Colombie, Pérou ou Chili : au pouvoir ou en passe d'y arriver, la gauche a le vent en poupe en Amérique du sud
Dans le Club des correspondants, franceinfo passe les frontières pour voir ce qui se passe ailleurs dans le monde. Aujourd'hui, direction le Pérou, la Colombie et le Chili, trois pays dans lesquels la gauche est arrivée au pouvoir ou est en passe d'y arriver.
En Colombie, au Chili et au Pérou, la gauche semble avoir le vent en poupe. Au pouvoir depuis quelques mois au Chili et au Pérou, qualifiée pour le second tour de l'élection présidentielle en Colombie, direction ces trois pays pour analyser les dessous de ces poussées politiques.
Au Chili, quatre mois de pouvoir et des réformes sociales
Au Chili, le gouvernement de centre gauche va entamer son quatrième mois à la tête du pays. Le jeune président de 36 ans, Gabriel Boric, avait remporté l’élection face à un candidat d’extrême droite, en proposant un programme avec de nombreuses réformes sociales.
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Les Chiliens veulent que les promesses de Gabriel Boric se concrétisent rapidement : la réforme des retraites, la journée de 40 heures, ou encore l’amélioration du système de santé. Cependant, le gouvernement doit en ce moment gérer une inflation grandissante et une économie encore fragile à cause de la pandémie. À cela s’ajoute des problèmes d’insécurité dans la capitale Santiago, et de violences dans le sud du pays, en territoire Mapuche, le peuple indigène le plus important au Chili.
Le gouvernement a tout de même même réussi à faire voter des lois ces dernières semaines, malgré son absence de majorité au parlement. Gabriel Boric a réussi à augmenter le salaire minimum et a mis en place plusieurs aides financières pour les ménages les plus pauvres. Le jeune gouvernement ne perd pas non plus son cap réformiste : des discussions sont actuellement en cours avec les organisations sociales autour de la question des retraites. La réforme des impôts, quant à elle, devrait être entre les mains du Congrès d’ici quelques semaines : c’est une priorité pour le gouvernement qui devra financer toutes ses réformes sociales.
Gabriel Boric compte également beaucoup sur la nouvelle constitution toujours en cours de rédaction. Le nouveau texte constitutionnel devra être très différent de l’actuel, rédigé sous la dictature et ultra-libéral. Si elle est approuvée par le référendum de septembre prochain, la nouvelle constitution accordera un rôle beaucoup plus important à l'État.
Au Pérou, un bilan décevant dix mois après l'accession au pouvoir
Au Pérou, cela fera un an en juillet que Pedro Castillo a accédé à la présidence de la République sous l’étiquette d’un parti marxiste-léniniste. Cet instituteur avait créé la surprise et porté l'espoir des couches populaires. Un an après, force est de constater que son bilan est décevant.
Pedro Castillo a perdu beaucoup de soutiens au fil des mois, même parmi les classes populaires des zones rurales qui avaient massivement voté pour lui.
Aujourd’hui, quasiment 70% des sondés désapprouvent sa gestion, selon une dernière enquête de l’Institut d’Études péruviennes. La même proportion espère qu’il ne finira pas son mandat qui court jusqu'en 2026.
Toutefois, ce discrédit n’est pas propre à Pedro Castillo. Au Pérou, c’est toute la classe politique qui est désavouée. Congrès, gouvernement, président : "Qu’ils s’en aillent tous", scandaient les péruviens lors de manifestations contre la vie chère, en avril dernier.
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Pedro Castillo propose beaucoup de mesures en pagaille. Résultat : il est taxé d'être un démagogue et peu de ces mesures aboutissent. Il plaide par exemple pour un changement de Constitution, l’actuelle étant accusée de favoriser les intérêts privés. Cependant, la proposition n’a pas dépassé le stade du Congrès, tout comme sa volonté de réforme fiscale.
Il est vrai que le parlement fait barrage et ne pense qu’à le renverser. Pedro Castillo a déjà échappé à deux procédures de destitution mais les analystes pointent aussi des mesures mal préparées et une grande improvisation. Sa politique n'est pas non plus très lisible. Dans son discours, il se place à gauche mais il a fait entrer dans son gouvernement des personnalités de droite et se montre très conservateur dans le champ social. La gauche progressiste a d'ailleurs claqué la porte de son gouvernement.
En Colombie, la gauche largement en tête au premier tour de la présidentielle
En Colombie, Gustavo Petro a remporté haut la main dimanche le premier tour de l’élection présidentielle.
Cette élection est jugée historique car c’est la première fois dans l’histoire de ce pays que la gauche fait un tel score. La Colombie a connu un long conflit armé et la présence de guérilla marxiste a discrédité la gauche démocratique, pendant plus d’un demi-siècle. L’accord de paix avec la guérilla des FARC signé en 2016 a ouvert le jeu politique. La pandémie, elle, a aggravé les inégalités dans un pays qui est déjà très inégalitaire. Tout cela explique le score de Gustavo Petro.
Cependant, l'emporter au second tour ne sera pas si facile pour lui. Le premier tour a vu surgir un outsider, Rodolfo Hernandez qui avec 28% des voix a évincé de la course présidentielle le candidat de la droite traditionnelle, Federico Gutierrez. Rodolfo Hernandez est un riche entrepreneur de 77 ans qui a fait campagne sans parti et sans autre programme que de dénoncer les corrompus. La presse le compare souvent à Donald Trump. Pour Gustavo Petro, Hernandez est un adversaire coriace.
Rodolfo Hernandez a joué la carte de l’anticorruption et de la critique des élites. S’il n’était pas passé au deuxième tour, une partie de ses électeurs auraient voté pour Gustavo Petro. En revanche, les électeurs de droite qui ont voté Federico Gutierrez éprouvent de la haine envers Petro. Ils vont tous voter pour Rodolfo Hernandez qui ne parle pas de taxer les riches ou d’arrêter la production de pétrole comme Petro.
Le défi pour la gauche est de faire voter les abstentionnistes, qui représentent 46% de l’électorat.
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