franceinfo conso. Crise sanitaire et difficultés d'accès au crédit immobilier : les nouveaux exclus du crédit
La crise sanitaire creuse les inégalités devant l'accès au crédit immobilier. Une enquête de Lionel Maugain que l'on retrouve dans le numéro de "60 Millions de consommateurs" en kiosque en ce moment.
Des infos sur ce que vous achetez, sur ce que l'on nous vend, avec le magazine 60 Millions de consommateurs et nous parlons aujourd'hui des crédits immobiliers avec Lionel Maugain, journaliste, chef de la rubrique Argent au magazine 60 Millions de consommateurs et de cette enquête : Les nouveaux exclus du crédit immobilier. Il y a un lien avec la crise sanitaire. Il semble qu'il est de plus en plus difficile de devenir propriétaire aujourd'hui.
franceinfo : Premier constat rappelé dans votre enquête, la crise sanitaire n'a pas fait baisser les prix de l'immobilier
Lionel Maugain : Non, ça n'a pas fait baisser les prix de l'immobilier. On constate que après le confinement, il y a eu un effet de rattrapage. Les prix ont augmenté de 5% juste après le confinement. Aujourd'hui, on peut dire que les prix sont stables, mais enfin, il n'y a pas une tendance à la baisse, selon les chiffres des notaires.
Donc, il y a la question du prix du logement, évidemment, dans l'accès à la propriété, mais aussi celui de l'accès au crédit. Et il est plus difficile parce que les banques ont récemment durci les conditions d'emprunt ?
Cela a commencé avant même le confinement parce que les banques ont suivi les recommandations du Haut Conseil de stabilité financière. C'est un organisme présidé par le ministère de l'Economie. Vous n'accordez plus de prêt, si l'emprunteur dépasse une mensualité de 33% de ses revenus, et vous n'accordez plus de crédit au-delà de 25 ans, ce sont deux lignes rouges qui ne doivent plus être franchies par les banques.
Cela veut dire qu'un même dossier qui aurait pu passer l'an dernier pourrait être refusé aujourd'hui ?
Un même dossier est refusé aujourd'hui, on estime que le nombre de dossiers de candidats au crédit immobilier écartés est passé de 5% en 2019 à 10%. Aujourd'hui en 2020, il y a deux fois plus de dossiers qui sont écartés par les banques.
Il y a ces règles strictes et rigides qui s'adaptent à tout le monde. Et puis, évidemment, les critères que les banques adaptent en fonction du demandeur. Et là, on se rend bien compte qu'on n'est pas tous égaux devant le crédit. Ce que révèle votre enquête, c'est que la crise sanitaire creuse en plus ces inégalités...
Oui, malheureusement, il y a plusieurs choses. On l’a constaté et les professionnels nous le confirment, il y a des secteurs vraiment sinistrés, avec des candidats qui travaillent dans l'aéronautique, dans le tourisme, dans l'hôtellerie restauration, l'habillement et l'événementiel, malheureusement, même s'ils sont en CDI depuis longtemps dans leur entreprise, même s'ils sont en chômage partiel, ils auront beaucoup de difficultés à obtenir un crédit.
Déjà, si vous n'avez pas d'apport personnel, ce qui concerne quand même tout ce qu'on appelle les primo-accédants - les personnes qui achètent pour la première fois - si vous n'avez pas d'apport personnel, là, vous aurez un NON la plupart du temps qui est assez définitif.
Deuxièmement, pour les personnes qui présentent un risque de santé ou pour les personnes âgées, donc qui auront une assurance qui sera facturée plus cher, elles risquent de dépasser du coup le seuil de l'usure. Parce que vous savez que tout crédit est limité par un seuil de l'usure déterminé par la Banque de France. Or, il se trouve que l'assurance emprunteur reste très chère dans notre pays, ce qui fait que vous pouvez tout à fait décrocher un crédit auprès de la banque, mais que ce crédit ne passe pas, parce que votre assurance fait dépasser le taux d'usure. Donc, les personnes malades, les séniors, les jeunes ont beaucoup de mal à emprunter.
Et puis voilà, on est quand même en pleine crise sanitaire. Il y a des secteurs gravement touchés par la crise et les personnes qui travaillent dans ces secteurs, malheureusement, n'ont plus accès au crédit.
Vous avez abordé le cas des primo-accédants. La question de l’apport ? C'est vraiment un argument absolument définitif.
Pas d'apport, pas d'emprunt aujourd'hui. Malheureusement, c'est assez définitif. Alors après, vous pouvez avoir des solutions qu'on donne dans l'enquête, évidemment. Heureusement, vous pouvez solliciter vos proches. Vous pouvez par exemple utiliser une assurance-vie si jamais vous avez une assurance-vie. Il y a des solutions pour essayer de contourner cette contrainte. Mais enfin, le principe, c’est pas d'apport, pas de crédit.
Malheureusement, il y a une dernière chose à dire aussi si vous souhaitez faire un crédit immobilier, c'est de ne pas être trop dans le rouge parce que les banques regardent de près vos relevés de compte. Et si vous êtes trop souvent à découvert, au-delà de votre découvert autorisé, là encore, vous aurez du mal à décrocher un crédit.
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