Aux États-Unis, en Afrique du Sud et en Colombie, des affaires de violences policières provoquent la colère des citoyens
Dans Le club des correspondants, franceinfo passe les frontières pour voir tout ce qui se fait ou se passe ailleurs dans le monde. Aujourd'hui, nous nous intéressons à des affaires de violences policières aux États-Unis, en Afrique du Sud et en Colombie.
En France, le procès d’un policier s’ouvre jeudi 24 septembre. Il est accusé d’avoir violenté une personne menottée à Chanteloup-les-Vignes dans les Yvelines. D’autres affaires de violences policières sont survenues ailleurs dans le monde et entraînent la colère des citoyens.
Aux États-Unis, la décision d'un grand jury sur la mort de Breonna Taylor entraîne une nouvelle nuit de colère
L’affaire George Floyd a profondément marqué les États-Unis mais il y a un autre nom qui incarne aussi les victimes de violences policières, c’est celui de Breonna Taylor. Depuis la mort de George Floyd à Minneapolis fin mai, ce sont surtout ces deux noms qu’on entend dans les manifestations. Le 13 mars dernier à Louisville (Kentucky), en pleine nuit trois policiers pénètrent brutalement au domicile de Breonna Taylor, une jeune infirmière de 26 ans. Son petit ami croit à un cambriolage. Il a un port d’arme et ouvre le feu. Les officiers de police répliquent et Breonna Taylor, surprise en plein sommeil, est tuée par les balles des policiers. Six mois plus tard, aucun d’entre eux n’a été inquiété et le slogan "Justice pour Breonna Taylor" est celui que l’on a le plus entendu ces derniers mois à Louisville, mais aussi à Washington, New York ou Portland.
Une décision de la justice du Kentucky, mercredi 23 septembre, a relancé la colère à Louisville mais aussi dans plusieurs villes du pays. Un grand jury a considéré que l’un de ces trois policiers devait être poursuivi pour mise en danger de la vie d’autrui, pas pour la mort de Breonna Taylor mais pour les balles qui ont traversé les appartements voisins. Aucun chef d’inculpation pour les deux autres policiers. Et c’est une nouvelle nuit de colère qui a éclaté mercredi dans les rues de Louisville avec deux policiers blessés par balle, leurs jours ne sont pas en danger.
On a vu des manifestations aussi à New York, à Washington devant la Maison Blanche ou à Philadelphie. La question des violences policières et des inégalités marque incontestablement la campagne électorale. On est maintenant à 40 jours de la présidentielle. Plusieurs responsables démocrates, dont le candidat Joe Biden, ont d'ailleurs jugé mercredi très sévèrement la décision de ce grand jury du Kentucky.
En Colombie, des émeutes et des manifestations après la mort d'un avocat
Une grève nationale a eu lieu lundi 21 septembre en Colombie. Une journée dite "del Paro Nacional" convoquée par plusieurs syndicats. Les Colombiens protestaient contre la politique du gouvernement du président Ivan Duque et contre les violences policières incarnées par la mort de Javier Ordóñez. Un avocat de 46 ans qui est décédé dans une clinique de Bogota après son arrestation musclée le 9 septembre. Le mouvement de colère a explosé en émeutes durant trois jours après le visionnage d'une vidéo postée sur les réseaux sociaux.
Sur la vidéo qui dure plus de deux minutes, on entend l'avocat supplier à maintes reprises d'arrêter les décharges électriques au taser, alors qu'il est maintenu au sol par les deux policiers. Il a reçu une dizaine de décharges. D'après les premiers éléments de l'enquête, l'avocat aurait aussi reçu plusieurs coups dont un à la tête.
La journée "del Paro Nacional" n'a pas eu la même intensité de violence que lors du 9 septembre mais des affrontements ont éclaté notamment à Bogota et à Medellin. Cette journée du 21 septembre fait écho à celle du 21 novembre 2019. Nous sommes à deux mois de la date anniversaire de cette mobilisation massive et historique qui avaient réuni entre 207 000 et 1,5 million de personnes, selon les sources. Les Colombiens protestaient déjà contre la politique du gouvernement actuel. Au troisième jour de la mobilisation, la mort d'un étudiant Dilan Cruz, 18 ans, avait ému le pays. Alors qu'il s'enfuyait, le dos tourné à l'escadron mobile anti-émeute, il a reçu une bombe lacrymogène à la tête. Il est mort quelques jours plus tard. La date du 21 septembre n’a donc pas été choisie par hasard, c’est désormais "la marche 21S".
En Afrique du Sud, trois policiers poursuivis pour la mort d’un adolescent
Nathaniel Julies, un adolescent en situation de handicap, a été abattu lors d’une patrouille des forces de l’ordre dans le quartier populaire d’Eldorado Park, au sud-ouest de Johannesbourg. La nouvelle de la mort de cet adolescent avait, le 27 août dernier, provoqué des émeutes dans le township métis et réveillé la colère contre les violences policières. Des manifestants et les forces de l’ordre s'étaient affrontés, à coup de jets de pierres d’un côté et de balles en caoutchouc de l’autre.
Selon la famille de Nathaniel Julies, l'adolescent de 16 ans, atteint de trisomie 21, était sorti pour acheter des biscuits avec ses amis. La première version de la police maintenait que le jeune homme avait été pris dans un échange de tirs avec des membres d’un gang. Mais le procès de trois officiers qui s’est ouvert cette semaine dépeint un tout autre tableau. L’une des accusées, une jeune policière métisse, a reconnu avoir tiré sur la victime, mais elle ignorait que son arme était chargée avec des balles réelles et affirme que l’ordre venait de son supérieur. Ils sont tous les deux poursuivis pour meurtre avec préméditation.
Ce drame rappelle qu’il n’est pas rare en Afrique du Sud que des personnes soient tuées entre les mains de la police. Le slogan "Black Lives Matter" avait d'ailleurs été repris lors de manifestations en juin, pour dénoncer les violences policières dont sont en majorité victimes les populations des quartiers les plus pauvres. Au moins 11 personnes sont décédées entre les mains des forces de l’ordre depuis le début du confinement. Et sur la simple année 2017, la police a tué plus de 500 personnes.
À Eldorado Park, la communauté métisse souhaite aussi être reconnue comme victime de ces violences. "Nous sommes délaissés, dénonce Kyle qui habite le township. S’ils peuvent faire ça à ce jeune homme, qu’est-ce qu’ils vont nous faire à nous ? Ils auront le droit de nous tirer dessus comme ça ? Non, il faut que l’on mette un terme à tout ça aujourd’hui." La famille du jeune homme souhaite de son côté voir les accusés être condamnés. Les trois policiers devraient savoir lundi 28 septembre s’ils peuvent bénéficier d’une remise en liberté sous caution.
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