"Il était tellement original et tellement attachant" : Didier Barbelivien revient sur son amitié avec Christophe
L'auteur, compositeur et interprète Didier Barbelivien est l'invité exceptionnel du Monde d'Élodie toute cette semaine. Depuis 1970, il a écrit et composé plus de 2 000 chansons. Son dernier album, Didier Barbelivien, qu’il présente comme étant son ultime album en tant qu'interprète est sorti en octobre 2022. Pendant cinq jours, à presque 70 ans, il remonte le fil de sa vie en évoquant ses souvenirs autour de quelques-unes de ses collaborations comme avec Julien Clerc, Gérard Lenorman, Christophe ou encore Johnny Hallyday.
franceinfo : Vous avez écrit au total plus de 2000 chansons. Que ce soit pour vous avec À toutes les filles, Il faut laisser le temps au temps ou que ce soit pour les autres : Et tu danses avec lui pour C. Jérôme, Est-ce que tu viens pour les vacances pour David et Jonathan ou encore On va s'aimer pour Gilbert Montagné. Est-ce que chaque chanson correspond à des souvenirs précis ?
Didier Barbelivien : Toutes ces chansons ont une histoire. Tous les tubes ont une histoire. Vous parliez, par exemple, de Et tu danses avec lui eh bien, il faut savoir que c'est une chanson qu'on a égarée pendant huit ans. Au point que je l'avais totalement oubliée. Si C. Jérome ne m'avait pas retrouvé une maquette dans son tiroir, on n'aurait jamais entendu cette chanson.
Tout au long de votre vie vous avez écrit des chansons pour les autres et vous continuez aujourd'hui à vous mettre dans la peau des artistes pour lesquels vous écrivez. C'est difficile de rentrer dans la peau des gens, dans leur histoire ? Ça peut être lourd à porter.
"Les personnes pour qui j'ai écrit, ce sont des gens que j'ai aimés."
Didier Barbelivienà franceinfo
Non, parce qu'on y rentre par effraction sentimentale, c'est-à-dire qu'il faut aimer ces gens-là. Il faut avoir un déclic pour eux.
Il y a un artiste, effectivement, que vous allez aimer très fort et qui est très particulier dans votre parcours, c'est Christophe.
Oui, absolument.
J'aimerais que vous me racontiez cette rencontre très importante et marquante avec Christophe.
J'ai suivi Christophe dans toutes, j'ose appeler cela, ses pérégrinations parce qu'il était génial. Il passait de la chanson de variété vraiment basique, le tube de l'été à deux balles à des trucs sublimissime comme Le dernier des Bevilacqua. Je me suis toujours reconnu dans ce type de parcours.
Il vous manque ?
Oui, parce qu'il était tellement original et tellement attachant. Il nous est arrivé de ne pas nous voir pendant quatre, cinq ans et un soir, je le retrouvais à Pleyel et c'était comme si je l'avais quitté la semaine d'avant. Et je me disais quelle idée de reprendre Georges Brassens avec une guitare, Christophe et tout ! Alors en plein Pleyel, il avait sa façon de jouer Petite fille du soleil ou de rejouer Aline. Et après, dans la loge, je lui disais : mais Chris, il n'y a que quatre accords dans Aline bordel ! J'ai vu que tu t'es planté dans un truc. Mais c'était Christophe, il y avait... Je ne sais pas, c'était un monde, c'était un aquarium quoi. C'était un truc de fou.
Elle représente quoi cette chanson Petite fille du soleil ?
"Les circonstances de l'enregistrement et de la création de ‘Petite fille du soleil’ tiennent du miracle."
Didier Barbelivienà franceinfo
C'est Francis Dreyfus, son producteur, qui me chope à une terrasse et qui me dit : "C'est toi Barbelivien ?" Je réponds : oui, monsieur. Moi je suis intimidé, je ne sais même pas qui me parle. "Je suis le producteur de Christophe, est-ce que tu voudrais faire une chanson pour lui ?" Mais oui, monsieur, bien sûr, si je peux, "Il n'y a qu'un seul souci, il me la faudrait pour avant-hier". Je ne comprends pas, je crois qu'il se fout de moi. Il me dit : "Il faudrait que vous rentriez chez vous s'il vous plaît l'écrire tout de suite". Je rentre à la maison, j'écoute. Je ne peux pas dire que je tombe par terre parce que j'entends à peine la voix de Christophe qui fait la chanson. J'entends une bouillie, mais par contre, il y avait une ambiance musicale dans cette chanson.
J'écris ma chanson entre 18 heures et minuit. Le lendemain après-midi, je me pointe avec mon truc. J'avais écrit les paroles, Francis Dreyfus les lit et me dit : "C'est pas mal, on va l'essayer ce soir". Au moment de me quitter, il me dit : "Est-ce que tu peux m'appeler vers minuit ?" Je l'ai au téléphone et il m’invite à venir écouter ma chanson, Christophe est en train de l'enregistrer. J'arrive là-dedans, je pousse la porte du studio et j'entends : Petite fille du soleil. J'avais quand même une expérience de quelques studios où il y a une vitre qui sépare la cabine d'enregistrement de deux micros où se tient le chanteur. Et moi je cherche où est Christophe, je voudrais l'apercevoir et je ne le vois pas. Et la chanson se termine. Pas de Christophe. Et j'attends. Tout le monde est là et j'entends dire : "On va faire une deuxième prise" et j'entends une voix à travers un micro qui dit : "OK". Toujours pas de chanteur et j'attends. Le playback repart et ça recommence : "Petite fille du soleil... ". On arrive à la fin de la prise. Et là, qui je vois sortir de sous la console du studio ? Christophe avec une lampe électrique et un texte. Je me dis : ce n'est pas possible, il enregistre sous la console ? Il s'extrait, se lève et Francis Dreyfus lui dit : " Voilà, Didier Barbelivien", "Bonjour, ce n'est pas mal ta chanson, c'est pas mal" me dit-il. Et je pense : c'est pas mal, il la chante en entier, il n'arrête pas. Au final, il a peut-être encore fait deux prises et puis c'était fini.
Didier Barbelivien sera en concert le 2 novembre 2023 à Bressuire, le 5 à Marseille, le 8 à Lyon, le 12 à Lille, le 26 à Toulouse, le 1er décembre à Tours etc.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.