Henri Dès : "Le temps passe et il faut faire avec"
Henri Dès est cet auteur, compositeur et interprète francophone, ami de plusieurs générations d'enfants devenus adultes et toujours aussi fans malgré le temps qui passe. C'est Salvatore Adamo qui lui a donné envie de venir à Paris et de s'essayer à affronter les terrasses de café et les petits cabarets de la rive gauche. Au départ, il y a eu des disques pour les adultes, ensuite des disques pour les enfants. Et là, Henri Dès est de retour avec des disques pour les adultes, dans cette mini-collection Autrement. Le troisième volet s'appelle En avant toutes !
franceinfo : Vous revenez finalement à vos premières amours.
Henri Dès : Oui, enfin mes premières amours... C'était un petit peu une obligation. Je ne savais même pas à ce moment-là que j'allais pouvoir faire une chanson pour enfants. C'était un truc un peu particulier pour moi. J'écrivais des chansons pour les adultes. Et puis un jour, j'ai eu un fils et ce fils, quand il a eu cinq ans, je lui ai écrit une chanson parce que sa petite sœur est arrivée au monde. J'ai écrit une chanson qui s'appelle Ma petite sœur est jolie. Il la chantait tout le temps avec moi et j'ai voulu garder un souvenir de sa voix, mais je ne voulais pas que ça aille plus loin. Je ne pensais pas que ça irait plus loin, mais ce sont mes amis qui m'ont dit : "Écoute Henri, il y a quelque chose dans ces chansons, vas-y, continue".
Même ici, à franceinfo, quand la rédaction a su que vous veniez, il y a eu énormément d'enthousiasme. Ça vous touche ? Vous avez accompagné plusieurs générations encore aujourd'hui, ils sont fans de vous.
Oui. Quand je vois ce qui se passe pour moi, je regarde un peu autour de moi. Je me dis qu'il y a beaucoup de chanteurs qui font des choses complètement éphémères et qui vont disparaître et être oubliés très rapidement. Et là, il se trouve que ce n'est pas le cas.
"Maintenant, en concert, je me retrouve devant quatre générations avec, devant moi, un grand-père qui a mon âge, aux alentours de 80 ans, son fils qui a 55, son fils ou sa fille qui a 30 et son fils ou sa fille qui a cinq ans donc voilà, ils se retrouvent à la sortie du spectacle."
Henri Dèsà franceinfo
C'est Salvatore Adamo qui vous repère en premier et ça vous donne envie de venir à Paris, de vous essayer aux terrasses de café. C'est sans doute le public le plus difficile. Vous avez appris votre métier comme ça, justement, en affrontant le plus difficile pour commencer.
Oui, c'est ça. C'est vrai que j'avais deux ou trois amis ici à Paris, et j'ai demandé : je fais quoi avec ma guitare ? "Mais tu vas à la Contrescarpe, tu restes devant le bistrot sur la place avec ta guitare et là il y a des artistes qui passent. Tu verras, si jamais le patron est embêté parce qu'il y a un artiste qui a pris un peu de retard, il va t'appeler parce que tu as une guitare". Il te dira : "Viens, chante trois chansons comme ça, je peux savoir ce que tu sais faire". C'est ce que j'ai fait. Je suis monté sur scène et j'ai chanté deux trois trucs et puis il m'a dit : "Bon d'accord" et j'ai fait quelques semaines à la Contrescarpe.
Cet album démarre avec le titre Passe le temps. Quel est votre regard sur le temps qui passe alors ?
Je peux en parler parce que je pense que tout le monde ne sait pas, mais je suis mort une première fois et je ne suis pas mort donc en fait, j'ai pu vivre ma mort. On s'aperçoit que le temps passe rapidement. Quand j'ai donné ce disque à ma fille, elle a pleuré sur cette chanson parce que tout d'un coup, elle s'aperçoit que le temps passe. Elle arrive bientôt à la cinquantaine et puis elle voit ses enfants partir de la maison et ça lui fait peur un peu. Cette chanson-là, ne fait pas peur, mais disons que ça vous met les pieds en place pour vous dire : "Voilà, le temps passe et il faut faire avec".
Le fait justement de ne pas être passé loin, est-ce que ça a changé votre vision et votre regard sur la vie ?
J'ai eu l'impression que la vie me donnait une pièce de plus à mettre dans le bastringue et autant bien en profiter ! En fait, j'ai eu la chance de m'en sortir grâce à mon amie Nathalie qui m'a fait un massage cardiaque qui a duré neuf minutes. Après, j'ai eu envie de revenir bien. J'ai eu une discipline de vie extrêmement sévère concernant mon sommeil, mon alimentation et c'est peut-être pour ça que je tiens encore bien le coup.
Je voudrais que vous me parliez de la chanson L'adieu. Elle est très particulière dans cet album, elle a vraiment une dimension extraordinaire.
Mon épouse m'a quitté il y a maintenant six ans et quand elle m'a quitté, évidemment, c'était une grande douleur. On a vécu 55 ans ensemble. C'est elle qui m'a accompagné à Paris quand les moments étaient difficiles. Elle ne m'a jamais dit : "Non, non, ce mot, tu ne peux pas le dire, je n'aime pas ça". Elle écoutait et ne disait rien. Rien que le fait qu'elle ne dise rien, je comprenais dans ses yeux qu'elle avait aimé quelque chose là-dedans et que je pouvais aller jusqu'au bout. Quand ma femme est décédée, c'était pour moi une espèce de trou béant, terrible et j'ai fait cette chanson qui s'appelle L'adieu. Cette chanson raconte un petit peu ce qui s'est passé à l'hôpital quand on s'est retrouvé toute la famille autour de son lit. On savait qu'elle allait partir et on est tous allés l'embrasser. Et c'est un peu ça qui m'a donné envie d'écrire cette chanson.
Dans cet album justement, on a le sentiment que l'écriture est différente, mais en fait, c'est le sujet qui change. Je crois que c'est la première fois que vous vous livrez autant.
"Pour les chansons pour enfants, j'essaie de comprendre leur monde et je raconte leurs petites peines, leurs blagues etc. Dans cet album, je raconte mon monde, je raconte ma vie et mes peines."
Henri Dèsà franceinfo
C'est toujours la musique qui m'a amené l'idée des chansons. J'écris la musique et la chanson vient... Quelques mots viennent se coller. Là, pour ces chansons, ça a été uniquement les mots. Et tout d'un coup, ils sont arrivés. Ça ne pouvait pas raconter une histoire à des enfants parce qu'ils n'auraient pas compris, ils n'auraient pas eu assez de vécu pour comprendre. Pour les chansons pour enfants, j'essaie de comprendre leur monde et je raconte leurs petites peines, leurs blagues etc. Là, je raconte mon monde, je raconte ma vie et mes peines.
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