Valls, l'anti-Ayrault, face à la majorité
Jean-Marc Ayrault, qui s'en est allé
prendre son train pour Nantes hier, après avoir quitté Matignon, tel le Poor lonesome cow-boy , avait le
lien avec ces Verts turbulents qu'il savait cajoler, et auxquels il passait
tout, fermant les yeux sur leurs incessantes critiques.
Manuel Valls, à peine arrivé,
est confronté à une énigme : gouverner, mais avec qui ? Des
écologistes qui vont pratiquer la chaise vide, des socialistes rétifs qui vont négocier
chaque texte ?
De plus, son remaniement à
vingt ministres va fabriquer des mécontents, notamment ceux qui n'en seront
plus. Un dîner a réuni hier soir des "Hollandais" historiques, en
présence des présidents de groupes. De l'aveu d'un participant, la constitution
du gouvernement telle qu'elle se profile, ne correspond pas à leur analyse du
scrutin perdu des municipales.
Le refus des Verts met à mal la majorité
Cécile Duflot, la vraie
patronne d'EELV, a imposé à ses amis de ne pas accepter un grand ministère de
l'écologie - après elle, le délug e.
Son objectif est de retrouver son siège à l'Assemblée, en lieu et place de sa
suppléante socialiste Danièle Hoffman-Rispal, ce qui fait que la majorité PS ne
tiendra plus qu'à une voix : ça va être très compliqué pour le nouveau Premier
ministre. Cécile Duflot, qui va prendre le leadership sur les dix-huit députés
écologistes, élus grâce au Parti Socialiste - les ingrats -, mise tout sur les élections
Européennes. Ce sont autant de voix qui manqueront à Manuel Valls au Parlement
quand il va s'agir de soutenir les premiers textes à venir, dans quinze jours.
Il risque vraiment de ne pas obtenir la
confiance ?
C'est l'autre épine dans le
pied de Manuel Valls : toute une frange du PS, l'aile gauche, mais aussi les
rénovateurs, les amis de Martine Aubry, le canal historique du PS, ce qui peut aller
de soixante à une centaine de parlementaires, tous veulent désormais se faire
entendre. Le parti doigt sur la couture, le "ils décident et nous on
exécute", c'est fini depuis la claque de dimanche. L'idée serait de
discuter les textes, en amont, à Matignon. Et infléchir la ligne jugée trop
social-démocrate de François Hollande, ça promet. Cela concerne tout de suite le
pacte de responsabilité, le plan de 50 milliards d'économies, dont la copie
doit être transmise à Bruxelles. Les socialistes veulent bien voter la
confiance, mais exigent d'être entendus pied à pied par la suite.
Ça va devenir ingérable ?
C'est là que l'anti-Ayrault
fait son entrée. La composition du nouveau gouvernement va certes compter
aujourd'hui. Mais le nouveau Premier ministre va devoir montrer les muscles, faire
preuve de fermeté, de poigne, sous peine de voir sa majorité partir dans tous
les sens, et devenir totalement incontrôlable. La seule diplomatie pratiquée
par son prédécesseur, après l'euphorie de 2012, ne suffit plus. Manuel Valls doit
s'imposer, et vite, avant que Matignon ne devienne une citadelle assiégée.
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