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Les espèces invasives, ça a aussi du bon !

Les espèces invasives sont généralement considérées comme une pure calamité. Mais des chercheurs insistent : ces espèces décriées ont aussi des effets positifs.

Article rédigé par franceinfo - Hervé Poirier
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
L'algue chlorophyceae ou la caulerpe en Méditerranée. (Illustration) (SOPHIE DE WILDE / GAMMA-RAPHO VIA GETTY IMAGES)

Hervé Poirier, rédacteur en chef du magazine scientifique Epsiloon, nous parle des espèces invasives, généralement considérées comme de véritables fléaux. 

franceinfo : Et bien non, dites-vous, les espèces invasives, ne sont pas que des calamités ? 

Hervé Poirier : Il faut reconnaître que ces intrus ont bien mauvaise réputation. Le lapin en Australie, La caulerpe en Méditerranée, les frelons asiatiques, les fourmis électriques… La science ne cesse de lancer des alertes : une étude publiée l’année dernière estimait par exemple à plus de 1000 milliards de dollars le coût global pour l'économie mondiale sur les 50 dernières années, de ces espèces dites "exotiques envahissantes".

Mais, des chercheurs suisses et américains lancent une contre-alerte : les préjugés de longue date contre les espèces non indigènes ont obscurci le processus scientifique, en poussant à se concentrer sur les coûts, et en négligeant les avantages qu’elles peuvent apporter. Des avantages qu’ils jugent "divers, fréquents et souvent de grande ampleur".  

Par exemple ?

L’étude cite le cas des vers de terre, qui augmentent la productivité de l'agriculture biologique de 25%, y compris dans les régions où ils ne sont pas indigènes. Et le cas emblématique de la truite brune, issue d’Amérique du Nord : les Néo-Zélandais aiment tellement aujourd'hui la pêcher, qu'ils ont établi de nouvelles réglementations pour la protéger dans leurs eaux !

Et parlons de la crépidule en France, ce mollusque originaire des États-Unis, qui a envahi plusieurs baies de la Manche et de la façade Atlantique. Sa prolifération a été régulièrement accusée de gêner la pêche, les huîtres et les coquilles Saint-Jacques. Or, on se rend compte aujourd’hui qu’elle n’a pas que des mauvais côtés : elle crée de nouvelles niches écologiques, augmente la richesse en espèces d’invertébrés, régule les efflorescences de phytoplancton. Elle commence même à être appréciée pour ses qualités culinaires.  

Les mentalités sont en train de changer ?

Sans doute, mais pas encore assez vite aux yeux de l'équipe américano-suisse, à commencer dans le milieu scientifique. Nos chercheurs militent pour que les outils internationaux qui permettent d’évaluer les avantages de la biodiversité pour les personnes et la nature, soient aussi appliqués aux espèces non indigènes, afin de mesurer non seulement leur coût, mais aussi leur participation à l’équilibre des écosystèmes, à l’atténuation du changement climatique ou à l’approvisionnement en ressources…

De quoi mieux guider les décisions politiques. Et de quoi mieux éclairer les mentalités, qui ont tendance, dans le grand public comme chez les chercheurs, à être aveuglément rétives à tout ce qui vient d’ailleurs.    

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