Cet article date de plus de cinq ans.

Le décryptage éco. Grève numérique chez Uber avant l'introduction en bourse

Les chauffeurs se déconnectent et font pression avant l’introduction en bourse d’Uber prévue vendredi. Le décryptage de Fanny Guinochet ("L'Opinion").

Article rédigé par franceinfo - Fannt Guinochet
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Les chauffeurs Uber se déconnectent de leur application en signe de protestation contre leurs conditions de travail. (JEAN-CHRISTOPHE BOURDILLAT / RADIO FRANCE)

Des piquets de grève numériques : le large mouvement de grève chez Uber qui a démarré mercredi 10 mai est inédit. A New York, San Francisco, Chicago, Montréal et Londres, ils se déconnectent de l'application et de la plateforme pendant plusieurs heures, tous en même temps. Les chauffeurs veulent montrer la grande différence entre leur statut très précaire, leurs conditions de travail difficiles, leurs salaires très bas et les sommes d’argent gigantesques qui vont être investies lors de l'introduction en bourse d’Uber dont on parle depuis plusieurs mois et qui est prévue vendredi à Wall Street.

Une valorisation attendue de 90 milliards de dollars

Le géant des VTC espère encore lever des milliards de dollars demain. Même si Uber a un peu revu à la baisse ses prétentions et son cours de bourse, qu’on estime autour de 50 dollars – un peu moins de 45 euros – c’est une des plus importantes opérations du genre qui devrait se faire à Wall Street puisqu’Uber vise une valorisation de presque 90 milliards de dollars, environ 80 milliards d’euros.

Cette grève numérique pourrait gâcher la fête. À un moment où les entreprises sont jugées sur leur réputation, ce mouvement fait mauvais effet. Difficile d’estimer encore l’impact réel, mais cela pourrait faire fuir certains investisseurs potentiels. Surtout si la grève s’étend encore dans plusieurs grandes villes. Au total, le groupe américain compte trois millions de chauffeurs à travers le monde.

Des conditions de travail qui restent difficiles

Pourtant, Uber avait bien identifié ce risque "sociétal" : ces derniers mois, le géant américain n’a pas arrêté d’assurer que les chauffeurs étaient mieux traités, que sa politique à leur égard avait changé, par exemple, en disant que plus de 300 millions de dollars de primes exceptionnelles ont été versées à plus d'un million de conducteurs, que les conducteurs ont le droit désormais de recevoir des pourboires, etc.

Malgré des améliorations, les conditions de travail sont toujours difficiles pour les chauffeurs. En France, en janvier, Uber avait dévoilé le revenu horaire d’un chauffeur. La société américaine d’habitude si secrète, s’était livrée à une opération de transparence qu’on ne lui connaissait pas. Elle avait expliqué qu’un conducteur qui se connecte à sa plate-forme gagne en moyenne 9,15 euros net de l’heure. Mais les syndicats de chauffeurs avaient contesté ces chiffres.

Il faut reconnaître à Uber sa volonté de faire des efforts, en travaillant par exemple avec Axa pour mettre en place une protection sociale, des assurances pour les chauffeurs. Cela n’enlève pas le fond du "business model" qui continue de faire débat : les chauffeurs ne sont pas considérés comme des salariés Uber est d’ailleurs régulièrement attaqué en justice par des chauffeurs qui demandent des requalifications de contrats 

Et Uber n’est toujours pas rentable. Le groupe fait état d'une perte nette d'environ un milliard de dollars au titre du premier trimestre (890 millions d’euros environ) sur un chiffre d'affaires d'environ trois milliards de dollars (2,7 milliards d’euros environ). Autant dire qu’il est toujours sous forte pression pour réduire ses coûts.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.