des formations payantes - pour des étudiants en difficulté. La deuxième chose, c'est un effort, notamment pour l'alternance, pour que ça soit vraiment ouvert. On a ouvert des formations dans des quartiers prioritaires de la ville, par exemple, et on a beaucoup de choses à faire devant nous.
Quel est le grand enjeu pour demain, pour l'enseignement supérieur ?
La première chose, c'est que la qualité soit assurée et soit aussi reconnue. La deuxième chose, c'est qu'on arrête les cloisonnements. La chose la plus importante, c'est de se mettre dans la peau d'un étudiant. On ne sait pas forcément à 17 ans et demi ou à 18 ans, ce qu'on veut faire.
"Les choix qu'on fait doivent pouvoir être réversibles. On doit pouvoir commencer dans une formation professionnalisante et aller vers une formation académique, ou l'inverse."
Martin Hirschà franceinfo
Et donc on doit avoir enfin en France, comme dans les autres pays, un système dans lequel il y ait les mêmes lettres de noblesse et de reconnaissance pour toutes les formations, qu'elles soient professionnalisantes ou académiques. Et nous, on s'y emploie et on s'y engage.
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