Ael Pagny : "dans la photographie, chacun interprète les images comme il veut, et les ressent comme les chansons."

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Vendredi 20 décembre 2024 : la photographe Ael Pagny. Elle vient de publier son premier ouvrage de photographies : "Pagny par Ael", aux éditions HarperCollins.
Article rédigé par Elodie Suigo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 6min
Ael Pagny, vendredi 20 décembre (FRANCE INFO / RADIO FRANCE)

Dans la famille Pagny, si on demande la fille, c'est Ael. Une photographe qui aime pourtant se placer loin des clichés depuis son enfance. C'est d'abord à l'aide de son téléphone portable qu'elle a découvert ce métier en capturant des instants et moments de vie de l'adolescence. Une adolescence atypique avec, tout comme sa mère et son père, une réelle envie d'être indépendante, autonome et donc de grandir vite. À 16 ans, elle est donc partie en internat et a pris son envol pour New York. Elle a passé cinq ans dans une école d'art dans laquelle elle a étudié la photographie. Aujourd'hui, à 25 ans, elle publie son premier ouvrage Pagny par Ael aux éditions HarperCollins.

franceinfo : Ce livre est une déclaration d'amour à celui qui s'est attelé à vous donner la vie, vous élever avec ses valeurs, son regard sur le monde depuis la Patagonie de votre mère. C'est votre père, Florent Pagny, qui ouvre ce livre et il vous remercie d'avoir été là, et d'avoir été la présence et la pudeur. N'est-ce pas ce qui le définit avant tout ?

Ael Pagny : Oui, c'est vrai que cela le définit et ça nous définit aussi en tant que famille. Après, ça doit être aussi dans notre ADN d'être pudique et présent.

Votre père a eu 60 ans, donc l'envie de faire la tournée qui allait avec. C'est naturellement de concert, sans vilain jeu de mots, que vous avez décidé que vous seriez présente et que vous alliez être la mémoire de cet événement. Est-ce difficile de photographier son propre père ?

Justement, comme je suis quelqu'un d'assez réservé et timide et que je prends des photos pour ne pas avoir à parler, le faire avec mon père a fait que je suis restée dans ma zone de confort un peu plus parce que c'est la famille et que j'ai l'habitude. Après, ce qui est difficile c'est de trouver le bon moment et la situation.

"Mon père est le même à la maison que sur scène ou à la télévision. Il n'y a vraiment pas de séparation. Il a toujours été très honnête et fidèle à lui-même."

Ael Pagny

à franceinfo

Quand vous êtes partie en tournée avec votre père, il y a eu cette annonce qui a bouleversée les Français. On a appris que l'homme qu'on considérait, comme étant indestructible, était atteint d'une maladie. Il y a une photo qui est poignante, c'est celle où il passe ce fameux scanner. Et on comprend à travers cette photo à quel point lui, dès le départ, il était déterminé. Cela vous a touché qu'il soit aussi fort ?

Ça m'a touchée, mais ça ne m'a tant surprise parce qu'il reste fidèle à lui-même et c'était évident pour lui de le partager. Ce n'est pas facile à cacher et même si on est pudique, c'est une réalité qui ne touche pas que lui, mais beaucoup de personnes. On était content de voir que les gens s'y retrouvaient et se sentaient moins seuls. Pour lui, c'était évident de le partager, mais on a vu l'effet que ça avait et on s'est quand même dit : "En fait, ce n'est pas si évident que ça de partager quelque chose de si triste".

On a l'impression que ça a changé votre vision de la vie, que vous avez pris conscience qu'il fallait profiter de l'instant présent. Vous dites d'ailleurs : "L'équipe s'est recomposée" à travers cet ouvrage.

Après, on a toujours été, tous les quatre, une équipe et une famille très soudée, donc ce n'était pas difficile pour nous de rester ensemble et de le vivre ensemble. Oui, ça a bien renforcé qui on était.

"On a tendance à vivre le présent tel quel, mais c'est sûr qu'avec cette maladie, on vit le présent encore plus et qu'on essaie de ne pas trop se projeter en avant parce qu'on ne sait jamais ce qui va arriver."

Ael Pagny

à franceinfo

La photo la plus forte de cet ouvrage, c'est celle où il est en haut du phare au Mont Saint-Michel. Il y a un corbeau et vous l'évoquez en disant que c'est la malédiction qui s'enfuyait. Cette photo est très symbolique.

C'est ma photo préférée par sa composition et la chance que j'ai eue de pouvoir la capturer dans la géométrie de l'image. Mais c'est vrai que oui, elle est très forte et j'aime bien qu'elle ait plusieurs interprétations, que chacun puisse en sortir, ce qu'il en veut. Mais c'est vrai que le corbeau noir dans l'image, ça donne envie de l'interpréter de cette façon, la malédiction qui s'en va. C'est aussi ce que j'aime dans la photographie, c'est que chacun interprète les images comme il veut, il les ressent comme les chansons.

Il y a plusieurs raisons pour lesquelles il a réussi à se battre. Son caractère et puis sa famille, le public qu'il aime terriblement et la scène. On comprend à travers vos photos à quel point la scène, c'est ce qui lui donne une vraie raison de vivre. C'est sa plus grande cour de récréation.

Oui, la synchronicité d'amour qu'il a reçu de ses fans, du public ou des gens de la France en général, ça se ressentait avec tous les messages, tous les commentaires, toutes les vibrations. Mais c'est vrai, que quand il est remonté sur scène, l'énergie du public était vraiment d'un haut niveau. Même si son public a toujours été hyperchaleureux et présent, quand il est remonté sur scène, on sentait ce soulagement de le revoir sur scène et pour lui ce soulagement d'être sur scène et la joie partagée, c'était beau à vivre.

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