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Va-t-on vers la fin du salariat ?

Moins de salariés, plus d’auto-entrepreneurs, d’intérimaires ou de contrats précaires, le monde du travail connaît une mutation sans précédent, selon le dernier rapport de l’organisation international du travail, publié hier. Au point que certains économistes se demandent si on ne va pas vers la fin du salariat ?
Article rédigé par Vincent Giret
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
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Oui on parle d’une mutation, d’une révolution, d’une transformation en fait du travail tel qu’on l’a connu depuis la fin du XIXème siècle et l’invention du salariat. On a longtemps cru, malgré la crise, que la salariat était l’avenir du travail, la forme la plus civilisée, la plus aboutie, la plus conforme à une certaine idée du progrès social. On voyait d’ailleurs chaque année le nombre de salariés progresser dans les statistiques, notamment grâce au développement économique rapide de larges régions du monde, en Asie par exemple. Le salariat, c’est encore, une vision venue de l’ère industrielle, et une réalité sécurisée du contrat du travail, sous la forme d’un CDI avec des garanties et des protections sociales qui lui sont attachés, en matière de santé ou de retraite par exemple. Et bien, c’est cette réalité-là qui est mise en question aujourd’hui, par le rapport passionnant que vous évoquiez. Ce rapport, intitulé Les modalités d’emploi en pleine mutation , nous montre qu’en dépit de son essor dans certaines régions du monde, l’emploi salarié ne représente que la moitié de l’emploi total dans le monde aujourd’hui.

Mais par quoi, par quels types de contrats sont remplacés les emplois salariés ?

"Nos chiffres, disent les experts de l’OIT, révèlent un monde du travail de plus en diversifié ".  Ce travail diversifié, c’est quoi, il révèle en fait deux réalités assez contradictoires : d’un côté, il y a une tendance nette, aussi en raison de la crise, à la précarisation du travail et des contrats, un temps partiels subis, la multiplication de contrats courts, voire très courts et la progression de ce qu’on peut appeler le travail informel. Mais de l’autre coté, il y a aussi, une réalité émergente qui n’est plus vraiment subie, mais choisie elle, avec le développement fulgurant des auto-entrepreneurs par exemple, dans les pays occidentaux, et notamment en France où près d’un million de personnes vivent déjà cette réalité. Un salarié français sur trois n’est pas en CDI, et plus de deux millions d’hommes ou de femmes exercent plusieurs activités, salariés ou non salariés.

Quels sont les défis, Vincent, de cette mutation du travail ?

Ces défis sont multiples : tout notre système social repose encore largement sur des parcours traditionnels, avec une très faible mobilité et une continuité de statut. Et du coup, ces nouvelles formes de travail, comme le travail indépendant, sont moins protégées, notamment en matière de retraite. C’est donc tout un système qu’il nous faut repenser. Le développement des carrières protéiformes, l’individualisation très forte du travail, vont nous pousser à inventer de nouvelles formes de sécurisation des parcours professionnels, avec des droits nouveaux, notamment en matière de formation. Ça serait vraiment bien que responsables politiques et les partenaires sociaux commencent à s’en occuper. Parce que dans les années qui viennent, très vite, le travail va changer comme jamais depuis la dernière révolution industrielle.

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