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Autonomie de la Corse : la France va-t-elle prendre exemple sur l'Espagne ou l'Italie ?

Dans le club des correspondants, franceinfo passe les frontières pour voir ce qui se passe ailleurs dans le monde. Aujourd'hui direction l'Espagne et l'Italie, des pays qui accordent une grande autonomie à certaines régions.

Article rédigé par Bruce de Galzain - Henry de Laguérie
Radio France
Publié
Temps de lecture : 5min
Une femme tenant un drapeau catalan lors d'une manifestation pour défendre l'autonomie de la Catalogne, le 10 juillet 2010.  (JOSEP LAGO / AFP)

Le ministre de l'Intérieur quitte la Corse vendredi 18 mars, après deux jours de visite. "Nous sommes prêts à aller jusqu'à l'autonomie. Voilà, le mot est dit", a déclaré Gérald Darmanin qui repart avec un protocole de sortie de crise rédigé par les nationalistes. Le gouvernement français ouvre donc la voie à une autonomie de la Corse. Quelle forme prend cette autonomie chez nos voisins ? Direction l'Espagne et Italie.

La Catalogne, souvent citée en exemple par les nationalistes corses 

La Catalogne et ses 7 millions et demi d’habitants est l’une des régions les plus autonomes d’Europe. Cela se mesure déjà en chiffres : en 2021, son budget s’élevait à 40 milliards d’euros de dépense. C'est autant que la somme de tous les budgets des 13 régions françaises. 

Ses compétences sont très larges. Comme les autres régions d’Espagne, la Catalogne a la main mise sur la santé et sur l’éducation. Ainsi, pendant la crise du Covid-19, les restrictions n’étaient pas les mêmes à Barcelone ou à Madrid. À l’école, les enfants ont un programme scolaire spécifique."La Catalogne décide des contenus des manuels scolaires. Dans les écoles publiques, la langue principale c'est le catalan. Bien sûr il y a les matières comme l'espagnol, l'anglais mais en ce qui concerne les mathématiques, les SVT, la physique chimie ... les cours sont donnés en catalan, à la différence du reste des communautés autonomes. Sauf au Pays basque ou en Galice qui ont aussi leur propre langue", explique Marc Cases, expert en affaires publiques à Barcelone.

Le catalan est donc la langue co-officielle de la région, au même niveau que l’espagnol. Mais dans les faits, le catalan est la seule langue utilisée par les institutions locales et les médias dont la puissante chaîne régionale TV3.

L’État a également cédé une partie de ses compétences régaliennes. La Catalogne dispose de sa propre police, les Mossos d’Esquadra. Ils sont présents sur tout le territoire catalan, ce sont les forces de l’ordre les plus visibles, celles qui assurent la sécurité des citoyens au quotidien. La police espagnole et la Guardia civil ne sont présentes qu’aux frontières. 

Une autonomie large qui ne satisfait pas tout le monde en Catalogne 

En 2017, les Catalans ont tenté d'obtenir leur indépendance. Marc Cases estime que la demande d'autonomie de la Corse n'est peut-être qu'une première étape avant la volonté d'indépendance comme en Catalogne. "On a eu le statut d'autonomie en 2006. Pour le mouvement indépendantiste, ça n'a pas été suffisant". 

La notion de nation catalogne est inscrite de son statut d'autonomie même si cela n'a pas d'effets juridiques. Enfin et c’est loin d’être anecdotique : la Catalogne a sa propre sélection de football mais elle n’est pas reconnue par la Fédération Internationale de Football Association (Fifa). C’est aussi l’une des revendications des nationalistes catalans.

En Italie, les régions ont différents niveaux d'autonomie 

Le niveau d'autonomie des régions italiennes dépend souvent de leur histoire. Mais globalement, elles ont toutes plus de pouvoirs qu'en France. Les Italiens ne sont pas du tout jacobins, pas de centralisme ou peu. Rome est certes le siège des institutions politiques mais les gouverneurs des régions sont puissants. Preuve en est, pendant la crise sanitaire, ils ont presque toujours été associés aux décisions prises par le gouvernement. Ou en tout cas écoutés. 

L'article 116 de la Constitution italienne qui date de 1948 permet de donner plus d'autonomie aux régions qui n'ont pas de problèmes de finances. C'est le cas des régions du nord. Par exemple, les habitants des riches Lombardie et Bénétie se sont prononcés pour plus d'autonomie lors d'un référendum en 2017. Les négociations, interrompues à cause de la crise sanitaire, ont repris avec le gouvernement. L'Emilie-Romagne souhaite également plus d'autonomie.

Ces régions ont déjà plus d'autonomie qu'en France au niveau de l'éducation (pour les jeunes enfants), au niveau de la santé également. Certaines compétences pourraient devenir exclusivement régionales, pour le moment beaucoup sont encore partagées.

Cinq régions ont un statut spécial en Italie

La Sicile, la Sardaigne, le Val d'Aoste, le Frioul-Vénétie-Julienne et le Trentin-Haut-Adige ont encore plus d'autonomie. La Sicile et Sardaigne, comparables à la Corse, sont plus autonomes en raison des tensions séparatistes mais aussi grâce à leur insularité et à leur économie et de leur insularité. La Sicile est totalement autonome au niveau financier et fiscal. La Sardaigne, elle, récupère 70% de l'impôt sur le revenu.

Toutes ces régions spéciales disposent de compétences exclusives sur l'enseignement primaire, le tourisme, le transport, l'urbanisme, l'industrie, le commerce ou encore la police locale. En revanche, l'État garde la main pour la justice, la défense, la monnaie ou encore l'immigration.

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