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Le décryptage éco. Les bonus des grands patrons peuvent-ils être encadrés ?

Le patron de Technip part avec 14 millions d’euros, alors que le groupe a enregistré presque deux milliards de pertes. Cela suscite un tollé. Le décryptage de Fanny Guinochet ("L'Opinion").

Article rédigé par franceinfo - Fanny Guinochet
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
La patron de Technip, Thierry Pilenko, lors d'une conférence de presse à Paris, le 25 février 2016. (FRANCOIS GUILLOT / AFP)

Technic a beau afficher près de deux milliards de pertes, son patron Thierry Pilenko quitte ce groupe parapétrolier avec 14 millions de d'euros. Ce qui provoque colère et incompréhension dans l'opinion.

La question d'encadrer le salaire et les bonus des patrons se pose à chaque affaire de ce type. Souvent, c’est la pression de l’opinion publique, médiatique, mais aussi politique qui joue les juges de paix. Souvenez-vous de Georges Plassat, le patron de Carrefour, qui avait dû renoncer à son indemnité de départ l'année dernière, alors qu’il laissait un groupe qui faisait un vaste plan social. C’est parce qu’il était montré du doigt qu’il s’était ravisé. Le patron de Technip va-t-il faire pareil alors que Bruno Le Maire, le ministre de l’Économie, s’est dit hier choqué, évoquant : "Des comportements inacceptables et intolérables" ?

"Le say on pay" dans Ia loi 

Depuis fin 2016, il y a la loi Sapin 2 qui oblige les actionnaires à voter les rémunérations des dirigeants dans toutes grandes entreprises.Ces votes sont maintenant contraignants et pas uniquement consultatifs. C’est simple : pas d’approbation des actionnaires, pas de rémunération, de variables, de prime exceptionnelle, etc. Souvent, ces packages choquent, comme celui de Technip, mais en fait, ils ont été décidés tout à fait légalement.

Il n’y a donc pas de plafonnement des salaires des patrons dans la loi. Elle ne donne pas de grille de salaire à suivre. On est dans un capitalisme ouvert, en plus, ce serait juridiquement compliqué. La loi Sapin 2 laisse la main aux actionnaires : les salaires peuvent continuer à être très élevés mais à condition, et seulement à condition, qu’ils aient été votés en assemblée générale, que la composition de la rémunération – entre les bonus, les parts variables, les retraites chapeaux etc. –, soit bien détaillée, que ce soit parfaitement transparent.

C’est ce qu’on appelle le "say on pay" , l’expression est anglo-saxonne, parce qu’on s’est inspiré de ce qui se fait à l’étranger. C’est ce "say on pay" qui est inscrit dans la loi Sapin.   

Un changement en douceur des comportements  

On manque un peu de recul, mais on voit que les actionnaires sont plus regardants, plus sévères, ils osent s’opposer à des rémunérations trop élevées, qu’ils jugent pas toujours justifiées au vu des performances, ou pas morales. Plusieurs dirigeants ont ainsi dû revoir à la baisse leurs prétentions : cela a été le cas de Carlos Ghosn l’ancien patron de Renault. Les comportements commencent à changer mais doucement. C’est tout le pari d’ailleurs du Medef et de l’Afep, l’association des grandes entreprises de France, qui réunit le CAC40 et qui ont mis en place un code, une charte de bonnes pratiques, un code d’éthique. Pour eux, la régulation suffit à faire son œuvre.

Reste qu’il y a quand même quelques abus : dans l’affaire Technip, le patron du Medef , Geoffroy Roux de Bézieux n’est d’ailleurs pas très à l’aise. Il s’est dit contre "la prime à l’échec" mais pour le moment, il n’a prévu de revoir, ni durcir le code. La loi Pacte de Bruno Le Maire prévoit que les grandes entreprises rendent publics les écarts de salaires, entre le plus faible et le plus élevé. Mais c'est un peu différent. Elle est encore en discussion au Parlement.

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