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Salon du Bourget : la première édition depuis le Covid navigue entre reprise des commandes et promesses de sobriété

C’est l’heure de la reprise pour l’aéronautique. Le premier salon du Bourget depuis le Covid ouvre ses portes lundi 19 juin. Cette édition sera marquée par la redémarrage du secteur aérien, mais aussi par l’inquiétude face au défi climatique.
Article rédigé par franceinfo, Grégoire Lecalot
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Illustration du musée de l'air et de l'espace situé au Bourget, mai 2023. (STEPHANE MOUCHMOUCHE / HANS LUCAS)

Cette année, les compagnies aériennes s’attendent à transporter 4,3 milliards de passagers. Très proche du niveau de 2019, qui s’élevait à 4,5 milliards. Après le Covid, le secteur semblait KO debout et bien peu étaient ceux qui espéraient une timide reprise avant 2025 ou 2026.

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Pourtant, le salon 2023 bruisse de rumeurs de méga commandes pour les constructeurs, plus de 2 000 disent les spécialistes. On a vu déjà celles d’Air India (470 avions), celle de Saudia, ou encore celle de Turkish Airlines qui a été finalement retardée. 600 avions, c’est un record historique partagé entre Airbus et Boeing. En revanche, si vous commandez un avion de transport aujourd’hui, il va falloir être patient : vous attendrez environ dix ans pour l’avoir !

La décarbonation de l’aviation en question

Si certaines compagnies aériennes ne semblent pas se poser la question, d’autres cherchent à activer tous les leviers pour se décarboner et pouvoir continuer à se développer comme l’explique Antoine Laborde, directeur des achats carburants à Air France : “Le premier, c'est le levier assez classique, de renouveler les flottes. Un nouvel avion de nouvelle génération consomme 20 à 25 % de carburant en moins. Deuxième levier, c'est ce qu'on appelle les 'mesures opérationnelles'. Par exemple, rouler avec un seul moteur ou avoir des trajectoires plus directes pour optimiser l'usage de nos avions. Et le troisième levier, qui est finalement un levier assez nouveau et qui n'est pas activé encore aujourd'hui, c'est l'utilisation de carburant d'aviation durable”.

Ce troisième levier pourrait permettre de diminuer de 80% les émissions de CO2 des avions, mais seulement sous certaines conditions : il faut que le carburant durable soit bien produit à partir de déchets et non pas à partir de cultures dédiées. Puis, il faut qu’il y en ait assez. On compte 250 000 tonnes de carburants durables pour l’aviation produites aujourd’hui contre 300 millions de tonnes de kérosène. Au mieux, il y a actuellement 1% de biocarburant embarqué dans les avions alors que l’Union européenne en veut 70% en 2050. Le problème, c’est que les matières premières nécessaires comme les déchets verts ou huiles de cuissons usagées, risquent de manquer pour répondre aux besoins.

1 % de la population mondiale est responsable de 50 % des émissions aériennes

Le secteur aérien n’a pas attendu l’émergence de la crise climatique pour réduire son empreinte carbone. Depuis 1960, les émissions de CO2 par passager ont été divisées par cinq grâce à des technologies plus performantes. Le problème, c’est que le nombre de passagers, lui, a été multiplié par quarante-cinq !

Olivier Del Bucchia, président de l’association Aéro décarbo et coauteur du rapport “Pouvoir voler en 2050”, souligne l’importance d’une prise de conscience : “Les émissions de l'aérien ont significativement augmenté depuis 1960 parce que le trafic a augmenté. Certes, la technologie, les carburants, les biocarburants, l'hydrogène, tout ça fait partie de l'équation." 

"Le problème, c'est que si on se dit les leviers technologiques sont suffisants, on prend un risque énorme. Il faut avoir en tête que la décarbonation par la base technologique consomme beaucoup d'énergie. Tout cela a des conséquences”.

Olivier Del Bucchia

à franceinfo

Quoi qu'il en soit, il y a urgence, estime Daniel Iracane, de l’Académie des technologies. “Il va falloir aller très vite. On aurait pu et dû démarrer avant. Cela n'a pas été fait suffisamment. Le défi majeur, c'est de démarrer la production d'outils de décarbonation. Savoir jusqu'à quel niveau on pourra les développer déterminera finalement si on pourra autant, voler plus ou voler moins demain”.

Des associations, des ONG, et même certains grands acteurs du secteur, comme Aéroports de Paris, plaident pour une sobriété plus ou moins sévère. Ce sera plus difficile pour certains que pour d'autres. Selon une université suédoise, 1 % de la population mondiale est responsable de 50 % des émissions aériennes. En attendant, cette année au salon du Bourget, les constructeurs aéronautiques préféreront sans doute communiquer sur leurs commandes.

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