Pollution au large de la Corse : sur la piste des dégazages sauvages
Malgré des systèmes de surveillance aérien, par satellite ou encore des balises à bord des bateaux, retrouver le responsable du dégazage sauvage de ce week-end près des côtes corses n'est pas une mince affaire.
Les nappes d’hydrocarbures s’éloignent des côtes de Corse et de Sardaigne. Mais les autorités cherchent toujours le ou les bateaux qui ont pu commettre ce dégazage. Une enquête a été ouverte et confiée à la gendarmerie maritime, a déclaré la procureure de Marseille, Dominique Laurens, afin d'en savoir plus sur les circonstances de cette pollution.
D'abord une vingtaine de bateaux ont été identifiés parce qu'ils se trouvaient dans ce sillon de circulation. Il faut dire que depuis 2004, les gros bateaux de marine marchande et de transport de passagers sont équipés de transpondeurs, une sorte de balise qui indique la position, la vitesse du navire. Un appareil exigé par l’organisation maritime mondiale avant tout pour la sécurité des bateaux puisque ce système d’identification automatique (AIS) leur permet aussi de connaître leur position les uns par rapport aux autres et normalement d'éviter les collisions. Même si cela n'a pas empêché celle du porte conteneur CSL Virginia et du vraquier Ulysse, comme le rappelle l'association Robin des bois. Mais depuis la mise en place de ce système, il a donné une mine d’information à la communauté scientifique sur la circulation maritime.
Sans flagrant délit, peu de poursuites
Malgré les systèmes de surveillance aérienne, ou par satellite, il peut encore y avoir des zones blanches en mer ou alors un bateau peut très bien couper son transpondeur. Même si cela contribue à en faire le coupable idéal. Aujourd'hui les enquêteurs établissent avec Météo France des modèles informatique pour mieux analyser la dérive des nappes et ainsi pouvoir dire plus précisément où et quand la pollution a commencé. "Mais ces dégazages peuvent se faire de nuit, dans une colonne de bateaux qui se suivent," estime Christian Buchet, directeur du centre d'études de la mer à l'université catholique de Paris.
Sans flagrant délit constaté, il y a très peu de poursuite. Trois bateaux sont plus particulièrement ciblés, selon le ministère de la Transition écologique mais ils vont d'abord être interrogés comme témoin. Cela ne suffit pas à conclure l’enquête.
Analyse des rejets et immobilisation du bateau
Il faut aussi une analyse de ce qui a été rejeté en mer : un mélange d’huile, d’eau, de détergents pas toujours simple à différencier d’un bateau à l’autre. Cette analyse des rejets n'est pas aussi fiable qu'une empreinte ADN sur une scène de crime. Il faut pouvoir aussi immobiliser les navires suspects lors de leur prochaine escale, analyser ce qu’il y a dans leurs cuves, dans leur registre de bord. "Si cela passe dans un pays européen, c'est plus facile. En revanche, si c'est dans un pays hors Union européenne, il va falloir jouer de diplomatie", explique Antidia Citores, de l'association Surfrider Fondation, qui a d'ailleurs porté plainte contre X dans cette affaire.
Aujoud'hui, la pollution s'éloigne vers le sud des côtes. Mais ce goudron, il coule et donc n'épargne pas l’écosystème méditerranéen déjà bien fragilisé. Si les marées noires sont plus impressionnantes avec leurs oiseaux mazoutés, elles sont plus rares que ces dégazages plus ou moins discrets. Selon un rapport du WWF, en Méditerranée, les dégazages représentaient au début des années 2000 jusqu'à un million et demi de tonnes de pétrole déversé. Soit l'équivalent d'un Erika [le pétrolier qui s'est brisé au large de la Bretagne le 12 décembre 1999] par semaine.
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