Climat : quelle indépendance énergétique en Espagne et au Japon ?
Dans le club des correspondants, franceinfo passe les frontières pour voir ce qui se passe ailleurs dans le monde. Aujourd'hui, direction l'Espagne et le Japon pour voir quelle est leur politique concernant les énergies renouvelables.
Les émissions de CO2 ont augmenté de 150% par rapport à l'ère préindustrielle : c'est le nouveau constat catastrophique de l'organisation météorologique mondiale, mercredi 18 mai. Les bâtiments sont responsables de près de 40% des émissions de dioxyde de carbone en Europe et de la consommation d'énergie. Direction l'Espagne et le Japon pour voir quelles stratégies sont mises en place pour assurer leur indépendance énergétique.
En Espagne, l'autoconsommation en électricité solaire avance à grands pas
En Espagne, les panneaux solaires se multiplient sur les toits. Depuis l'entrée en vigueur de la directive sur l'efficacité énergétique dans les bâtiments de l'Union européenne, toutes les maisons construites en Espagne doivent avoir une consommation d'énergie très faible ou presque nulle. Par ailleurs, une part importante de l'énergie consommée doit être produite par des sources d'énergie renouvelables, qui doivent être situées dans le même bâtiment ou à proximité.
Désormais, les constructeurs immobiliers sont donc obligés d'installer soit des panneaux solaires, dans les nouveaux bâtiments, ou d'avoir recours à d'autres sources d'énergie renouvelables comme l'éolien, la biomasse, la géothermie ou l'aérothermie. "À l'heure actuelle, si vous souhaitez avoir une maison qui dispose d'une climatisation du XXIe siècle, en général, vous installez des panneaux solaires photovoltaïques sur le toit, ainsi que le chauffage et la climatisation par aérothermie, ce sont des pompes à chaleur très efficaces, explique l'architecte madrilène Antonio Hernández. Cela vous permet d'être indépendant sur le plan énergétique, d'une part, et d'avoir une viabilité économique, car vous ne dépendez plus d'un approvisionnement et des fluctuations des prix de l'énergie."
Mais, dans les faits, l'autoconsommation en électricité solaire avance à grands pas en Espagne. C'est la source d'énergie renouvelable la plus utilisée actuellement dans la construction des bâtiments neufs dans ce pays. Les panneaux solaires peuvent couvrir une grande partie de la consommation d'énergie d'une maison, puisque l'Espagne bénéficie environ de 3 000 heures d'ensoleillement par an, en moyenne. Depuis la suppression en 2018, par le gouvernement Sánchez, du polémique "impôt sur le soleil", l'autoconsommation en électricité solaire est donc en plein essor et la demande n'a fait qu'exploser après le confinement. Les plaques photovoltaïques ne peuvent pas combler la totalité des besoins, surtout lorsque le soleil ne brille pas et c'est alors que le réseau conventionnel prend le relais. Mais, à l'inverse, pendant les journées ensoleillées, le surplus d'électricité produite par les panneaux solaires est reversé dans le réseau général et l'usager obtient une rétribution en échange. Ce système est donc synonyme de bienfaits environnementaux mais aussi économiques pour les usagers.
Après des années de stagnation à cause surtout des obstacles politiques, on peut dire l'avenir de l'autoconsommation électrique s'annonce très prometteur en Espagne puisque l'actuel gouvernement envisage d'atteindre 100% d'énergie renouvelable en 2050. Et le soleil semble être la meilleure option.
Au Japon, la question de l'indépendance énergétique se pose
Onze ans après l'accident nucléaire de Fukushima, le Japon n'a pas réussi à améliorer sa situation. Le pays est encore plus tributaire des importations d'énergie maintenant qu'il ne l'était avant cet accident nucléaire de 2011. L'indépendance énergétique de l'archipel qui importe en masse gaz, charbon et pétrole, est inférieure à 15%, contre 20% avant l'accident de Fukushima. Selon le plan du gouvernement, l'autosuffisance énergétique nippone devrait cependant monter à 30% en 2030.
Pour l'heure, l'impossibilité de redémarrer comme espéré les réacteurs nucléaires se conjugue à un faible déploiement de l'éolien ou du solaire. "Le Japon est tout simplement en retard sur les énergies renouvelables par comparaison avec de nombreux pays", explique Yoh Yasuda, expert en énergie à l'Université de Kyoto.
Pourtant, en théorie, rien qu'avec le développement de parcs d'éoliennes en mer et sur terre, le Japon pourrait grandement satisfaire ses besoins en électricité. "On répète que le Japon n'a pas de ressources naturelles, poursuit Yoh Yasuda, mais dans le domaine des énergie renouvelables il a pourtant au contraire un très fort potentiel inexploité." Mais avant l'accident de Fukushima le gouvernement japonais misait sur le nucléaire et n'a pas suffisamment investi dans le renouvelable.
Comment le Japon imagine-t-il concrètement élever son taux d'autosuffisance ? D'abord en augmentant la part des énergies renouvelables : dans l'ordre le solaire, l'hydraulique, l'éolien, le géothermique et la biomasse, le tout étant censé représenter 36% de la production électrique en 2030. Une relance plus importante des tranches nucléaires est souhaitée par le gouvernement. À plus long terme, la grande quête des Japonais est l'exploitation d'hydrogène et ammoniac, pour alimenter les véhicules, faire tourner des centrales électriques ou des installations industrielles. Un haut fonctionnaire de l'agence de l'énergie se félicite des décisions du gouvernement : "Un nouveau plan énergétique a été approuvé en octobre dernier et pour la première fois la place de l'hydrogène y est clairement mentionnée. Cela veut dire que nous allons avancer sur les développements de techniques et d'une chaîne d'approvisionnement."
Même si symboliquement la région de Fukushima se veut en pointe dans ce domaine avec des installations pilotes, l'hydrogène ne fournira que 1% de l'électricité nippone en 2030 et sa contribution à l'indépendance énergétique n'atteindra pas un niveau significatif avant longtemps.
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