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Réformes des retraites : l'impasse politique du gouvernement face aux manifestants violents

Jeudi, des incidents ont éclaté en marge des manifestations contre la réforme des retraites. La Première ministre a dénoncé des "violences inacceptables". Pour autant, politiquement, l’exécutif semble démuni face aux manifestants. Le brief politique de Jean-Rémi Baudot
Article rédigé par Jean-Rémi Baudot
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
La neuvième journée d'action nationale contre la réforme des retraites a été émaillée de violences. ici à Toulouse, en Haute-Garonne, le 23 mars 2023. (CHARLY TRIBALLEAU / AFP)

On a tous vu ces images, à Paris ou à Bordeaux. Ces petits groupes de manifestants, très mobiles, provoquant souvent des incendies sur leur passage. Des mouvements difficiles à contrôler, en dehors de toute organisation syndicale. Des situations tendues où l’usage de la force par les policiers est parfois questionnée.

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Il faut déjà bien faire la différence entre les cortèges et ces petits groupes. Au sein de ces groupes, il y a notamment des jeunes, inconnus des services de police, qui expriment une colère. Il y a néanmoins aussi ce que le ministère de l’Intérieur appelle des militants d’ultragauche, anticapitalistes, très politisés. La réforme des retraites reste leur principal mot d’ordre, le 49.3 leur catalyseur. Mais les stigmates des manifestations, tags anarchistes notamment, compliquent la réponse politique à apporter. 

Un proche du chef de l’État définit une partie de ces manifestants comme "nihilistes". Définition : idéologie qui refuse toute contrainte sociale. Et donc l’objectif, au-delà des retraites, c’est la chute du système libéral et capitaliste. Cela veut dire que, en l’état, l’exécutif ne peut pas apporter de réponse politique. Au-delà du retrait de la réforme des retraites, aucun argument que le gouvernement pourrait mettre en avant ne serait susceptible de calmer la partie la plus radicale de ces jeunes libertaires.  

L’exécutif est dans une impasse. Officiellement, le gouvernement veut jouer l’apaisement mais en coulisses, beaucoup vous expliquent que, seul le bras de fer avec les forces de l’ordre finira par faire rentrer ces manifestants chez eux. Une méthode dangereuse car elle flirte avec les risques de bavure.

Faute de réponse politique, le gouvernement pourrait jouer l'opinion

La complexité, c’est que ces mouvements sporadiques pourraient tout aussi bien se perpétuer comme s’éteindre d’eux-mêmes. Selon le professeur de sciences politiques Xavier Crettiez, spécialiste de la violence politique, une partie de ces manifestants n’a d’ailleurs aucune réelle raison d’arrêter. Contrairement aux jours de grève, ces manifestations nocturnes n’impliquent aucun coût direct pour ces participants, aucune retenue sur salaire. Rajoutez l’idée que seule la violence permettrait d’obtenir gain de cause, la résonnance des chaînes d’info et des réseaux sociaux, sans oublier la dimension parfois ludique d’aller jouer au chat et à la souris avec les policiers... Et vous avez un mouvement imprévisible.

Faute d’avoir une réponse politique à apporter et sauf drame, si ces mouvements venaient à s’enliser, l’exécutif pourrait plutôt jouer l’opinion. C’est en partie ce qu’a commencé à faire Emmanuel Macron mercredi, en invoquant le Capitole américain et le Brésil. Le chef de l’État se place du côté de l’ordre. Une manière de tenter de faire oublier l’origine de ces manifs : les retraites. 

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