Le débrief politique. François Hollande "lutte contre le sentiment de vide"
J-3 avant la passation de pouvoir, Hollande n'en finit pas de dire au-revoir, les marcheurs sont 428, les insoumis se tournent vers Marseille... Tout ce qu'il ne fallait pas rater dans l'actualité politique de jeudi 11 mai avec Yael Goosz.
Les derniers jours très politiques de Hollande
Ça se confirme aussi, François Hollande n'en finit pas de dire au-revoir. Le président a déjà un pied dans sa vie d'après. Ce jeudi matin, il est allé visiter les futurs locaux de sa fondation (La France s'engage) à la Station F, un incubateur de start-up en construction dans le 13e arrondissement de Paris. Ses prédécesseurs ont bâti et laissé une trace dans la pierre ou le verre, l'Opéra Bastille de Mitterrand, le Quai Branly de Jacques Chirac. François Hollande, lui, veut bâtir des projets. C'est le but de sa fondation.
Non profit "La France s'engage" has already created jobs and value. Very proud to have them on campus pic.twitter.com/4mqypexnpR
— StationF (@joinstationf) 11 mai 2017
L'occasion aussi de revenir sur son parcours politique. Car, lui aussi, a été jeune en politique comme Emmanuel Macron. "Je n'avais pas pensé, nécessairement, que je deviendrais président de la République. Certains peuvent avoir même une accélération et se présenter au suffrage pour la première fois et devenir président de la République. Ça peut arriver." C'était l'humour hollandais à la tribune.
Il s'est confié, avec un peu plus de gravité, à franceinfo sur son agenda et sur la façon dont il appréhende la passation de pouvoirs, dimanche, à 10h, à l'Élysée. Il assure qu'il vit tout cela plutôt bien et qu'il veut une passation amicale : "Je ne passe pas le pouvoir à un opposant politique. Je souhaite qu'Emmanuel Macron réussisse. Je ne vais pas commenter sa première décision. Je ne veux pas apparaître comme un conseiller ou un mentor." S'il ne regrette pas ce qu'il s'est passé en 2012, lorsqu'il n'avait pas raccompagné Nicolas Sarkozy, il dit regretter les commentaires faits sur cette séquence. "Ce n'était pas un signe d'inélégance. Dans la circonstance, cela aurait été trop. C'était déjà dur pour Nicolas Sarkozy", glisse-t-il.
Son dimanche sera très politique. Après la passation, François Hollande se rendra à Solferino, au siège du PS, comme François Mitterrand en 1995. Histoire de boucler la boucle et de faire le chemin inverse. "C'est un rite, dit-il. Le PS fait partie de mon histoire mais je n'irai pas tous les dimanches." Il semble totalement déjà libéré du poids de la fonction. "Le pouvoir offre une force intérieure qui peut donner, quand on arrête, un sentiment de vide. Je lutte contre ce sentiment", sourit-t-il. Revenir en politique, il n'y pense pas mais il est prudent, il ne faut jamais dire jamais. Il part en vacances lundi pour quelques jours. La destination n'est pas connue. Dès septembre, il passera une fois par mois à sa fondation.
En Marche vers l'autosatisfaction
Emmanuel Macron met ses candidats en orbite pour décrocher une majorité absolue à l'Assemblée nationale. C'est l'objectif. Conférence de presse au QG ce jeudi après-midi pour présenter la liste des 428 marcheurs investis. On a eu le droit à une avalanche de chiffres et de statistiques. Par exemple, il y a 52% de candidats issus de la société civile, la moyenne d'âge est de 46 ans ou encore le benjamin a 24 ans. "Vous pouvez vous plonger dans les annales, jamais un mouvement politique français, dotée de 13 mois d'existence, porte l'audace que nous portons devant vous", s'auto-félicite Richard Ferrand, le secrétaire général de En Marche.
Alors, quel est le visage de "l'audace", dont parle Richard Ferrand ? On a épluché les tableaux Excel. Il y a, effectivement, les novices : une gardienne de la paix dans l'Allier, le producteur de l'émission Faites entrer l'accusé en Charente Maritime, le très grand mathématicien Cédric Villani ou la torera Marie Sara dans le Gard, face au frontiste Gilbert Collard.
428 candidats la République en marche pour les législatives, "214 hommes et 214 femmes, 52% issus de la société civile", dit Richard Ferrand pic.twitter.com/Zuf9HyqTUV
— franceinfo (@franceinfo) 11 mai 2017
"La première richesse elle est humaine. Une fois que vous avez avec vous les gens qui croient en vous vous pouvez tout faire" Cédric Villani pic.twitter.com/OnFmrpoMhN
— franceinfo (@franceinfo) 11 mai 2017
On retrouve aussi des profils très politiques. Il y a ceux qui l'ont soutenu dès le début comme les députés socialistes Christophe Castaner et Richard Ferrand, des écologistes de l'UDE, ralliés, comme François de Rugy et Barbara Pompili, des proches de François Bayrou dont sa première adjointe à Pau et encore deux juppéistes. Enfin, voici une candidature qui devrait faire couler plus d'encre que d'autres, celle de Gaspard Gantzer. Le conseiller de François Hollande a été investi en Ille-et-Vilaine. Surprise pour la socialiste Gaëlle Andro : "Je ne m'y attendais pas du tout. Je n'imaginais pas qu'on puisse avoir un parachutage de la sphère un peu médiatico-politique parisienne sur cette circonscription", dénonce-t-elle au micro de franceinfo. Le cas Valls est réglé. C'est le "ni ni" : ni investiture accordée ni marcheur mis sur sa route à Évry. Neutralité bienveillante, ça devrait aussi se régler comme ça pour d'autres ex-ministres de l'ère Hollande.
Porte-ouverte aux Républicains
Y'a pas un truc qui cloche ? Richard Ferrand a anticipé notre question, lors de la présentation des candidats de La République En Marche aux législatives : "Vous allez me dire : '428. Il en manque'. Eh oui, il en manque. Et pourquoi il en manque ?" Et bien parce qu'Emmanuel Macron veut faire exploser les Républicains. C'est clair, c'est assumé : 577 - 428 = 149 places à prendre. La porte est ouverte pour tous les LR qui voudraient marcher vers Macron. La nomination du Premier ministre, lundi, pourrait accélérer l'hémorragie.
Aujourd'hui, l'embarcation penche légèrement à gauche avec 24 députés sortants investis, issus quasi exclusivement du PS + l'homme qui a murmuré pendant trois ans à l'oreille du président, Gaspard Gantzer. Les Républicains résisteront-ils à l'appel ? Florence Portelli, la porte-parole des Républicains, résiste : "C'est net, il est dans la continuité de François Hollande. On en a la preuve ce soir. Et j'espère que cela dissuadera certains d'aller écouter et entendre les sirènes d'En Marche", a-t-elle déclaré à franceinfo.
Les seconds couteaux de la hollandie sont investis par #enmarche car moins voyants mais la continuité est bien assurée @lesRepublicains
— Florence Portelli (@FloPortelli) 11 mai 2017
En tout cas, il y a du Sarkozy dans les débuts d'Emmanuel Macron. "Moi président, je ne serai pas chef de parti", c'était une partie de l'anaphore de François Hollande en 2012. Avec Emmanuel Macron, c'est le patron qui tranche et qui arbitre en dernier ressort. Richard Ferrand son bras droit, le reconnaît volontiers. "Vous savez, dans son infinie sagesse, la commission nationale d'investiture a saisi le président élu de la République de quelques cas particuliers, explique-t-il. On s'est dit qu'il fallait bien calibrer la réponse." C'est donc Emmanuel Macron qui a tranché et qui tranchera. Le 8e président a les mains dans le cambouis. Pas très jupitérien tout ça. Jupiter est une planète très très éloignée d'Emmanuel Macron.
Mélenchon, parachute confirmé à Marseille
Marseille c'est plus près et c'est l'autre info du jour. Les insoumis ont validé le parachutage de Jean-Luc Mélenchon dans la 4e circonscription de Marseille, en centre-ville, par 207 voix contre 1. Il se retrouvera donc bien face au socialiste Patrick Mennucci. Veut-il affaiblir le PS ? Non, il est plus clair que ça. C'est la guerre totale. Il veut "le remplacer".
#legislatives2017 "Je ne veux pas affaiblir le PS, je veux le remplacer" répond Mélenchon qui se présente face au député PS sortant Mennucci pic.twitter.com/wibKEmqfRG
— franceinfo (@franceinfo) 11 mai 2017
Voici ce qu'il a déclaré au micro de franceinfo : "Oui, nous allons tourner la page des gens qui nous ont trahis pendant cinq ans. Nous allons tourner la page des gens qui ont imaginé la déchéance de la nationalité. Nous allons tourner la page des gens qui ont fait la loi El Khomri. Nous allons tourner cette page, en effet !" Et puis une confirmation : l'humoriste et imitateur Gérald Dahan défendra les insoumis dans la 10e circonscription des Hauts-de-Seine.
La note du débrief : 11/20 pour En Marche
La note des couacs : 11/20 pour le doc de presse transmis aux rédactions par En Marche. C'est nouveau, mais ce n’est pas toujours pro. Un document truffé de petites erreurs, notamment la présence de Mourad Boudjellal, homme d'affaires et président du RCT, Stéphane Saint-André, député PRG du Pas-de-Calais, François Pupponi, député socialiste du Val-d'Oise qui avait pourtant demandé l'investiture du PS, comme il l'a affirmé à franceinfo. Quelques exemples de couacs qui font plus En Marche arrière qu'En Marche avant !
#legislatives2017 #REM fait parvenir une 2eme liste de candidats à cause de "plusieurs erreurs matérielles - dues à des fusions de fichiers" pic.twitter.com/D7TfUZpT9c
— franceinfo (@franceinfo) 11 mai 2017
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