Attaque de l'Iran contre Israël : "Téhéran avait besoin de démontrer une forme de crédibilité", explique Frédéric Encel
"Téhéran avait besoin de démontrer une forme de crédibilité après les coups très durs portés par l'armée israélienne sur ses chefs des Gardiens de la Révolution", affirme dimanche 14 avril sur franceinfo Frédéric Encel, docteur en géopolitique et maître de conférences à Sciences Po Paris, après l'attaque lancée par l'Iran contre Israël cette nuit. Ces frappes démontrent, selon lui, "une sorte de retenue" de la part de l'Iran, qui avait prévenu "la quantité des [missiles], leur heure d'arrivée et de départ, alors qu'ils n'avaient pas encore atteint le territoire israélien". Le spécialiste s'attend par ailleurs à une "réponse graduée" de la part de l'État hébreu.
franceinfo : Comment interprétez-vous cette attaque ?
Frédéric Encel : C'est inédit. L'Iran est dirigé par des fanatiques au dernier degré [...] pour autant ce ne sont pas des crétins. Ils jaugent les rapports de force de manière extrêmement fine. Téhéran avait besoin de démontrer une forme de crédibilité après les coups très durs portés par [l'armée israélienne] sur ses chefs des Gardiens de la Révolution, non seulement en Syrie mais également sur le Hezbollah au Liban ces dernières semaines. Donc retrouver une forme de crédibilité tout en ne propulsant "que" plusieurs centaines d'engins, dont la plupart ne sont même pas dotés de système de guidage. Cela ne signifie pas qu'il ne s'agit pas d'une attaque sérieuse qui n'appellera pas à une riposte israélienne. On reste dans un schéma de gradation pour l'instant, me semble-t-il, sous contrôle.
Assiste-t-on, selon vous, à une forme de retenue de la part de l'Iran ?
Oui, il y a une sorte de retenue. Ils ont donné pratiquement la quantité des engins, l'heure de départ et d'arrivée, alors qu'ils n'avaient pas encore atteint le territoire israélien. À l'ONU, la délégation iranienne indiquait qu'en vertu de l'article 51, elle avait riposté et que dorénavant l'attaque était terminée. On a vu des attaques plus massives et plus meurtrières. Le problème maintenant pour l'Iran, après avoir tenté de retrouver une forme de crédibilité après les coups qu'ils ont reçus, c'est que le roi est nu. Les Américains et les Israéliens ont démontré que leur capacité anti-missiles était extrêmement solide, que leur alliance était solide. Et cerise amère sur le gâteau pour l'Iran : non seulement la Jordanie, les Émirats arabes unis et l'Arabie saoudite ne basculent pas dans le camp iranien, mais ils ont affirmé avoir intercepté eux-mêmes des missiles iraniens.
À quelle réponse israélienne vous attendez-vous ?
À une réponse graduée. On a entendu Joe Biden insistant sur le fait que les États-Unis protégeraient Israël d'une attaque iranienne, mais que les États-Unis ne souhaitaient pas que la riposte israélienne soit "disproportionnée". Tout est dans la nuance. On peut très bien imaginer une riposte israélienne à la manière de ce qui s'est passé le 1er avril, c'est-à-dire sur de hauts responsables politiques et militaires des Gardiens de la Révolution, mais pas nécessairement sur le sol iranien, mais par exemple sur une base militaire.
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