Héritage et succession : comment réduire la facture du fisc, quelle donation choisir selon sa situation
Des enquêtes exclusives, des conseils pratiques pour transmettre votre patrimoine, protéger vos proches, gérer au mieux un héritage, le nouveau hors-série du magazine de l'INC, 60 Millions de consommateurs, vient de sortir en kiosque. Les précisions d'Amin Meslem, chef de rubrique au magazine.
franceinfo : Première chose à savoir pour bien préparer sa succession, c'est qu'il faut anticiper. Si aucune démarche n'est faite, c'est la loi qui s'imposera. Votre décès n'est pas forcément comme vous l'auriez souhaité...
Amin Meslem : Si vous n'aviez pris aucune disposition particulière, sous forme de donation ou de testament, c'est la loi qui désignera vos héritiers, et qui fixera la part de vos biens revenant à chacun. Vos descendants et votre conjoint survivant vous succéderont alors en priorité.
Si vous n'êtes pas marié, vos enfants ou petits-enfants recevront l'intégralité de votre succession, excluant tous les autres héritiers. Et si vous n’avez pas d'enfants, ce sont vos parents, frères et sœurs, neveux et nièces qui récupéreront vos biens. Et enfin l'État sera votre successeur, en dernier lieu, si vous n'avez ni parents proches, ni famille éloignée.
Les droits de succession, c'est l'impôt le plus impopulaire auprès des Français, parce qu'il faut dire que l'Etat a la main lourde ?
Oui, à l'exception du conjoint ou du partenaire de PACS, ou, sous certaines conditions, les frères et sœurs du défunt, tous les autres héritiers doivent s'acquitter de droits de succession. Leur héritage n'est toutefois taxable, que s'ils dépassent l'abattement que leur accorde la loi, celui-ci dépendant du lien de parenté avec le défunt.
Et ensuite, le fisc applique un taux qui va de 5 à 45% en fonction du montant de l'héritage taxable, pour les successions en ligne directe. Si le montant d'héritage après abattement est compris entre 152.325 et 922.000 euros, il faudra payer 57.038 euros de droits de succession. Et si le montant est supérieur à 1,8 million d'euros, il faudra payer 237.606 euros.
Est-ce qu'il y a des moyens pour réduire la part du fisc justement ?
Alors transmettre des biens qui sont vivants est un bon moyen de réduire les droits de succession. Les donations bénéficient en effet de la même fiscalité que les successions. Donc chaque parent peut ainsi donner jusqu'à 100.000 euros, à chacun de ses enfants en franchise d'impôt, et même jusqu'à 259.325 euros à un enfant handicapé.
En plus, ces abattements, ils se reconstituent tous les 15 ans. Ce qui signifie qu'en vous y prenant tôt, vous pouvez bénéficier plusieurs fois de ce dispositif.
Il n'y a pas que l'Etat qui se sert, il y a les banques également. Vous parlez même d'indécence à 60 Millions de consommateurs ?
En effet, pour clôturer les comptes de leurs clients décédés, de nombreuses banques prélèvent des commissions élevées. Nous avons calculé les frais de succession appliqués par 11 grandes banques. Résultat, pour un avoir de 3 000 euros, ses frais vont jusqu'à 300 euros selon les établissements et les mêmes 602 euros pour un avoir de 30.000 euros.
Et certaines banques vont même jusqu'à facturer des frais plus importants à partir de deux produits bancaires détenus dans l'établissement, y compris les assurances-vies qui n'entrent pourtant pas dans la succession.
Vous avez passé à la loupe les assurances obsèques, visiblement, ce n'est pas un bon plan ?
Oui, alors ces produits garantissent au décès de l'assuré le versement d'une somme d'argent à la personne de son choix pour payer ses funérailles. Mais trop souvent, l'assuré cotise à perte et son bénéficiaire reçoit moins que l'argent versé. Mais en fait, il faut bien avoir à l'esprit que ces assurances sont des contrats courants à risque, et pas des contrats d'épargne. Quel que soit le montant des versements, l'assureur réglera le capital choisi au départ, même si le souscripteur a cotisé le double. Pour résumer, plus on vit longtemps, plus on a de risques de cotiser à fonds perdus.
Alors, quel est le meilleur moyen pour assurer le financement de ses obsèques ?
Le mieux, c'est d'épargner doucement mais sûrement, en mettant par exemple en place des versements mensuels programmés sur un produit d'investissement sans risque. Le livret A et le LDDS par exemple, qui bénéficient d'un taux d'intérêt à 3% nets d'impôt, jusqu'au 31 janvier 2025, et aussi des livrets bancaires non réglementés, ou les fonds en euros qui peuvent être souscrits via un contrat d'assurance-vie, sont également intéressants et sans risques.
Justement, les assurances-vies, c'est intéressant ?
Oui, l'assurance-vie est un très bon outil pour transmettre une partie de son patrimoine, parce que le capital décès n'est pas soumis aux règles de partage entre les héritiers, mais revient à la ou les personnes désignées comme bénéficiaires dans le contrat. Vous pouvez donc choisir de gratifier le ou les proches de votre choix, sans qu'ils aient ou non un lien de parenté avec vous.
Si l'on est pacsé ou si l'on vit en concubinage, est-ce que le partenaire hérite de quelque chose ?
Si vous ne faites rien, votre concubin ou votre partenaire de pacs n'héritera pas de vous, car il ne fait pas partie de vos héritiers légaux. Pour qu'il en soit autrement, il est impératif de prendre des dispositions en sa faveur, de votre vivant. Vous pouvez rédiger un testament qui permettra de transmettre à votre partenaire la part de vos biens qui ne reviendra pas à vos enfants, si vous en avez.
Justement, les enfants, est-ce qu'on peut les déshériter ?
Non, la loi sur les successions protège vos enfants à votre décès, et ils auront droit à une part minimale de vos biens, dont vous ne pouvez pas les priver au profit d'une autre personne. Cette part s'appelle la réserve héréditaire. Elle est égale à la moitié de vos biens si vous avez un enfant, aux deux tiers si vous en avez deux, et aux trois quarts si vous en avez trois ou plus.
Est-ce qu'on peut refuser un héritage ?
Oui, hériter n'est pas automatique, et il est possible de renoncer à une succession, notamment parce que le défunt a accumulé des dettes. Alors la renonciation doit se faire de façon officielle chez un notaire, ou via un formulaire déposé au greffe du tribunal judiciaire.
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