"Ce n'est pas un hasard si pendant cinq décennies, Johnny Hallyday a uni tous les Français" : Yvan Cassar perpétue la mémoire de l'icône

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Jeudi 11 janvier 2024 : Yvan Cassar, compositeur, pianiste, arrangeur et le directeur musical. L'album "Johnny Symphonique" est réédité avec cinq versions inédites et revisitées et le "Johnny Symphonic Tour" reprendra la route en mars 2024.
Article rédigé par franceinfo, Elodie Suigo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 6min
Yvan Cassar compositeur, pianiste, arrangeur et le directeur musical. (FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

Yvan Cassar est compositeur, pianiste, arrangeur et le directeur musical de nombreux artistes. Cela fait 30 ans qu'il accompagne les plus grands chanteurs et chanteuses français comme Mylène Farmer, Claude Nougaro, Roberto Alagna, Vangelis, Céline Dion, Jacques Dutronc, Florent Pagny ou encore un certain Johnny Hallyday. Johnny a été l'une de ses plus belles rencontres et aventure humaine en tant que directeur musical. Il a d'ailleurs créé pour lui rendre hommage la tournée Johnny Symphonic Tour, qui sera donc de retour en mars 2024. Et puis, il y a l'album Johnny Symphonique avec cinq versions inédites et revisitées, parmi lesquelles Gabrielle avec Greg Zlap, J'ai oublié de vivre ou encore Derrière l'amour.

franceinfo : Johnny était-il unique ?

Yvan Cassar : Je crois. Parce que cette force vocale, ce charisme, ces possibilités, cet instinct, cet acteur chanteur, enfin, il est vraiment unique. Et ce n'est pas un hasard si pendant cinq décennies, il a uni tous les Français, toutes les générations. C'est unique et je suis heureux d'avoir croisé sa route à un moment donné.

Il y a eu un seul maître mot dans tout le travail que vous venez d'effectuer sur Johnny Hallyday, c'est le mot fidélité. Comment pouvons-nous rester fidèles à Johnny Hallyday ?

Ce projet aurait été plus simple s'il avait été juste à côté de moi. Je me suis mis une telle pression que c'était très dur, et parfois pour tout le monde. J'étais dedans et je suis allé jusqu'au bout du bout parce que je l'ai vraiment eu dans ma tête pendant plusieurs années quand je travaillais sur toutes ses voix, que je l'écoutais et que je découvrais toutes ses merveilles. Ce qui est génial, c'est qu'il y a eu beaucoup de fois où un ordinateur, un magnéto à bandes, enregistraient ses performances. C'est vraiment la chance que nous avons eue, j'ai découvert des merveilles.

Il y a beaucoup de points communs entre vous, notamment l'amour de la musique. À quel âge rencontrez-vous la musique ?

Je la rencontre vers huit, neuf ans. Dès cinq, six ans, mes parents se doutent que j'aime vraiment ça parce que ça me calme. Ils se disent : "Tiens, on va lui mettre de la musique, il va être un peu plus tranquille".

"À partir de huit, neuf ans, la musique me tombe dessus et là, elle ne m'a plus quitté."

Yvan Cassar

à franceinfo

Votre père était batteur. Est-ce que c'est le point de départ ?

Oui, c'est le point de départ parce qu'ils se sont rendu compte que dès qu'il jouait un peu de batterie, je me mettais à côté, comme ça, je ne bougeais pas et je l'observais. Et après, je prenais la batterie et je faisais un peu n'importe quoi, mais il se disait : "Il a un instinct pour la musique c'est sûr ".

À 21 ans, vous allez découvrir la composition et l'écriture au Conservatoire national supérieur de musique de Paris. Est-ce que vous avez compris assez vite que l'arrangement et la composition allaient être effectivement deux domaines dans lesquels vous alliez pouvoir vous épanouir ?

Je suis le premier surpris de ça, c'est-à-dire que j'aimais la musique classique, mais j'aimais le jazz, j'aimais la pop, le rock, j'aimais tout et j'aimais surtout plus que tout, travailler avec des chanteurs.

"Je suis un amoureux inconditionnel de la voix. C'est ça qui me transporte."

Yvan Cassar

à franceinfo

Je pensais être chef d'orchestre, faire de la musique de cinéma, travailler à l'opéra et puis finalement, quelques chansons, un arrangement plus tard, j'ai aimé faire ça. C'est finalement, un peu malgré moi, que je me suis abandonné dans la composition et dans de la musique de film ou l'opéra. Maintenant, j'essaie d'y revenir et de diriger un peu plus parce que ça me rattrape. Mais j'ai tellement vécu de choses uniques que j'étais heureux de servir ces interprètes d'exception. Bien sûr.

Il y a une autre rencontre qui a été extraordinaire pour vous, c'est celle avec Vangelis. Cette rencontre a aussi changé le cours de votre vie ?

Oui, elle est fédératrice. Pour moi, elle est vraiment très importante parce que Vangelis, c'était exactement mon opposé, c'est-à-dire que c'était un autodidacte absolu qui connaissait bien la musique classique, qui était capable de la jouer. Ça m'a montré aussi ce que c'est que la force de l'autodidacte, la force de l'instinct. Toutes ces grandes personnalités ont un instinct exceptionnel, elles font confiance à leur instinct. Moi, empreint de toute cette culture classique, avant de se trouver bon, il y a du chemin. Et eux, ils sont dans ce geste, ils y croient, ils aiment, ils y vont, ils y vont à fond.

Quelle est la part d'instinct chez vous ? Vous faites-vous confiance ?

J'ai envie de vous dire que : "Non". Maintenant, je sais mieux me dire : "Stop, c'est bien". Pendant des années, je faisais des arrangements et on avait la séance de cordes à 10 h et j'envoyais, à l'époque il n'y avait pas Internet, des fax avec mes partitions à mon copiste à 3 h à 4 h du matin, parce que tant que j'avais encore cinq minutes, j'y allais, je continuais. Maintenant, je suis un peu plus raisonnable. J'ai vieilli. Mais j'ai toujours encore ce stress en me demandant : "Est-ce que je ne peux pas faire mieux ?" Il faut que j'aille plus loin et je pense que c'est important parce qu'on peut toujours aller plus loin. Finalement, il y a toujours cette dernière prise où on se dit : "Ben, non, ce n'est rien" et vous vous retrouvez avec 80 % de l'enregistrement où c'est la dernière. Il faut s'accrocher.

Avec et pour Johnny, vous avez fait notamment le Stade de France en 1998, le concert à la Tour Eiffel, le Parc des Princes en 2003. La première fois qu'il vous a vu, il vous a dit : "Toi, tu n'es pas très rock 'n’ roll". L'êtes-vous devenu ?

Je ne sais pas si je suis devenu rock 'n' roll. J'ai un peu progressé. En tout cas, je connais bien le rock 'n' roll, mais en fait, je suis un peu furieux et je pense que furieux égal rock 'n' roll.

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