Nitrites dans la charcuterie : le gouvernement n'est pas encore prêt à les interdire malgré les risques de cancers
En juillet, l’agence sanitaire ANSES a officiellement fait le lien entre cancer colorectal et exposition aux nitrates et nitrites. Un avis qui a poussé le gouvernement à publier un communiqué où il promettait d’étudier "la réduction ou la suppression des additifs nitrés dans tous les produits où c’est possible". Le gouvernement promettait aussi "un plan d’action à l’automne". L’automne est là et le groupe de travail du ministère de l’Agriculture discute toujours. Une conseillère promet d'ailleurs que son rapport sera remis avant le 21 décembre.
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Pourquoi y a-t-il des nitrites dans la charcuterie ? Historiquement, les charcutiers ont rajouté du salpêtre, puis des nitrites dans la viande pour qu’elle se conserve plus longtemps. Cela évite aussi des bactéries qui provoquent le botulisme. Et accessoirement, c’est ce qui fait que votre jambon est rose (sinon, il serait gris)… Sauf qu’on s’est rendu compte que ces nitrites sont mauvais pour la santé. Sous pression de l’opinion, l’industrie a donc lancé des produits sans nitrites. C’est plus couteux, beaucoup plus compliqué et contraignant à produire et pour l’instant ca ne représente que 15% des ventes en grande surface.
La composition du groupe du travail n’a jamais été officiellement publiée mais selon mes informations, il y a d’un côté des organismes comme l'INRAE et l’INSERM et de l’autre des entreprises du secteur. La Ligue contre le Cancer ou l’association militante Foodwatch, très actives sur le sujet n’ont pas encore été auditionnées. C’est peut-être pour cela que les débats s’orientent plutôt actuellement vers la réduction des nitrites et non leur interdiction…
Malgré les recommandations sanitaires, l’interdiction n’est pas envisagée pour le moment
En coulisses, certains acteurs du dossier avaient proposé de commencer par interdire les nitrites aux populations les plus fragiles (crèches, écoles, hôpitaux, Ehpad…). Pour l’heure, malgré les recommandations sanitaires, le gouvernement semble plutôt suivre l’avis des professionnels qui mettent en avant les difficultés techniques de produire sans nitrites. Plus troublant, le ministère de l’Agriculture reprend même les éléments de langage de l’industrie expliquant qu’il faut surtout éviter de consommer trop de charcuterie et s'interroge sur les éventuelles conséquences sanitaires des alternatives aux nitrites : est-on vraiment sûr qu’elles ne sont pas plus dangereuses pour la santé ? L’industrie installe le doute. Et l’exécutif hésite.
Or, c’est potentiellement un important sujet de santé publique. Un sujet que certains comparent au sang contaminé. On ne va pas tranche le débat technique et scientifique, mais on peut parler de l’enjeu politique : le gouvernement peut-il se permettre de ne pas réglementer une substance aussi décriée ? Et la pression monte : le député Modem Richard Ramos tente de pousser une résolution au niveau européen via la commission des Affaires Européennes de l'Assemblée, tandis que l’Insoumis Loïc Prud'homme réfléchit aussi à un texte. Si l’exécutif ne bouge pas, le Parlement pourrait se charger de remettre le dossier en haut de la pile.
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