Voitures électriques : "Un conducteur dépense entre 11 et 15 euros par mois en recharge publique", selon l'Avere-France

Selon les chiffres de la plateforme automobile, l'électrification du marché continue mais reste assez modeste. Pour en parler, l'invité éco de franceinfo est Clément Molizon, délégué général de l'Avere-France, l'Association nationale pour le développement de la mobilité électrique.
Article rédigé par Camille Revel
Radio France
Publié
Temps de lecture : 277 min
Clément Molizon, délégué général de l'Avere-France, l'Association nationale pour le développement de la mobilité électrique, invité éco du 3 novembre 2023. (franceinfo)

D'après les derniers chiffres de la Plateforme automobile, les ventes de voitures 100% électriques représentent 16% du total sur les 10 premiers mois de l'année. On observe donc une augmentation de trois points par rapport à l'an dernier. L'électrification du marché continue, mais reste assez modeste. Clément Molizon, délégué général de l'Avere-France, l'Association nationale pour le développement de la mobilité électrique, revient sur l'état du marché de l'électrique en France au micro de franceinfo.

franceinfo : Quels sont les freins aujourd'hui ?

Clément Molizon : Les freins sont connus, c'est d'abord le coût d'achat même si sur le coût total de possession du véhicule, on a un certain nombre de modèles qui sont plus rentables qu'une voiture thermique. L'autre frein, c'est le couple autonomie-recharge. L'autonomie a beaucoup progressé et en parallèle, on a un maillage de recharges qui a été beaucoup densifié ces derniers mois.

Combien de kilomètres peut-on faire en moyenne sans avoir besoin de recharger ?

Aujourd'hui, on est entre 350 et 400 kilomètres d'autonomie et en plus, on a un réseau de recharge qui est désormais présent, sur les grands axes routiers et sur les aires de service. On peut largement maintenant prendre la route. Et on l'a vu déjà cet été, un certain nombre de vacanciers ont pris leur voiture électrique pour partir.

Est-ce que les nouvelles règles du bonus écologique, avec une prise en compte de l'impact environnemental et notamment du lieu de fabrication du véhicule, vont dans le bon sens pour vous ?

Tout ce qui peut permettre d'aller vers une décarbonation plus importante des transports, ça va dans le bon sens. Il faut quand même rappeler pour tout le monde que quel que soit le lieu de fabrication, le véhicule électrique reste moins polluant sur tout son cycle de vie, de la fabrication au recyclage qu'un véhicule thermique.

"Plus on va utiliser d'énergie décarbonée pour fabriquer cette voiture électrique et plus on va améliorer son bilan carbone."

Clément Molizon, délégué général de l'Avere-France

à franceinfo

Est-ce que les offres de location longue durée d'une voiture électrique, que porte le gouvernement, peuvent encourager de nouveaux acquéreurs potentiels ?

Bien sûr. Ce qu'il faut se rappeler quand même, c'est qu'aujourd'hui quelle que soit l'énergie, six Français sur sept achètent des véhicules d'occasion. Ça sera la même chose pour l'électrique. On va d'abord avoir un certain public qui va acheter des véhicules neufs et peu à peu, ça va pouvoir redescendre vers des personnes qui ne pourront pas mettre plus de 20 000 euros d'achat. Donc le leasing, ça permet d'une certaine façon d'accélérer ce mouvement-là pour que des ménages déjà modestes, qui ne peuvent pas avoir accès au marché de l'occasion, puissent déjà rouler en électrique.

L'Avere-France vient de présenter son premier rapport sur le prix de la recharge électrique. Combien un conducteur dépense-t-il en moyenne ?

Un conducteur typique aujourd'hui, il va dépenser en charges publiques entre 11 et 15 euros par mois. Ce qui fait que si on rajoute sa recharge privée là où il va faire l'essentiel de ces charges, c'est un budget qui est divisé par trois par rapport à un véhicule thermique. On voit tout l'intérêt en regardant le coût total de possession de la voiture électrique.

Il y avait près de 110 000 bornes de recharge ouvertes au public fin septembre. L'objectif, c'est 400 000 d'ici 2030. Le gouvernement a annoncé 200 millions d'euros de plus pour accélérer ce déploiement. Est-ce qu'on va arriver à tenir cet objectif ?

En tout cas, c'est l'objectif, que le gouvernement et l'ensemble de la filière se sont un peu fixé. Nous, ce qui est important, ce n'est pas tant le chiffre, même si on va faire en sorte de l'atteindre. Ce qui est important, c'est que tous les utilisateurs de véhicule électrique puissent trouver où se recharger de la bonne façon au bon prix et ne soient pas empêchés dans leurs déplacements. 400 000, c'est un horizon qu'on se donne comme on s'est donné cet horizon des 100 000 points de recharge qui a été atteint en mai. Aujourd'hui, nous, ce qu'on dit, c’est allons-y ! Mais il faut faire bien attention à ce que l'ensemble des opérateurs puisse survivre jusqu'à ce moment-là, afin de continuer à avoir un réseau qui soit de qualité et densément maillé. Donc il va falloir regarder année après année si l'objectif est bien pertinent et continuer à le suivre.

Est-ce que le réseau électrique va pouvoir supporter cette demande ?

Oui, bien sûr, et c'est une question qu'on s'était déjà posée en 2019 avec le Réseau de transport d'électricité, RTE.

"La voiture électrique n'est absolument pas une menace, mais une opportunité pour le réseau électrique."

Clément Molizon, délégué général de l'Avere-France

à franceinfo

RTE nous dit que les véhicules électriques, c'est un potentiel de flexibilité encore plus important que le chauffe-eau il y a quelques décennies. Donc, vraiment, c'est très utile pour le réseau de développer la voiture électrique.

On parlait des bornes de recharge sur la voie publique, il y a aussi la question des lieux privés. Quels sont les dispositifs d'aide qui existent aujourd'hui pour l'installation de bornes de recharge dans des bâtiments ?

Le principal dispositif qui existe, c'est le programme Advenir que l'on pilote depuis 2016 et qui finance les bornes de recharge en copropriété. On avait identifié déjà à ce moment-là que la question financière en copropriété était compliquée. Toute personne vivant en copropriété sait que les sujets un peu de démocratie ne sont pas toujours simples donc on a accompagné cela avec le programme Advenir. Ensuite, sur les autres lieux, il n'y a pas forcément d'aides qui existent aujourd'hui. Mais les entreprises sont déjà engagées dans une forte dynamique d'équipements en lien avec des sujets RSE. Donc, ça aussi, c'est en train de se développer fortement dans le privé.

Comment fait-on, si on veut faire installer une borne de recharge dans sa copropriété ?

Nous, ce qu'on conseille dans les copropriétés qui ont plus de dix places, c'est déjà de penser collectif, d'anticiper sur l'avenir et donc d'installer une infrastructure collective. Pour ça, vous vous rapprochez de professionnels qui peuvent faire cette installation ou vous en discuter en assemblée générale. Dans les plus petites copropriétés ou si cette solution n'a pas fonctionné, vous avez un droit à la prise. C'est vraiment un droit et vous avez tout un processus à suivre qui n'est pas si compliqué que ça et à la fin, vous pouvez installer à vos frais une borne de recharge.

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