"Il y a des choses et des expériences qui mettent par terre" : Bernie Bonvoisin se met à nu dans son album "Amo et Odi"
Bernie Bonvoisin est un artiste pluridisciplinaire, acteur, écrivain, scénariste, réalisateur et chanteur. Il s'est illustré et a été reconnu avec le groupe de rock français Trust et le fameux titre Antisocial (1980). Les thèmes abordés au sein de ce groupe sont les dérives de la démocratie, le système capitaliste, les zones d'ombre, l'extrême-droite, les sectes, les violences du communisme soviétique. En bref, quand on dit Bernie Bonvoisin, on pense évidemment et d'abord à son côté cash et provocateur. Il sort vendredi 9 juin son nouvel album solo, intitulé : Amo et Odi.
franceinfo : Votre nouvel album Amo et Odi comprend 13 chansons. Chacune correspond à une émotion, à un sentiment. Pour la première fois, vous acceptez de vous raconter, limite de vous mettre en danger. Pourquoi aujourd'hui ?
Bernie Bonvoisin : C'est quelque chose de progressif. La démarche, à chaque fois, c'est d'être à la fois dans un univers de musique qui est la musique que j'écoute et puis dans une écriture, de trouver une écriture différente, de prendre des risques.
Est-ce que ce n'est pas justement ce qui a rendu ce projet différent, même si c'est le cinquième album, qui vous a mis dans une telle confiance que vous avez accepté de faire tomber quand même un peu l'armure ?
Oui, c'est de revenir à des choses qu'on aime comme les guitares acoustiques 12 cordes de George Harrison, ce type de choses quoi !
Piano-voix aussi, on vous découvre pour la première fois.
Je n'avais jamais fait ça. C'est David qui a fait le morceau. Vraiment, quand il m'a fait écouter, ma première réaction a été de lui dire : depuis toute ma life, j'attends un truc comme ça !
Le point de départ dans toute cette vie, ça reste la poésie.
C'est à la fois la possibilité d'essayer de faire les choses d'une manière différente et entretemps de s'enrichir de lectures, de choses qu'on voit. Il y a comme une espèce de brassage au moment où vous créez les choses.
"J'essaie toujours d'harmoniser ce que je pense avec ce que je fais."
Bernie Bonvoisinà franceinfo
Parfois, j'arrive à tout harmoniser, parfois, j'y arrive moins bien, d'autres fois pas du tout. En tout cas, il y a comme une espèce de but.
L'écriture permet aussi de raconter sa vie, son enfance, de se raconter. Elle permet aussi de dénoncer, de défendre ce qui vous correspond ou ce qui nous tient à cœur. C'est d'abord un moyen de faire avancer les choses ? Quelle est l'idée ? C'est de provoquer le débat ?
Oui, c'est qu'au moins qu'il y ait un débat, une concertation, un échange. Pas ce à quoi on assiste aujourd'hui, où il n'y a plus d'écoute, c'est ça qui est terrifiant. Les choses peuvent se construire et se faire. Il y a plein de choses qui se construisent juste par le fait qu'il y ait des gens qui ont cette approche des choses.
On a l'impression de vous découvrir enfant dans cet album. Est-ce que vous avez ressenti la même chose en écrivant les textes ?
Oui, il y a des choses et des expériences qui mettent par terre.
"L'écriture sur un projet comme 'Amo et Odi' se doit d'être au plus près de la peau."
Bernie Bonvoisinà franceinfo
Je voudrais qu'on parle de vos parents parce qu'ils sont très présents dans cet album. Aujourd'hui disparus, ils se portaient un amour inconditionnel. C'est très important pour vous et vous leur offrez ce titre piano-voix : À s'en ouvrir les veines. On est à fleur de peau, il met les larmes aux yeux. Parlez-nous de cette chanson.
Ça n'a pas été simple. J'ai la chance d'avoir été élevé par des parents très aimants et qui s'aimaient comme des fous. Ils ont vécu 62 ans ensemble. Je suis allé à leur mariage, j'avais 17 ans. Ma mère a fait une forme d'Alzheimer dans les cinq dernières années de sa vie. Moi, j'ai plutôt une mentalité orientale pour ces choses-là, c'est-à-dire que les anciens, on les garde auprès de nous. Et puis, j'ai très vite compris que c'était injouable. Donc il a fallu la placer. Et au moment où elle a été placée, mon père est rentré dans un refus de vivre. Mais total. Le mec a mis cinq ans avant de partir et je l'ai accompagné. Donc j'ai essayé au départ de le ramener à des choses raisonnées et raisonnables. Mais il m'a dit : "Écoute, j'ai 80 piges, tu ne vas pas me les briser". Donc c'était son choix et il est allé au bout.
On grandit avec ça ?
Oui. Ça vous fait prendre conscience que les gens qu'on a près de soi et qui nous sont chers et qu'on aime, c'est hyper vital de leur dire.
Avec cet album, même si vous évoquez votre et vos vies passées, car il y en a eu plusieurs, vous vous ancrez dans le présent. Êtes-vous tourné vers le présent avec au loin, ce bout d'avenir ? N'est-ce pas ça, cet album ?
C'est essentiel de tendre vers ça. Même si aujourd'hui il y a plein de choses qui nous montrent que... Je pense que tout est aussi une histoire de vigilance.
Amo et Odi n'est-il pas avant tout un album d'espoir ? L'espoir que notre futur propulsera l'être devant l'avoir ?
Oui, la dualité du verbe être et du verbe avoir. Bien sûr, c'est essentiel et je pense que quand on arrive dans une certaine tranche d'âge comme la mienne, en fait, on s'aperçoit que quand même, ce qu'on est, c'est plus important que ce qu'on a.
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