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Bac 2021 : comment les lycéens se préparent au grand oral, entre ceux qui stressent et ceux qui sont à l'aise

La première édition du grand oral du baccalauréat est prévue à partir du 21 juin. Et les lycéens s'entraînent, comme au lycée de Goussainville (Val-d'Oise), avec une méthode originale : les élèves sont tour à tour candidat et jury.

Article rédigé par Alexis Morel
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Préparation au grand oral du bac 2021 au lycée de Goussainville (Val-d'Oise), en juin 2021. (ALEXIS MOREL / RADIO FRANCE)

C'est l'une des grandes nouveautés du bac 2021 : la première édition du grand oral, l'une des seules épreuves sauvées cette année, est prévue à partir du 21 juin, au terme d'une année perturbée par le Covid-19. Vingt minutes d'épreuve durant laquelle le candidat doit préparer à l'avance deux questions. Le jury en choisit une, puis, face à lui, le lycéen développe son sujet debout face au jury durant cinq minutes. Suivent dix minutes de questions réponses avec les examinateurs, et enfin cinq dernières minutes pour parler de son orientation. L'épreuve compte pour 10% de la note du bac.

Dans ce contexte, comment les élèves se préparent-ils à cette petite révolution au lycée ? Au lycée de Goussainville, dans le Val-d'Oise, ils s'entraînent en prenant tour à tour la place du candidat et d'un membre du jury. Afin d'organiser cette séance, Juliette Benelli, professeure d'histoire-géographie, a du renoncer à tout le reste au mois de juin. "Pour pouvoir faire cette préparation, il y a un chapitre que je ne fais pas", explique-t-elle.

J'ai renoncé à un bout du programme parce que je considère que la préparation au grand oral est plus importante, mais du coup il va y avoir des lacunes sur un chapitre.

Juliette Benelli, professeure d'histoire-géographie

à franceinfo

L'objectif est ambitieux : l'idée avec le grand oral, c'est d'aider l'élève à prendre la parole de façon claire et convaincante, selon les textes du ministère de l'Éducation nationale, et au-delà de ça, d'installer une culture de l'oralité durant toute la scolarité. Pour les élèves, il était temps. "Ce n'est pas une compétence qu'on a forcément bien travaillée dans notre scolarité, estime Hajar, lycéenne de Goussainville. On a plus été 'obligés' à avoir une bonne rédaction, on a eu plus d'épreuves écrites qu'orales, et c'est vrai que l'oral, on l'a un peu trop négligé et aujourd'hui, ça cause en moi une grosse timidité."

Des difficultés pour les élèves timides

Pour Yacine qui se dit "à l'aise à l'oral", le thème "colle parfaitement à ma personnalité. On arrive à un âge où on va commencer à avoir des avis politisés, en tant que citoyen, on est censé voter donc on est censé savoir s'exprimer et formuler un avis. Si on doit passer des entretiens pour le travail, on est obligé de communiquer et donc du coup il faut aussi savoir s'exprimer."

Préparation au grand oral du bac 2021 au lycée de Goussainville (Val-d'Oise), en juin 2021. (ALEXIS MOREL / RADIO FRANCE)

Mais la difficulté, c'est qu'il a fallu préparer les élèves à cet exercice inédit pendant une année bouleversée, à moitié au lycée, à moitié à la maison. Alors pour les plus timides, comme Kélya, c'est un peu la panique. "Je suis vraiment stressée parce que je ne suis pas du tout à l'aise à l'oral, déplore-t-elle. Je trouve que c'est inégal parce que ceux qui sont à l'aise, même s'ils n'ont pas beaucoup de connaissances, vont forcément avoir une bonne note, alors que ceux qui ne sont pas à l'aise, même avec des connaissances, vont quand même avoir une plus mauvaise note. Du coup je dois avoir plus d'entraînement que les autres". Kélya ne s'estime "pas du tout prête".

Je pense qu'il m'aurait fallu beaucoup plus de temps et on n'a pas du tout ce temps-là car personne n'était vraiment au courant des vraies règles de l'oral.

Kélya, lycéenne

à franceinfo

Pas assez de temps pour gommer, réduire les inégalités face aux codes spécifiques de l'oral. On est là au coeur du problème pour sa professeure, Juliette Benelli. "C'est une bonne idée de préparer les élèves à l'oral mais il faut laisser le temps aux enseignants de trouver les moyens de bien former les élèves parce que là, on ajoute du stress au stress, regrette l'enseignante. Les gamins sont perdus parce que déjà, seuls ceux qui sont à l'aise avec leur corps vont avoir les premiers points. Et comme ce n'est pas une épreuve de contenu, les bons élèves trop timides n'auront pas les notes de bagou et les notes de 'c'est complètement vide mais je parle super bien.'"

Une préparation inégale et insuffisante pour les syndicats

Des syndicats enseignants dénoncent aussi une préparation insuffisante et surtout inégale entre lycées, mais aussi des consignes d'évaluation encore floues. Des associations disciplinaires de profs de maths, d'histoire et de lettres avaient demandé l'annulation du grand oral.

Le ministre de l'Éducation nationale Jean-Michel Blanquer a opté pour le maintien, avec quelques aménagements. L'élève aura droit à ses notes, il pourra aussi mentionner quelles parties du programme n'ont pas été vues. Et le ministère a promis beaucoup de bienveillance des jurys.

Une bonne nouvelle, pour Cyril Delhay, professeur d'art oratoire à Sciences Po. "J'ai vu des milliers d'enseignants qui se sont formés à ça depuis un an, estime celui qui est à l'origine de cette épreuve. J'ai assisté à des oraux d'élèves qui s'entraînent, j'ai vu leur progression. C'est incroyable comment, en très peu de temps, ils progressent, et même s'il y a des frottements, et c'est normal qu'il y en ait puisque c'est nouveau, l'enjeu en vaut dix mille fois la chandelle"."Je comprends un petit peu leur anxiété aujourd'hui, poursuit l'enseignant, mais ça vaut le coup de relever le défi parce qu'encore une fois, l'enjeu est de sortir avec une compétence qui va être valable pour la vie entière !"

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