Transition énergétique : l'hydrogène peut-il réellement devenir l'énergie du futur ?
C'est une première en France, un train à hydrogène circule depuis le mercredi 1er février et jusqu'à vendredi entre Tours et Loches, dans la région Centre, sur le réseau TER. Alstom réalise des tests grandeur nature avec ce train qui pourrait remplacer les locomotives diesel. L'hydrogène est présenté souvent comme l’énergie du futur et serait une solution idéale pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre. Mais les industriels ont encore de grands défis à relever pour y parvenir.
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Il faut tout d'abord rappeler le grand avantage de l’hydrogène. Direction Grenoble, dans la nouvelle usine de l'entreprise McPhy. Sa spécialité, les stations-services à hydrogène pour remplir le réservoir des camions, des bus, ou éventuellement des trains. C'est comme un plein classique mais avec de l'hydrogène sous forme gazeuse. "Sur cette borne, on a deux pistolets de recharge, décrit Cédric Halbout, le directeur du site. Ces stations ont vocation de remplir des véhicules dotés de piles à combustible qui vont transformer l'hydrogène en électricité et permettre la mobilité d'un véhicule."
Peu de stations à hydrogène
Une fois que l'hydrogène a été converti en électricité, aucune émission de CO2 à la sortie du pot d'échappement. Il n'y a que de la vapeur d'eau qui s'échappe : idéal pour décarboner les véhicules. Il y a seulement une cinquantaine de stations comme celle-ci en France : à Auxerre, à Pau ou à Versailles, pour quelques centaines de véhicules. Autant dire que ce nombre est anecdotique, mais la filière se fixe un objectif de 225 nouvelles stations d'ici deux ans et le déploiement de 1 000 bus d'ici 2026. "Il y a un programme de développement très ambitieux, affirme Jean-Baptiste Lucas, directeur général de McPhy, avec un objectif d'une station tous les 100 km d'autoroute à l'échelon de l'Europe. On y croit d'autant plus qu'il y a un développement assez ambitieux d'un certain nombre de constructeurs pour pouvoir construire des véhicules qui seront moins onéreux."
"On sait bien que la mobilité constitue un des vecteurs importants d'émission de CO2. Et donc, l'hydrogène a toute sa place pour décarboner la mobilité."
Jean-Baptiste Lucas, directeur général de McPhyà franceinfo
L'Union européenne espère faire rouler plus de 60 000 poids lourds à hydrogène d'ici sept ans. Quant à l'avion à hydrogène, ce ne sera pas avant 2035. Un horizon que s'est fixé Airbus pour son premier appareil zéro émission. Concernant les voitures, l'hydrogène n'est pas pertinent pour les véhicules légers : mieux vaut utiliser les batteries, selon les spécialistes. D'ailleurs, le patron de Volkswagen a récemment annoncé que son groupe allait abandonner cette technologie pour ses voitures. La start-up française Hopium, qui met au point une berline à hydrogène, est aujourd'hui en difficulté. L'hydrogène semble donc idéal donc pour la mobilité lourde et pour les véhicules difficiles à équiper en batterie.
Une production d'hydrogène encore très carbonée
L'autre grand défi, c'est la production d'hydrogène parce qu'on ne le trouve pas à l'état pur dans la nature. Aujourd'hui, 95% de l'hydrogène utilisé est issu de gaz naturel ou de charbon. Ce processus émet énormément de CO2. "Les industries qui utilisent aujourd'hui de l'hydrogène émettent du CO2, explique François Kalaydjian, de l'Institut français des énergies nouvelles, parce que dans le processus même de production d'hydrogène, des émissions de CO2 sont associées. Aujourd'hui avec le gaz, pour chaque kilo d'hydrogène, il y a neuf à dix kilos de CO2 qui sont produits." Cette production d'hydrogène que l'on appelle carboné ou gris émet en France 9 millions de tonnes de CO2 par an.
Un hydrogène plus écologique est possible. Soit en captant et en stockant le CO2 émis lors de la fabrication de l'hydrogène. Cette technologie peut d'ores et déjà être mise en place dans les usines qui utilisent de l'hydrogène, les producteurs d'engrais par exemple. Soit par l'électrolyse de l'eau qui permet d'extraire les molécules d'hydrogène en faisant circuler de l'électricité dans de l'eau. Mais pour cela, il faut des électrolyseurs. Deux usines sont donc en projet à Belfort et à Vendôme dans le Loir-et-Cher pour produire ces machines. Des machines qu'il faudra évidemment alimenter en électricité. Et vu les difficultés sur le marché de l'électricité, les prix qui s'envolent et le retard de la France sur le déploiement des éoliennes ou du photovoltaïque, on comprend que l’hydrogène a encore quelques obstacles à franchir avant d’être totalement bas carbone.
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